Retour à Marseille sous haute tension pour Emmanuel Macron

Marseille : Retour sous haute tension pour Emmanuel Macron

ÇA COINCELes chantiers amorcés par le président lors de sa précédente venue, et qui poussent Emmanuel Macron à revenir à Marseille ce vendredi, ont abouti localement à des tensions et des incompréhensions
Mathilde Ceilles

Mathilde Ceilles

L'essentiel

  • Emmanuel Macron est annoncé à Marseille vendredi après-midi et samedi matin.
  • Certains chantiers qu’il a amorcés lors de sa première visite avancent dans la douleur, entre incompréhension et colère.

Il est de retour, mais le comité d’accueil cette fois n’est plus vraiment le même. Après une visite très attendue début septembre, Emmanuel Macron revient à Marseille vendredi après-midi faire un point d’étape sur les chantiers ​qu’il a initiés. Le hic : le passage du président de la République dans la cité phocéenne a eu pour effet de dégoupiller plusieurs bombes qu’il lui faudra désormais désamorcer. 20 Minutes revient sur ces points de crispation qui seront la toile de fond de la visite présidentielle.

L’expérimentation Macron dans les écoles au piquet (de grève ?)

L’annonce a fait l’effet d’une déflagration. En septembre dernier, Emmanuel Macron avait pris tout le monde de court, en affirmant vouloir expérimenter dans 50 écoles de la cité phocéenne le recrutement des enseignants par les directeurs d’école eux-mêmes. Et ce « dans les quartiers où la situation est la plus difficile », où, selon le président de la République, « les profs ne viennent plus », « fatigués de travailler trop longtemps » dans ces endroits.

A la veille du retour d’Emmanuel Macron, une sorte de fronde s’est organisée dans les écoles marseillaises. Dans un communiqué, 80 écoles affirment ouvertement avoir refusé de prendre part à cette expérimentation. « A notre connaissance, ils ont même commencé à chercher des écoles dans les quartiers sud, en urgence, afin de trouver les 50 écoles coûte que coûte, avant la venue d’Emmanuel Macron », lance Virginie Akliouat, secrétaire départementale du syndicat Snuipp FSU13.

« A la mi-septembre, une conseillère pédagogique m’a envoyé un SMS me demandant si je voulais bien faire partie de l’expérimentation, s’étonne le directeur d’une école dans le huitième arrondissement. Il fallait que je donne la réponse dans la demi-heure. J’ai dit bien sûr non, car ce n’est pas mon métier, de recruter des gens. Et appliquer les méthodes du privé au public a rarement donné du positif. »

Signe supplémentaire de mécontentement : ce mardi soir, les représentants nationaux des principaux syndicats enseignants ont tous fait le déplacement à Marseille, afin d’afficher lors d’une réunion publique une sorte de front commun syndical contre cette expérimentation. Ils ont évoqué la possibilité de faire grève dès vendredi, jour de la venue du président. Une pétition en ligne a par ailleurs été lancée par les syndicats, afin de faire reculer Emmanuel Macron sur ce projet.

Patinage et flou artistique sur le développement des transports

C’était l’une des annonces fortes du président de la République. Lors de sa dernière visite, Emmanuel Macron avait promis le versement d’un milliard d’euros, dont 250 millions en subventions, afin de financer « l’automatisation du métro, la création de quatre lignes de tramway et de cinq lignes de bus à haut de niveau de service. »

Le président est parti, laissant dans son sillage un certain flou sur ces déclarations. Quelques semaines plus tard, en lieu et place des nouvelles lignes de tramway, la présidente de la RTM préférait parler de prolongements de lignes existantes sur quatre tronçons. « Il n’y a aucun intérêt, ni dans l’opérationnel, ni financièrement, à repartir sur de nouvelles lignes, indiquait Catherine Pila dans une interview à 20 Minutes. Mais finalement, ce sont de nouveaux chantiers, et elles deviennent, de fait, de nouvelles lignes. »

Quelques jours plus tard, au conseil municipal, Benoît Payan affirme, lui, que « le président de la République a émis l’idée de faire une quatrième ligne de tramway. » Et de s’indigner auprès de Catherine Pila : « Vous opposez au président de la République une fin de non-recevoir en lui disant : “Il n’y aura pas quatre lignes de tramway. Il y en aura trois. Elles seront faites comme j’ai souhaité comme elles soient faites, c’est-à-dire je les phase et je les choisis.” »

« Nous attendons avec impatience l’avis du président de la République sur les projets présentés, lance la présidente LR de la métropole Martine Vassal. On a présenté des projets pour un montant de 3,9 milliards. La dernière fois, on nous a dit qu’il y aurait 1 milliard qui serait financé avec une hiérarchie dans les projets, qui étaient actés. On avait besoin de cela pour que ça aille vite. Les transports, ça ne se pense pas en un clic. Si le président de la République nous annonce plus d’argent lors de sa visite vendredi, je vous assure, on le prendra. »

L’usine à gaz métropolitaine au bord de l’explosion

En toile de fond de ces tensions entre la mairie de Marseille et la métropole se trouve le fonctionnement même de ladite métropole, devenue une véritable usine à gaz au bord de l’explosion. Le président de la République lui-même avait d’ailleurs pointé les défaillances de cette institution devenue complexe, voire ingérable, entre les conseils de territoire qui morcellent l’action publique et le partage des compétences avec les maires devenu source de conflit.

Ainsi, la crise des déchets à Marseille est devenue un bras de fer politique entre Benoît Payan (PS) et Martine Vassal (LR), tous deux anciens adversaires aux municipales. Le maire de Marseille a écrit au président de la République, afin de récupérer cette compétence attribuée à la métropole. Benoît Payan, qui pointe « des enchevêtrements de compétences inefficaces », estime que le « statu quo » n’est plus tenable. « Seule une réforme immédiate de la gouvernance locale et de la répartition des compétences opérationnelles de proximité peut permettre d’y mettre un terme », écrit-il.

Ce lundi, Martine Vassal, la présidente de la métropole, a rencontré Jean Castex, afin d’engager un dialogue sur le sujet, quelques mois avant une possible évolution législative. Le lendemain, après une réunion de travail avec les maires de la métropole, elle s’est dite prête à s’engager vers un transfert de compétences, sans apporter de précisions. Mais, sur ce sujet épineux, Emmanuel Macron ne devrait pas être le juge de paix. Selon Martine Vassal, la ministre de la Cohésion des territoires Jacqueline Gourault viendra à Marseille pour faire des annonces sur cette question d’ici la fin du mois d’octobre.