Projet de loi climat : Les députés pour la création du délit d'« écocide »
ENVIRONNEMENT•C’est une proposition atténuée de la Convention citoyenne pour le climat, qui réclamait un crime d’écocide20 Minutes avec AFP
Les députés en commission ont voté dans la nuit de jeudi à vendredi la création d’un nouveau délit controversé d'« écocide », parmi une batterie de mesures destinées à renforcer l’arsenal judiciaire contre les atteintes à l’environnement. La création de ce nouveau délit, l’une des mesures phares du projet de loi « Climat et résilience » examiné en commission spéciale, avait été jugée sévèrement tant par les membres de la Convention citoyenne pour le climat (CCC) que par les juristes du Conseil d’Etat.
Les premiers, qui avaient réclamé la création d’un « crime » d’écocide, lui avaient attribué la note de « 2,7/10 » au moment d’évaluer la transposition des propositions de la CCC dans le texte de loi. Les seconds avaient pointé le risque d’inconstitutionnalité de cette mesure jugée confuse et mal ficelée. En commission spéciale, les députés n’ont toutefois retouché qu’à la marge la rédaction du projet gouvernemental, malgré une tentative de réécriture du co-rapporteur, le Modem Erwan Balanant, soucieux d’éviter les fourches caudines du Conseil Constitutionnel qui sera à coup sûr saisi du texte, une fois adopté par le Parlement.
Le pari de la « novation juridique »
La ministre de la Transition énergétique, Barbara Pompili, lui a opposé une fin de non-recevoir en faisant le pari de la « novation juridique » qui préside à la mesure. « Les délits d’écocide s’appliquent aux atteintes les plus graves à l’environnement au niveau national », a-t-elle expliqué. Ils prévoient des peines allant jusqu’à dix ans de prison et 4,5 millions d’euros d’amende. Le délit d'« écocide » s’appuie sur un renforcement des sanctions pénales applicables en cas de pollution des eaux, de l’air et des sols mais est caractérisé par l'« intentionnalité » de la pollution.
Pour des raisons diamétralement opposées, Mathilde Panot a dénoncé « une régression » estimant que « Bercy », soucieux de préserver les entreprises face à de nouveaux risques juridiques, avait « gagné les arbitrages », tandis le LR Julien Aubert a raillé une nouvelle mesure qu’il a comparée au « village Potemkine » au regard du concept de crime d’écocide débattu depuis des décennies au niveau de la justice internationale. Celui-ci a été brandi au sujet de l’assèchement de la mer d’Aral ou de l’utilisation de l’agent orange par l’armée américaine au Vietnam. Au cours de cette dernière soirée d’examen du texte en commission avant son passage dans l’hémicycle à partir du 29 mars, les députés ont également créé un délit « général » de mise en danger de l’environnement, puni de trois ans de prison et de 300.000 euros d’amende.
Ils ont gonflé le montant de toute une série d’amendes prévues par des articles du code de l’environnement qui peuvent désormais aller jusqu’à 100.000 euros. Avec en toile de fond la catastrophe de Lubrizol de Rouen, le gouvernement a en outre fait adopter un amendement créant un bureau d’enquêtes et d’analyses sur les risques industriels qui mènera des enquêtes sur les causes et conséquences des accidents les plus importants.