L'essentiel

  • Nicolas Sarkozy a été condamné lundi en première instance à trois ans de prison, dont un ferme, pour « corruption » et « trafic d’influence » dans l’affaire dite des « écoutes de Paul Bismuth ».
  • Soutenu par sa famille politique, l’ancien président, qui a fait appel, devrait garder un rôle très influent au sein de la droite.
  • L’hypothèse d’un recours pour la présidentielle 2022 semble en revanche plus délicate.

Un coup de tonnerre à droite. Nicolas Sarkozy a été condamné lundi en première instance à trois ans de prison, dont un ferme, pour « corruption » et « trafic d’influence » dans l’affaire dite des « écoutes de Paul Bismuth». Instinctivement, sa famille politique a serré les rangs et apporté son soutien à l’ancien président de la République, qui a décidé de faire appel.

« La sévérité de la peine retenue est absolument disproportionnée », a ainsi estimé le président des Républicains Christian Jacob. « Une condamnation extrêmement dure dans un dossier particulièrement faible », a ajouté le patron des sénateurs LR Bruno Retailleau. Car Nicolas Sarkozy reste une figure centrale à droite, certains espérant même qu’il puisse constituer un recours pour la présidentielle de 2022. Mais avec cette condamnation, la droite va-t-elle définitivement tourner la page Sarkozy ?

Un retraité encore actif politiquement

Après sa défaite à la primaire, en novembre 2016, Nicolas Sarkozy faisait (de nouveau) ses adieux à la politique française. « Il est temps pour moi d’aborder une vie avec plus de passion privée et moins de passion publique », disait-il. De manière officielle, du moins. Car le fondateur du parti Les Républicains n’a jamais réellement coupé avec la politique. L’absent s’est montré très présent, dans l’ombre, recevant régulièrement fidèles et cadres du parti. L’expérience et l’âge aidant, l’ancien bulldozer politique s’est mu en influent parrain de la droite. Nul n’a été étonné, à LR, de voir ainsi Xavier Bertrand, qui rêve de conduire la droite à la prochaine présidentielle, se rapprocher récemment de l’ancien président.

« Il conseille et adoube, car il reste une référence. Beaucoup ont encore en tête sa campagne réussie de 2007. On est encore orphelins et nostalgiques de cette époque, où la droite avait un vrai patron », reconnaît Philippe Gosselin, député LR de la Manche, qui ne croit pas à un changement de statut après la condamnation de l’ancien chef de l’Etat. « Cette décision judiciaire l’embarrasse forcément, mais ça n’entachera pas l’aura qu’il peut avoir encore chez nous. Je ne crois pas que ça tourne définitivement la page Sarkozy », dit-il.

« Une figure tutélaire qui n’est absolument pas écornée »

Le soutien en bloc de la droite prouve que la statue de l’ancien chef de l’Etat n’est pas près d’être déboulonnée. « C’est une figure tutélaire qui n’est absolument pas écornée, appuie le député LR du Nord Sébastien Huyghe. Cette décision n’a rien à voir avec la vision qu’il a du pays, ses idées pour sortir de la crise sanitaire ou éviter la crise économique. Il va rester une référence, quelqu’un d’important, qu’on continuera de consulter et qui continuera de marquer notre famille politique. » Comme le souligne Pierre-Henri Dumont, député du Pas-de-Calais, « il reste un mentor pour beaucoup ». « Et je ne pense pas qu’il y aura des répercussions sur le fait qu’il soit consulté ou écouté. »

Chez les Républicains, certains mettent en avant le parcours politique tumultueux de l’intéressé. « Sa vie est une succession d’épreuves qu’il n’a eu de cesse de surmonter avec énergie et courage. Une nouvelle fois, il saura le démontrer », a tweeté le patron des députés LR, Damien Abad.

L’idée d’un recours à droite plombée ?

Jusqu’à revenir au premier plan de la politique nationale ? Alors que la droite peine à se trouver à champion pour 2022, certains proches de Nicolas Sarkozy caressaient ces derniers temps l’idée qu’il puisse être un recours. « Que certains de ses amis aient rêvé d’un retour me paraît logique, mais je ne pense pas que la question se pose. Lui-même a dit qu’il avait tourné la page », balaie Sébastien Huyghe. « En cas de condamnation définitive, ça me paraît compliqué. Mais aucune élection présidentielle ne s’est déroulée comme on s’y attendait », nuance Pierre-Henri Dumont.

« L’histoire nous apprend que les retours sont difficiles. Ce n’est pas l’hypothèse la plus vraisemblable, mais en cas de situation extraordinaire, on ne peut pas totalement l’écarter. Un politique n’est vraiment mort que lorsqu’il est six pieds sous terre », sourit Philippe Gosselin. Reste que le procès en appel, et l’espoir d’une relaxe, ne devrait pas arriver avant de longs mois. Et que l’ancien président doit affronter d’autres affaires judiciaires, dont le procès Bygmalion dès le mois de mars. Mais nul doute que Nicolas Sarkozy conserve son rôle d’influence au sein de la droite. Un député ironise : « Avec cette condamnation, il faut peut-être simplement éviter le terme de "parrain" pendant quelque temps… ».