POLITIQUEJuppé dénonce les «dérives» des Républicains vers l'extrême droite

Alain Juppé: «Parfois, je me demande si j'entends un membre des Républicains ou du Rassemblement National»

POLITIQUELe maire de Bordeaux est revenu sur son départ du parti Les Républicains, la crise des « gilets jaunes » et le référendum d’initiative citoyenne, ce mercredi depuis sa mairie…
Mickaël Bosredon

Mickaël Bosredon

L'essentiel

  • Visiblement inquiet, le maire de Bordeaux s’est demandé si la liberté dans le pays n’était pas menacée.
  • Il se dit favorable au référendum d’initiative citoyenne, mais implore que le débat soit très bien encadré.
  • Il ne sera pas candidat aux Européennes en mai, et se prononcera en juin concernant les municipales de 2020.

A l’occasion de la présentation de ses vœux à la presse ce mercredi à l’hôtel de ville de Bordeaux, Alain Juppé est revenu sur plusieurs points d’actualité nationale. Ce qu’il faut en retenir.

Sur la crise sociale que le pays traverse

S’il veut prendre en compte « la souffrance », le maire de Bordeaux dénonce aussi « les voleurs, les pilleurs, les casseurs, les vandales qui n’ont pas leur place dans la cité. » Pour Alain Juppé, « nous ne pourrons sortir de cette crise, grave et profonde, que par le dialogue. Mon équipe et moi-même avons bien l’intention d’y participer, de l’organiser, de le faciliter. Nous avons décidé d’installer dès cette semaine, dans les huit mairies de quartier de Bordeaux, des cahiers de doléances et d’espérance, pour y exprimer des revendications, des insatisfactions, des frustrations, j’espère qu’on y trouvera aussi des propositions. Et dans le cadre de la concertation officielle nous organiserons bien sûr les rencontres nécessaires. »

Alain Juppé, lors de ses voeux à la presse à la mairie de Bordeaux, le 9 décembre 2019.
Alain Juppé, lors de ses voeux à la presse à la mairie de Bordeaux, le 9 décembre 2019. - M.Bosredon/20Minutes

Le maire de Bordeaux se demande par ailleurs, « sans dramatiser », si la liberté dans le pays « n’est pas menacée, par toute une sorte de forces contraires : le poujadisme, le populisme. » Les libertés individuelles notamment, « sont menacées par l’étau dans lequel nous enserrent les réseaux sociaux, avec la diffusion de fadaises invraisemblables, de mensonges grossiers, de complotisme absurde. » Et là, la réponse est « simple : c’est l’éducation ». Notre « justice sociale est menacée aussi, elle est déstabilisée par une aggravation des inégalités, et il faut s’engager pour la réduction des écarts excessifs entre les revenus » même si à ce propos Alain Juppé précise que « lorsqu’on affiche des montants de salaire brut, on est à côté de la plaque : ce qui compte c’est ce que touche l’intéressé après impôt, car, en France, nous avons un système de redistribution extrêmement puissant. »

Sur le référendum d’initiative citoyenne (RIC)

« Déjà un certain nombre de « gilets jaunes » le dénoncent… C’est un défi difficile à relever, à organiser. Comment fera-t-on la synthèse de toutes ces expressions qui viendront de tous les côtés ? Il faut le faire, il n’y a pas d’autres solutions, mais cela doit s’organiser et s’encadrer, car le référendum, c’est aussi Mussolini et Hitler. Je ne veux pas faire de parallèle historique, mais parfois l’expression de la volonté populaire non encadrée, cela peut conduire à des désastres. Certains suggèrent ainsi que le référendum soit soumis au contrôle du Conseil constitutionnel, pour vérifier sa conformité aux principes fondamentaux de la République. »

Sur la politique du gouvernement

« J’ai pris du recul par rapport à la politique nationale, dans ces conditions, je n’ai pas à commenter les décisions gouvernementales. Cela dit, plusieurs des réformes engagées depuis 2017 vont dans la bonne direction. Il y a eu des maladresses, il faut naturellement les corriger, mais je pense qu’aujourd’hui il n’y a pas d’alternative : vous avez d’un côté une ultra-gauche qui veut faire la révolution et casser les institutions de la République, et d’un autre côté une ultra-droite avec laquelle vous connaissez mes réactions totalement allergiques. Donc je pense qu’il faut continuer sur la voie des réformes dont la France a besoin. »

Sur Les Républicains

Son départ du parti, « c’est du réchauffé » lance le maire de Bordeaux : « cela fait deux ans que j’ai dit que je prenais mes distances avec Les Républicains. » Pour Alain Juppé, « les choses sont acquises depuis bien longtemps. » Pourquoi ? « Parce que je me reconnais de moins en moins dans cette famille politique, à laquelle je suis pourtant très attaché, j’ai été un des tout premiers membres du RPR. C’est avec tristesse que je l’ai quitté, mais il y a une dérive vers des thèses qui sont celles très proches de l’extrême droite, et une ambiguïté sur l’Europe… On assiste à cette espèce de transfusion régulière, et sur les thèmes de fond, il y a des moments où je me demande qui j’entends à la radio ? Un membre de LR ou de RN ? » Concernant sa position sur les Européennes, Alain Juppé précise qu’il n’a pas « du tout l’intention d’être candidat aux européennes. »

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Sur les manifestations des « gilets jaunes » à Bordeaux

« Il faut bien voir que dans les manifestants qui sont à Bordeaux, il y a une toute petite minorité de Bordelais, et une grande majorité de personnes venues de l’extérieur, hors métropole mais aussi hors département. Ensuite, selon un sociologue, Bordeaux paierait aussi la rançon de sa réussite : on serait trop gros, trop attractif, ce qui suscite beaucoup de jalousies, beaucoup de frustrations. Ce que j’en pense, c’est que c’est une analyse qui n’est pas conforme à la réalité et de toute façon ne peut mener qu’à des affrontements stériles. Je continuerai dans le développement de Bordeaux, car c’est une chance et il ne faut pas la lâcher, et ensuite faire rayonner cette politique sur tous les territoires. »

Sur l’abandon de Chantal Jouanno

« Je pense beaucoup de bien de Chantal Jouanno, c’est une femme remarquable. Elle a tiré les conséquences de la polémique née de sa rémunération [alors qu’elle devait piloter le grand débat national], ce qui l’honore. Plus généralement, on est dans la démagogie pure et simple. La haute fonction publique a besoin de cadres supérieurs dont la rémunération est comparable à celle de cadres supérieurs du privé. Tirer à bout portant sur tous les salaires un peu élevé de la haute fonction publique, c’est du populisme et de la démagogie. »

Sur le débat concernant la suppression de la taxe d’habitation

« Sur le fond, tout le monde s’accorde à dire que c’est un impôt injuste. Ses bases sont datées, c’est la raison pour laquelle le gouvernement s’est engagé en faveur de sa suppression. S’il est injuste, il faut le supprimer pour tout le monde. Quant aux atermoiements du gouvernement sur ce sujet, j’ai été Premier ministre, je serai donc très indulgent… »

Sur sa candidature aux municipales de 2020

« Je reste exactement sur ma position : réponse au lendemain des élections européennes, en juin. »