GUERREParly reconnaît qu'un navire saoudien vient charger des armes françaises

Armes françaises au Yemen: Florence Parly reconnaît qu’un navire saoudien va effectuer un chargement

GUERRELe cargo saoudien, dont la présence fait polémique, mouille pour le moment au large du Havre
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

La France a reconnu mercredi qu’un navire saoudien, le Bahri Yanbu, allait effectuer un chargement d’armes mais assuré qu’elle ne disposait d'« aucune preuve » permettant d’affirmer que des armes françaises sont utilisées dans la guerre meurtrière menée au Yémen par l’Arabie. « Il y aura chargement d’armes en fonction et en application d’un contrat commercial », a déclaré sans plus de précisions la ministre française des Armées Florence Parly sur la chaîne BFMTV et la radio RMC.

Selon le site d’investigation Disclose, le navire saoudien doit prendre livraison de « huit canons de type Caesar » que l’Arabie saoudite pourrait utiliser dans la guerre qu’elle livre au Yémen aux rebelles houthis, minorité chiite soutenue par l’Iran, grand rival de Riyad. Florence Parly n’a pas précisé la nature des armes qui seront chargées ni leur destination. Selon une source gouvernementale, « il ne peut pas s’agir de canons Caesar puisqu’il n’y a aucune livraison de Caesar en cours ». Le Caesar est un camion équipé d’un système d’artillerie.

Les révélations de Disclose fragilisent la position du gouvernement

La ministre des Armées l’a répété : « A la connaissance du gouvernement français, nous n’avons pas d’éléments de preuve selon lesquels des victimes au Yémen sont le résultat de l’utilisation d’armes françaises. » Paris a invariablement affirmé que ces armements ne sont utilisés que de manière défensive et pas sur la ligne de front.

Or, selon une note de la Direction du renseignement militaire (DRM), révélée par Disclose mi-avril, 48 canons Caesar produits par l’industriel français Nexter « appuient les troupes loyalistes, épaulées par les forces armées saoudiennes, dans leur progression en territoire yéménite ». Une carte de la DRM estime que « 436.370 personnes » sont « potentiellement concernées par de possibles frappes d’artillerie », dont celles des canons français.

Les ONG réclament un meilleur contrôle parlementaire

Les déclarations de Florence Parly ont suscité un tollé parmi les ONG. Cela « montre de nouveau l’obstination de la France à poursuivre ses transferts d’armes à ce pays malgré le risque indéniable et parfaitement connu des autorités françaises qu’elles soient utilisées contre des civils », a commenté Bénédicte Jeannerod, directrice France de Human Rights Watch. Parmi les dizaines de milliers de personnes tuées au Yémen, on compte de nombreux civils.

Neuf ONG, dont l’Observatoire des armements, réclament « l’établissement d’une commission parlementaire permanente de contrôle des ventes d’armes, comme en Suède, au Royaume-Uni et aux Pays-Bas », a indiqué de son côté Tony Fortin, de l’Observatoire des armements.

Un référé

Estimant que la livraison de ces armes violait ce traité, l’Acat (Action des chrétiens pour l’abolition de la torture) a annoncé mercredi soir dans un communiqué le dépôt d’un référé (recours en urgence) devant le tribunal administratif de Montreuil « exigeant que soit levé le dédouanement (c’est-à-dire l’autorisation pour le cargo de prendre la mer, avec son chargement) ».

« La France trahit les traités internationaux pour du business », estime le député communiste Jean-Paul Lecoq, qui avait interpellé mardi le gouvernement à ce sujet, lors d’une séance houleuse à l’Assemblée nationale. La Ligue des droits de l’homme et le mouvement de la paix appellent à un rassemblement jeudi à 18h au Havre, non loin du quai où doit accoster le Bahri Yanbu, « afin de dénoncer ces ventes d’armes (…) qui ont bien servi à tuer quantité de civils au Yémen ».