Assemblée nationale : 57 députés emploient leur propre suppléant, d’après une étude
PARLEMENT•L’Observatoire de la vie politique et parlementaire recommande de mettre bon ordre à cette « bizarrerie »20 Minutes avec AFP
57 suppléants et suppléantes de députés et députées rémunérées comme collaborateurs ou collaboratrices parlementaires sous ce quinquennat : du jamais vu, selon une étude publiée mardi par l’Observatoire de la vie politique et parlementaire, qui recommande de mettre bon ordre aux « bizarreries » autour de ces « parlementaires remplaçants ». « Gratuité de l’engagement », « bénévolat républicain » : tel est l’esprit qui préside en théorie au rôle de « député remplaçant ». Sans que la loi ne l’interdise, des « détours habiles et insoupçonnés » permettent d’offrir une rémunération aux suppléants, relève l’étude.
En janvier 2021, celle-ci décomptait 57 députés et députées qui rémunèrent en tant qu’employeurs, leurs « suppléants, salariés de fait de celui ou celle qu’ils peuvent remplacer ». Soit le dixième de l’Assemblée. Parmi eux, le président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand (LREM), et un vice-président, Marc Le Fur (LR). Selon Denys Pouillard, directeur de l’Observatoire, il « vaudrait mieux, pour éviter tout soupçon de conflit d’intérêts ou de favoritisme, interdire à l’avenir purement et simplement ce type de recours ». Si en effet, rien n’interdit cette pratique, « beaucoup de questions interpellent ».
61 suppléantes et suppléants devenus députés depuis 2017
« La déclaration de remplaçant – et son apport bénéfique en logistique électorale – lors de la déclaration de candidature ne peut-elle pas faire l’objet d’une contrepartie d’échange contre un emploi salarié sur fonds publics ? », interroge Denys Pouillard. Depuis le début de la législature en juin 2017, l’Observatoire a comptabilisé 61 remplaçants appelés à occuper le siège laissé vacant par le titulaire. Ils ont pu remplacer des députés devenus ministres, d’autres qui sont décédés, des élus partis au Sénat ou d’autres encore qui ont opté pour une fonction exécutive locale en raison de la loi sur le non-cumul des mandats.
L’Observatoire de la vie politique et parlementaire détaille plusieurs exemples d'« indépendance », d'« indiscipline » ou d'« infidélité » des remplaçants sur fond de recomposition politique post-macronisme ou tropisme des mandats locaux. Il constate également quelques « tours de passe-passe » ou « chemins de traverse » au moment où le parlementaire doit quitter sa fonction comme ce fut le cas de Laure de La Raudière (Agir) avant sa nomination à l’Arcep. La députée s’était discrètement fait élire à une fonction exécutive locale, ce qui lui permit de démissionner pour cumul de fonction et de laisser sa place à son suppléant en évitant de nouvelles élections partielles.