Projet de loi bioéthique : Le texte revient au Sénat en deuxième lecture
EXAMEN•Après Agnès Buzyn, c’est désormais Olivier Véran, le ministre de la Santé actuel, qui va défendre le texte20 Minutes avec AFP
A partir de mardi, le projet de loi bioéthique, et sa mesure phare ouvrant la PMA à toutes les femmes, sera de retour au Sénat, à majorité de droite, qui l’avait voté de justesse une première fois moyennant de larges modifications.
L’an dernier, le texte avait donné lieu, en première lecture, à deux semaines de débats nourris, accompagnées chaque soir de manifestations contre l’extension de la PMA (procréation médicalement assistée) devant les grilles du Palais du Luxembourg.
De nouveaux visages
En une année, bien des choses ont changé. Le texte, qui a été adopté en deuxième lecture par l’Assemblée nationale cet été, sera examiné sur trois petites journées dans l’hémicycle du Sénat, éclipsé par le nouveau tour de vis attendu contre le Covid-19. Le casting a changé au gouvernement. Agnès Buzyn, qui avait déployé toute sa force de conviction pour défendre le texte, a laissé la place à Olivier Véran au ministère de la Santé. Un ministre accaparé par l’épidémie et que les sénateurs regrettent de voir fort peu. « Le Covid écrase tout, cannibalise les débats », note le corapporteur centriste Olivier Henno.
Le Sénat a été renouvelé en partie en septembre dernier et si la majorité de droite est sortie renforcée des élections, il s’agit, sur ce projet de loi qui touche à l’intime, de positions plus personnelles que partisanes. Les sénateurs entrants feront-ils bouger les lignes ? « C’est une inconnue », convient la corapporteure LR Muriel Jourda. Pour Bernard Jomier, corapporteur PS, « ça ne devrait pas bouger énormément ». Enfin, Covid oblige, les opposants à l’ouverture de la PMA, La Manif pour tous en tête, doivent adapter leur mobilisation, même s’ils ne désarment pas.
Modification de la filiation
Les sénateurs ont rétabli en commission le texte sur l’ouverture de la PMA adopté par le Sénat en première lecture, qui avait été écrasé par les députés. Muriel Jourda, comme le chef de file du groupe LR Bruno Retailleau, sont purement et simplement opposés à cette version, mais ont dû se ranger à « une position du moindre mal » : ouverture de la PMA aux couples de femmes et aux femmes seules, mais pas de prise en charge par la Sécurité sociale pour ces nouveaux bénéficiaires. Et maintien d’un critère médical pour les couples hétérosexuels. « C’est un oui du bout des lèvres, avec une somme de verrous pour que le nouveau droit ne puisse pas s’appliquer », résume Bernard Jomier.
Conséquence de l’ouverture de la PMA, le texte prévoit un nouveau mode de filiation pour les enfants de couples de femmes. Les sénateurs ne sont pas revenus en commission sur le dispositif voté par les députés. La filiation sera établie à l’égard de la femme qui a accouché via sa désignation dans l’acte de naissance, tandis que celle qui n’a pas porté le bébé le sera par la reconnaissance conjointe. Les sénateurs ont en revanche réécrit l’article concernant la filiation d’un enfant né à l’étranger d’une GPA (gestation pour autrui), interdite en France, afin de « prohiber toute transcription complète » d’un acte de naissance étranger.
Un accès aux origines
Autre sujet, la disposition autorisant l’autoconservation des gamètes (ovocytes et spermatozoïdes) hors raisons médicales, qui avait créé une grande confusion dans l’hémicycle en première lecture. Le Sénat l’avait finalement supprimée, avec une égalité de voix pour et de voix contre. Elle a été rétablie par les députés et adoptée une nouvelle fois par la commission spéciale, avec des aménagements. Le texte prévoit que les enfants nés d’un don de gamètes après l’entrée en vigueur de la loi puissent accéder à leur majorité à des « données non identifiantes » (âge, caractéristiques physiques, etc.) du donneur et même, s’ils le souhaitent, à son identité.
Les sénateurs ont prévu toutefois en commission que le donneur puisse accepter ou refuser l’accès à son identité au moment où est formulée la demande. Par ailleurs, les sénateurs ont également interdit en commission la création d’embryons transgéniques et d’embryons chimériques ainsi que toutes les techniques de modification génomique des embryons humains.