Marseille : La fin d’un « monument », Jean-Claude Gaudin a dirigé son dernier conseil municipal
POLITIQUE•Le maire de Marseille, Jean-Claude Gaudin, à la tête de la deuxième ville de France a dirigé son dernier conseil municipal après 25 ans passés à la mairieAdrien Max
L'essentiel
- Jean-Claude Gaudin, le maire LR de Marseille, a dirigé ce lundi matin son 198e et dernier conseil municipal en tant que maire.
- Il était rentré au sein de ce conseil municipal en 1965, et a dirigé la ville pendant vingt-cinq ans.
- Sa famille politique comme ses adversaires ont rendu hommage à l’homme politique.
Il a lancé « adopté » et s’en est allé. Jean-Claude Gaudin a adopté ce lundi son 30.000e et dernier rapport lors de son dernier conseil municipal, après 25 ans passés à la tête de la deuxième ville de Marseille. Comme à son habitude, le maire n’a laissé transparaître aucune émotion tout au long de la séance durant laquelle quelque 150 délibérations ont été prises, distillant au passage quelques pics à ses adversaires. Avant une émouvante prise de parole pour conclure son 198e conseil municipal dans un silence de cathédrale.
« Je voudrais vous adresser mes remerciements les plus sincères pour ces débats riches, et vifs. Cette passion, je l’ai en moi, et ce n’est pas sans émotion que je l’évoque. Il n’est pas de mission plus noble que de servir sa ville, Marseille. La plus belle des villes. Nul ne peut arrêter l’horloge du temps, et l’heure du retrait est venue même si elle ne marquait pas la fin d’une passion. Je vous souhaite réussite, bonheur pour vos espérances et surtout je souhaite bonne chance à Marseille », a-t-il lancé en guise d’au revoir, sous les applaudissements de ses amis et opposants.
« L’un des derniers monuments de la politique française »
Des opposants qui se sont succédé pour louer la carrière politique de Jean-Claude Gaudin, alors qu’il a siégé pour la première fois au conseil municipal en 1965, il y a 55 ans ! A commencer par Benoit Payan, président du groupe PS à la mairie qui n’était pas né à cette époque. « Je mesure la chance que j’ai eue d’être votre opposant. J’ai eu la chance de côtoyer l’un des derniers monuments de la politique française. Nous n’avons pas les mêmes convictions, mais je tiens à saluer l’engagement qui est le vôtre. Et j’ai comme l’intuition que ce n’est pas la fin de l’histoire », a-t-il tenu à souligner.
Stéphane Ravier, sénateur du Rassemblement national dans les Bouches-du-Rhône, a lui aussi tenu à remercier celui qui est « un peu le père de tous les Marseillais ». « J’ai été le témoin privilégié de l’action d’un monstre, un monstre de drôlerie et de remarques acerbes, de bonhomie et d’amour pour sa ville. Un monstre politique qui a dévoré ses enfants les uns après les autres. Vous serez éternel. Vous avez été prisonniers de vos propres adjoints qui vous ont caché la vérité, mais aussi de cette carapace que vous vous êtes forgée à force de prendre des coups », s’est-il exprimé.
Sans oublier de distiller une anecdote au combien représentative de Jean-Claude Gaudin. « Je me souviens des vœux au four des navettes. En me serrant la main, vous m’aviez laissé les miettes d’une navette. Etait-ce un symbole pour me dire que vous me laisseriez une part du gâteau électoral, ou bien que vous me laisseriez des miettes dans les urnes ? », l’a-t-il interrogé sans obtenir de réponse.
Un maire d’un autre temps
« C’est la dernière fois que je m’adresse à vous dans cet hémicycle. J’ai du mal à y croire, mais il fallait que ça arrive », a début Yves Moraine, président de la majorité municipale avant d’évoquer Antenne 2 et FR3, comme pour rappeler ce maire d’un autre temps. « Vous incarnez Marseille alors que je ne vous ai jamais vu boire du pastis, ni jouer aux cartes, ni aux boules. Les Marseillais vous aiment, même quand ils critiquent votre politique. Vous avez beaucoup à transmettre, votre instinct populaire et votre richesse politique. Nous avons encore besoin de vous », a-t-il lâché avec émotion. Si Gaudin avait laissé échapper une larme lors de ses au revoir au Sénat, il s’est séché le coin de l’œil après la prise de parole de ses collègues.
« Je m’arrête parce que j’ai 80 ans. Et qu’après avoir consacré toute ma vie à la politique, il y a un moment donné ou la place doit revenir à d’autres ou la modernité, les choses nouvelles apparaissent et que je ne me sentais plus tellement en adéquation avec tout ce qui se passe », a admis Jean-Claude Gaudin.
Lourd héritage
Une page se tourne à Marseille, mais ses adversaires n’oublient pas l’héritage laissé après 25 ans de règne. Si Jean-Claude Gaudin estime sa plus belle réussite à être parvenu à diviser le chômage de « moitié », ses opposants ont tour à tour évoqué l’état des écoles, le logement insalubre et indigne ou la bétonisation de la ville. Les CRS étaient d’ailleurs à nouveau présents devant l’hémicycle, comme à chaque conseil depuis le drame de la rue d’Aubagne. Des manifestants avaient d’ailleurs organisé « La fête à Gaudin et ses Vassal », un rassemblement le conseil municipal aux sons des « pars et ne te retourne pas ».
Il partira, mais se retournera. Jean-Claude Gaudin publiera ses mémoires à l’automne prochain. Sur sa vie à Marseille, mais aussi avec Valéry Giscard d’Estaing, Jacques Chirac, Edouard Balladur, Charles Pasqua, entre autres. Parce que Gaudin est un monument à Marseille, mais aussi en France.