Quels défis attendent le prochain président de la Commission européenne?
EUROPE•Gestion du Brexit, budget, défi environnemental... De nombreux chantiers attendent la nouvelle tête de l'exécutif européenThibaut Le Gal
L'essentiel
- Les dirigeants européens peinent à trouver un accord sur le nom du futur président de la Commission européenne.
- Le successeur de Jean-Claude Juncker devra prendre en compte la nouvelle donne politique au sein du Parlement européen.
- La Commission aura fort à faire : gestion du Brexit, budget, défi environnemental.
Malgré de longues négociations, les chefs d’Etat et de gouvernement ne sont pas tombés d'accord sur le nom du président de la Commission européenne pour les cinq prochaines années. Un sommet de crise a été convoqué le 30 juin pour trouver un successeur à Jean-Claude Juncker. Le temps presse car le nouvel élu et ses commissaires auront fort à faire : gestion du Brexit, budget, défi environnemental… 20 Minutes revient sur les chantiers qui attendent la nouvelle tête de l’exécutif européen.
Définir un programme commun pour le Parlement
Le nom du président de la Commission doit être validé par le Parlement européen à la majorité le 2 juillet prochain. « Le candidat officiel doit préparer un programme, qui ressemble de plus en plus à un projet de gouvernement. Juncker avait ainsi été contraint il y a cinq ans de présenter un plan de relance 315 milliards d'euros pour obtenir les voix du PSE (socialistes européens) », rappelle Olivier Costa, directeur de recherche au CNRS. «Cette année, il faudra d'ailleurs faire avec les Libéraux et les Verts ».
Les socialistes et les chrétiens-démocrates (PPE) ont en effet perdu leur capacité à réunir à eux seuls une majorité pour faire passer des textes législatifs. Le prochain président de l’institution devra donc composer avec les écologistes et/ou les libéraux (Alde).
Brexit : Des négociations difficiles, probablement avec Boris Johnson
Le Brexit, programmé pour le 31 octobre, sera l’un des dossiers les plus brûlants. « La Commission aura fort à faire si Boris Johnson devient Premier ministre du Royaume-Uni, d’autant que les eurodéputés britanniques vont utiliser leur présence au Parlement pour peser dans les négociations », poursuit Olivier Costa. Le favori des conservateurs menace de ne pas payer la facture du Brexit – un montant évalué entre 40 et 45 milliards d’euros – si l’UE n’accepte pas de meilleures conditions pour son pays.
« Ce sera un interlocteur coriace. La Commission va devoir se préparer à gérer une éventuelle sortie sans accord, qui aurait des conséquences dans les relations commerciales et sur les expatriés », ajoute Olivier Rozenberg, professeur associé à Sciences Po Paris, au Centre d’études européennes et de politique comparée.
Ecologie : Convaincre l’ensemble des pays de l’UE, notamment à l’Est
Avec l’entrée de 79 élus Verts au Parlement, la Commission sera attendue sur les questions environnementales. « Jusqu’ici, ces questions étaient gérées spécifiquement par le commissionnaire à l’environnement. L’enjeu est aujourd’hui d’introduire cette préoccupation dans toutes les politiques de l’Union européenne», assure Olivier Costa. « C’est une question compliquée, car la sensibilité à l’écologie est diverse en Europe. Il y a beaucoup d’attentes en Europe de l’ouest et au nord, mais pas à l’est ou dans la droite allemande. Le leadership du nouveau président pourrait donc jouer un rôle important », complète Olivier Rozenberg.
Un exemple de ces divisions : la tentative d’inscrire la date de 2050 comme celle d’une Union neutre en émissions de carbone a échoué, bloquée par une poignée d'Etats d'Europe de l’Est, qui demandent de l’aide pour faire leur transition énergétique.
Budget européen et accords commerciaux
Les dirigeants européens doivent trouver une position commune sur le budget avant la fin de l’année, afin de commencer les négociations avec le Parlement européen sur le futur cadre financier pluriannuel (2021-2027). Le futur président devra défendre le projet de la Commission, qui vise à concilier un budget plus ambitieux avec de nouvelles priorités (migrations, sécurité intérieure, défense) malgré le départ du Royaume-Uni. Deux secteurs emblématiques pourraient subir des coupes franches, selon la Commission : la politique agricole commune (PAC) et la politique de cohésion en faveur des régions les plus modestes.
« L’UE va également tenter d’élargir et approfondir ses relations commerciales, avec l’Amérique latine notamment. Ces accords commerciaux sont techniques mais c’est un sujet central sur la capacité de l’Europe à poursuivre sa politique de libre-échange au moment où Trump, notamment, joue sa carte personnelle », dit Olivier Rozenberg.
Surveiller les droits démocratiques en Pologne, Hongrie et Roumanie
« La Commission va continuer de surveiller les manquements démocratiques dans certains Etats européens, en Pologne, Hongrie et Roumanie, et pourrait décider d’enclencher d’éventuelles procédures », avance Olivier Rozenberg. Le mécanisme sur l'Etat de droit peut en théorie déboucher sur une suspension des droits de vote d’un pays au sein de l’UE.