Commission européenne : La candidate française Sylvie Goulard passe une audition décisive au Parlement européen
QUITTE OU DOUBLE•Conflits d’intérêts et emplois fictifs seront sans doute au programme de l’audition de Sylvie Goulard20 Minutes avec AFP
Désignée par Emmanuel Macron pour intégrer la Commission européenne, la Française Sylvie Goulard joue mercredi sa place devant les eurodéputés et eurodéputées, qui devraient la bousculer sur les enquêtes dont elle fait l’objet et son rôle de conseillère pour un think tank américain. Le feu vert des parlementaires est indispensable pour qu’elle soit définitivement nommée au portefeuille du « Marché intérieur », aussi vaste que stratégique, au sein du futur exécutif européen.
Le contexte autour de la nouvelle Commission, censée entrer en fonction le 1er novembre, pourrait compliquer cet examen de passage : deux commissaires ont été retoqués lundi par les élus et élues européennes, pour des conflits d’intérêts présumés. Le rejet de ces candidats – la sociale-démocrate roumaine Rovana Plumb et le Hongrois Laszlo Trocsanyi (PPE, droite) – pourrait tenter les parlementaires de ces deux partis de faire tomber, en représailles, un ou une commissaire des Libéraux de Renew, le troisième grand groupe politique de l’UE. Sylvie Goulard semble la plus fragile.
« Sylvie »
Députée européenne de 2009 à 2017, Sylvie Goulard a plutôt laissé de bons souvenirs dans l’hémicycle, où ses anciens pairs, de tous bords, louent encore son « professionnalisme » et son « expérience ». « Sylvie », comme ils et elles l’appellent spontanément, reste l’une des leurs, ce qui pourrait jouer en sa faveur au cours des trois heures de ce grand oral qui aura lieu l’après-midi.
Mais le prestigieux CV de celle qui a aussi conseillé l’ex-président de la Commission européenne, Romano Prodi, reste entaché par l’affaire des emplois présumés fictifs des eurodéputés MoDem, qui l’avait contrainte à démissionner du gouvernement français en juin 2017 après seulement un mois. Sylvie Goulard reste sous le coup de deux enquêtes : l’une de la justice française, l’autre de l’Office européen de lutte anti-fraude (Olaf).
Employée d’un think-tank à 10.000 euros par mois
Elle a déjà accepté de rembourser au Parlement européen 45.000 euros correspondant à huit mois de salaire d’un de ses assistants, pour lequel elle n’a pas pu fournir « de preuve de travail ». « Un aveu », selon ses détracteurs et détractrices. Les élus et élues européennes ne devraient pas manquer non plus de l’interroger sur son travail de « consultante », à « plus de 10.000 euros » mensuels, pour un think tank américain, l’institut Berggruen, d’octobre 2013 à janvier 2016, alors même qu’elle était eurodéputée.
Selon cet organisme, fondé par le milliardaire germano-américain Nicolas Berggruen, elle a préparé « des documents d’information », passé des « coups de fil » et aidé à préparer diverses réunions publiques. Les parlementaires chargés d’analyser les déclarations d’intérêt des commissaires n’ont en tout cas rien trouvé à y redire, malgré l’opposition de certains et certaines, notamment à l’extrême droite.
L’intéressée, décrite par ceux qui la connaissent comme « une femme de caractère », parfois « arrogante », reste muette, laissant à son entourage qui affirme qu’elle n’a rien à se reprocher le soin de la défendre. Derrière elle, les libéraux et libérales françaises font bloc, de l’eurodéputé Stéphane Séjourné, qui n’a « aucun doute sur ses capacités », au ministre des Finances Bruno Le Maire, pour qui elle possède « l’expérience politique et les qualités techniques ».