Présidentielle 2022 : « Remontada », TER et système D… Arnaud Montebourg fait campagne auprès « des territoires oubliés »
REPORTAGE•L’ancien ministre PS de l’Economie, candidat à la présidentielle 2022, défendait sa « remontada des territoires » en Eure-et-Loir ce jeudiThibaut Le Gal
L'essentiel
- Arnaud Montebourg, ancien ministre de l’Economie socialiste, est candidat à la présidentielle 2022.
- L’entrepreneur, de retour en politique, fait campagne dans les trains régionaux pour toucher les classes moyennes et populaires.
- Sur le marché de Châteaudun, ce jeudi, il a exposé son programme de « remontada des territoires » aux habitants.
De notre envoyé spécial à Châteaudun,
« Qu’est-ce que vous faites là ? ». Il est 8h du matin ce jeudi à Paris, le ciel tarde à se lever. Arnaud Montebourg est surpris de nous voir monter dans le wagon, à moitié vide, gare d’Austerlitz. Accompagné d’une poignée de fidèles, le candidat à la présidentielle 2022 fait campagne en train. En TER * précisément, pour toucher ces classes moyennes et populaires qu’il juge « délaissées économiquement et oubliées politiquement ».
Un moyen de sillonner la France à peu de frais, et un joli coup de com' pour mettre en valeur son projet de « remontada des territoires ». D’ailleurs, la séquence dans le wagon, le temps du trajet, est dealée « en exclu » avec un autre média. Qu’importe, on retrouve Arnaud Montebourg deux heures plus tard au bout des rails : Châteaudun, Eure-et-Loir, charmante commune de 13.000 têtes.
« Un marchand de miel ? Où ça ? Un collègue… et il a de bons prix ! »
« Le train, c’est pratique. On a le temps d’échanger, les gens sont disponibles, quand ils ne sont pas plongés dans leur sudoku », sourit-il. « Cette France des sous-préfectures, c’est la mienne, je suis un enfant des territoires, j’y ai été élu vingt ans. J’en ai gardé une fierté et un attachement », ajoute l’ancien élu et député socialiste de Saône-et-Loire. Sur le quai, Fabien Verdier, maire divers gauche de Châteaudun, l’accueille tout sourire. Arnaud Montebourg refuse la voiture et remonte vers le centre-ville d’un pas rapide.
L’occasion d’entrer dans les boutiques pour saluer de potentiels électeurs. « Bonjour ! Arnaud Montebourg, candidat à la présidentielle. Dites-moi un peu, comment va le commerce ? » Ton enjôleur, serrage de mains très chiraquien. L’ancien ministre de l’Economie et du Redressement productif de François Hollande est à l’aise, mais pas toujours reconnu. « Il faut dire au maire de mettre des ampoules dans les rues », lui demande un passant. « Il cherche de l’argent, comme tous les maires… », réplique le candidat.
Sur le marché, un peu plus loin, Arnaud Montebourg est intenable. « Un marchand de miel ? Où ça… ? Un collègue…, et il a de bons prix ! », dit-il en s’approchant. « Un apiculteur à l’Élysée, qu’est-ce que vous en dites ? On ira se faire une bonne tartine de miel ». Après quatre années loin de la politique, Arnaud Montebourg semble heureux de retrouver la proximité d’une campagne. L’entrepreneur de 58 ans vante sa nouvelle carrière dans le business du miel, de la glace bio ou des amandes.
Un autre passant l’interroge sur l’envolée des prix à la pompe. « Vous avez essayé le covoiturage ? C’est difficile… il faudrait inventer un système à la demande… Mais heureusement, vous allez avoir le chèque Castex ! », ironise-t-il, défendant, lui, une baisse des taxes sur le carburant. « Venez, je présente mon projet, on ne paye pas un coup à boire mais on fait travailler les neurones ».
Le système D laisse entrevoir une campagne difficile
Vers 11h, Arnaud Montebourg entame son traditionnel « forum improvisé ». Un ampli portable et un micro fil, pour exposer façon bateleur son programme de « remontada » : hausse générale des salaires avec augmentation du Smic de 10 %, relocalisation d’une soixantaine de « produits critiques », nationalisation des autoroutes, rétablissement d’un service civil national et militaire obligatoire, police de proximité, embauche de médecins aux 35 heures pour lutter contre les déserts médicaux, rachat par l’Etat de maisons abandonnées pour les mettre à disposition des plus modestes… « Il faut prendre appui sur cette France des territoires… Vous avez des questions ? Un micro va circuler ».
« On n’en a pas d’autre », glisse, gêné, un membre de son équipe. On rapproche l’ampli, Montebourg tend lui-même le micro.
Ce système D laisse entrevoir une campagne difficile. Son départ du PS l’a isolé. Ceux qui l’entourent lors de ses déplacements en TER, une dizaine depuis septembre, sont bénévoles, comme lui. Rare sont les soutiens de renoms. « Je ne suis pas payé à faire de la politique, j’ai un métier, c’est difficile d’ailleurs de faire les deux », souffle-t-il, alors que sa candidature reste engluée dans les sondages à moins de 5 %. « Mais c’est aussi ma force, je suis libre. Et mes idées sur la République, le made in France, sont majoritaires dans le pays ».
Mais la présidentielle est exigeante, d’un point de vue humain et financier. Son entourage rêve d’un abandon de la candidate Anne Hidalgo pour obtenir quelques soutiens supplémentaires et lancer la dynamique. Après un repas en compagnie d’élus et de patrons d’entreprise, Arnaud Montebourg visite la base aérienne de Châteaudun, qui a récemment fermé. La presse n’est pas conviée et l’attend à un café. Un couple profite du soleil, évoque les fins de mois difficiles, la montée des prix « de l’essence, du gaz, et même de la baguette ». La femme se désole de l’insécurité. Sur les panneaux d’affichage, un peu plus loin, des affiches de Marine Le Pen. On glisse le nom d’Arnaud Montebourg, qui doit arriver en compagnie du maire Fabien Verdier. Elle s’étonne : « Qui ça ? Je ne le connais pas. Mais passez le bonjour au maire ».
* Transport express régional