BULLETIN DE SANTEAprès la contamination de Macron, l’Elysée au défi de la transparence

Coronavirus : Après la contamination de Macron, l’Elysée au défi de la transparence

BULLETIN DE SANTELa santé des présidents reste un domaine opaque de la vie politique française et, pour le moment, malgré les promesses, le Covid-19 d’Emmanuel Macron n’y change pas grand-chose
Rachel Garrat-Valcarcel

Rachel Garrat-Valcarcel

L'essentiel

  • L’Elysée a annoncé jeudi matin que le président était positif au Covid-19 et qu’il allait s’isoler.
  • Dans le même temps, le gouvernement a annoncé la « transparence » sur l’état de santé du président. Pourtant, aucun bulletin de santé n’a encore été publié.
  • Ce nouvel épisode ne semble pas changer la doctrine française sur la santé des chefs de l’Etat : le secret avant tout.

Circulez, y’a pas grand-chose à voir. Depuis le début de la Ve République, c’est toujours le secret le mieux gardé de l’Elysée : la santé du président de la République. Et le Covid-19 d’Emmanuel Macron n’est pas parti pour faire exception. Depuis 1974 et le décès de Georges Pompidou deux ans avant la fin de son mandat d’une « maladie cachée », cette question est une arlésienne des campagnes électorales : à peu près tous les élus depuis Valéry Giscard d’Estaing ont promis des bulletins de santé réguliers, sans vraiment passer aux actes. VGE lui-même n’en a rien fait. François Mitterrand l’a fait, lui. Mais Libération rappelle ce vendredi matin que les bulletins de santé de l’Elysée n’ont jamais rien dit avant 1992 du cancer du président, pourtant diagnostiqué dès 1981.

Cette fois Emmanuel Macron, qui n’a jamais publié de bulletins de santé depuis son accession à l’Elysée, il y a bientôt quatre ans, ne pouvait pas faire autrement que de découvrir un peu du secret puisque, protocole sanitaire oblige, il doit se mettre en isolement. Il est même, depuis jeudi soir, à la résidentielle présidentielle de la Lanterne, dans le parc du château de Versailles. Si on en croit Le Parisien, il est accompagné d’un staff réduit mais surtout de son médecin personnel, Jean-Christophe Perrochon, déjà là du temps de François Hollande. Ce médecin rattaché au service de santé des armées est « un homme très attentif, d’une discrétion absolue. C’est une tombe », d’après Gaspard Gantzer, l’ancien communiquant de François Hollande.

Toujours pas de bulletin de santé

L’annonce de la contamination du président de la République, jeudi matin, est tombée via un communiqué. Il ne s’agit pas d’un bulletin de santé signé par le médecin de l’Elysée. Ce vendredi matin, on ne sait toujours pas s’il est dans les intentions de la présidence d’en publier un. Encore moins quand il tombera. L’Elysée dit encore qu’il n’y aura pas plus de commentaire. Tout juste a-t-il indiqué qu’Emmanuel Macron est fatigué, fiévreux mais, bien entendu, toujours au travail.

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On est pour l’instant assez loin de la « transparence » annoncée par le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal. « Elle restera la règle », a-t-il dit, sans qu’on sache vraiment de quelle règle on parle tant le sujet a toujours été opaque. Sur France Inter, vendredi matin, Franck Louvrier, l’ancien communiquant de Nicolas Sarkozy pendant son mandat présidentiel, recommandait de communiquer tous les jours, deux fois par jour tant que l’agenda est perturbé. Et plus il y a de détail mieux c’est, poursuivait son successeur à l’Elysée, Gaspard Gantzer, toujours sur France Inter : « Ça s’impose d’un point de vue éthique mais aussi tactique. Car s’il commettait l’erreur de mentir par action ou par omission ça lui serait immédiatement reproché, et les complotistes s’en donneraient à cœur joie. »

Montrer le « corps du roi »

Gantzer recommande aussi de « montrer » le président. Un « impératif » pour « rassurer les Français ». Donald Trump et Boris Johnson, tous deux contaminés plus tôt cette année, l’avaient fait quand c’était possible. Au moins sur ce point il a été entendu : Emmanuel Macron est apparu jeudi soir, depuis la Lanterne, pour clôturer, en visioconférence et muni d’un masque FFP2 (plus filtrant qu’un masque chirurgical classique), la conférence nationale humanitaire. On ne sait pas encore si de tels épisodes se reproduiront. Sans doute cela sera-t-il lié à l’état de santé du président.

Un état de santé qui n’a plus été autant sous le feu des projecteurs depuis Nicolas Sarkozy. En juillet 2009, l’ancien chef de l’Etat avait fait un malaise lors d’un jogging, déjà à Versailles d’ailleurs. Il avait été hospitalisé brièvement à l’hôpital militaire parisien du Val-de-Grâce, rappelle l’AFP.