«On risque l’insurrection», la mise en garde d’Alain Minc au président

«On risque l’insurrection» : La mise en garde d’Alain Minc à Emmanuel Macron

POLITIQUEL’économiste Alain Minc, soutien d’Emmanuel Macron à la dernière présidentielle, adresse un avertissement, ce lundi, au président. Il s’inquiète du manque d’équité sociale en France et demande au gouvernement une politique plus sociale…
Fabrice Pouliquen

F.P.

«On ne peut pas continuer comme cela, l’inégalité est trop forte. On risque l’insurrection… » La mise en garde peut paraître étonnante quand on sait qu’elle vient d’Alain Minc, économiste habituellement classé dans le camp du libéralisme.

Pourtant, ces propos sont bien les siens. Ce lundi, dans une interview accordée à Libération, il adresse un sévère avertissement à Emmanuel Macron, candidat qu’il avait soutenu en 2017 lors de la présidentielle. Alain Minc juge aujourd’hui la politique économique du fondateur d’En Marche, tout simplement trop à droite.

« Une telle inégalité est insoutenable »

Alain Minc estime d’un côté la « main de fer » nécessaire aux réformes. « Pour faire des réformes, il faut avoir un penchant autoritaire. Sinon, on se heurte à une résistance venue des profondeurs de l’État, le "deep State", comme dit Trump », détaille-t-il dans les colonnes du quotidien.

Malgré tout, l’économiste, un temps proche de Nicolas Sarkozy, s’inquiète du manque d’équité sociale dans la politique conduite par Emmanuel Macron. « Les inégalités engendrées par le système de marché accroissent le risque d’un spasme sociétal, d’une révolte dont la forme est imprévisible, estime-t-il. « En Europe les "1 %" [les plus riches] reçoivent 8 % du revenu [national], ce qui est plus raisonnable [qu’aux Etats-Unis] mais toujours excessif, poursuit-il plus loin. Je ne cesse de tirer la sonnette d’alarme auprès de tous les dirigeants. Une telle inégalité est insoutenable. »

Développer l’intéressement des salariés

Alain Minc ne va pas jusqu’à prôner une augmentation ciblée des impôts. « Si on cherche à y remédier [à cette inégalité] par les mécanismes classiques de la redistribution égalitaire, on a besoin de sommes énormes qui seront prélevées sur la classe moyenne, ce qui n’est guère plus satisfaisant », se justifie-t-il. Il privilégie alors plus la mise en place d’un intéressement des salariés à la réussite des entreprises. « Il faut instaurer le principe de l’équité : réserver de la redistribution à ceux qui en ont le plus besoin en révisant les méthodes de l’État-providence, défend-il. Quant aux salariés, ils doivent bénéficier d’un partage du capital, sous la forme d’une distribution d’actions qui leur garantit un patrimoine. »

Dans ces propos, le magazine Marianne voit alors « un début de fébrilité » gagnant certaines élites. Sur fond de baisse de la popularité d’Emmanuel Macron, tombée à 31 % d’approbation en juin, les économistes Philippe Aghion, Philippe Martin et Jean Pisani-Ferry, proches eux aussi d’Emmanuel Macron, avaient adressé une note au président le 4 juin dernier dénonçant « l’image d’un pouvoir indifférent à la question sociale », rappelle Marianne.