Emmanuel Macron aux Etats-Unis: Une simple opération de communication?
INTERNATIONAL•Le chef de l'Etat français a été invité par le président américain Donald Trump...T.L.G. avec AFP
L'essentiel
- Emmanuel Macron s'envole lundi matin pour une visite d'Etat de trois jours aux Etats-Unis, dans un contexte dominé par des enjeux majeurs, dont l'accord sur le nucléaire irainien et le conflit commercial UE-Etats-Unis.
- «L'amitié» entre les deux présidents permettra-t-elle d'avancer sur les dossiers d'actualité?
Préparez les appareils photos, il va y avoir de belles images. Emmanuel Macron s’envole ce lundi matin pour une visite d’Etat de trois jours aux Etats-Unis, à l’invitation de Donald Trump. Nucléaire iranien, conflit commercial UE-Etats-Unis, climat… Les sujets de désaccords ne manquent pas. Mais ils ne devraient pas être la priorité de ce déplacement.
« On souhaite avancer dans le bon sens, mais ce n’est pas à cette occasion qu’on espère obtenir des deals, engranger un accord, dit-on à l’Elysée. Le rôle d’une visite d’Etat est d’ailleurs de dépasser les contingences de l’actualité immédiate, d’élargir la focale pour regarder l’ensemble de l’histoire des relations entre les deux pays. C’est une visite très politique […] avec beaucoup de moments symboliques ». Comprendre, de communication.
«Donald Trump rend la pareille à Emmanuel Macron»
Le président américain a d’ailleurs prévu le tapis rouge pour son homologue français : un dîner à Mount Vernon, la demeure historique de George Washington lundi, un entretien à la Maison blanche, un déjeuner au département d’Etat, une cérémonie au cimetière d’Arlington mardi puis une adresse au Congrès mercredi, avant un échange avec des étudiants d’un campus.
«Donald Trump avait été extrêmement honoré de l’accueil fait le 14 juillet à Paris. Il rend ici la pareille en invitant Emmanuel Macron pour la première visite d’Etat de sa présidence, un signe très honorifique », note Marie-Cécile Naves, docteur en science politique de l’université Paris-Dauphine, « cofondatrice » de chronik.fr et auteure de plusieurs ouvrages sur le président américain.
« Donald Trump a trouvé son allié européen. George Bush (fils) avait son Tony Blair, Barack Obama une relation particulière avec Angela Merkel. Donald Trump a choisi Emmanuel Macron car beaucoup de points les rapprochent : l’inexpérience politique, la connaissance du monde de l’entreprise, les conditions exceptionnelles de leur arrivée au pouvoir...», énumère Jean-Eric Branaa, spécialiste des États-Unis.
« Après avoir échoué à convaincre Trump sur le climat avec son "make our planet great again", le président français a choisi une autre voie. Lors de la conférence de presse du 14-Juillet, il a opéré un virage à 180° en déclarant respecter le retrait américain de l’accord de Paris, qui était une promesse électorale », poursuit le maître de conférences à l’Université Assas-Paris II.
« C’est parti pour la saison 2 de la série Macron-Trump »
Depuis, la relation est au beau fixe. La poignée de main « musclée » paraît loin. L’Elysée communique d'ailleurs régulièrement sur les nombreux appels téléphoniques entre les deux « amis » (sept depuis le début de l’année). « On a vu [ lors des frappes sur la Syrie] combien il était important d’avoir une relation de confiance entre les deux présidents. Le fait qu’il y ait cette intensité entre les deux hommes facilite les choses », explique la présidence.
« C’est parti pour la saison 2 de la série Macron-Trump », analyse ironiquement le magazine américain Politico.
« « Cette rencontre est l’occasion pour les deux dirigeants de rappeler au monde leur étroite relation personnelle, définie par des serrages de main interminables, des coups de téléphone réguliers et l’utilisation sans restriction de l’expression "mon ami" », selon Politico. »
Chacun a son objectif: « Trump va pouvoir montrer à son électorat qu’il n’est pas isolé sur la scène internationale, en n’hésitant pas à forcer le trait, comme il l’avait fait lors de sa visite à Paris», avance Marie-Cécile Naves. « Emmanuel Macron sera accompagné de nombreux chefs d’entreprise. La France se dit peut-être qu’elle peut récupérer une part du gâteau des 1.500 milliards de dollars d’ infrastructures promises à la fin du mandat de Trump, ajoute Jean-Eric Branaa. Pour le reste, Macron n’a encore rien obtenu, mais il avance par petites touches en maintenant le dialogue. Comme disait Donald Trump dans son ouvrage L’Art de la négociation, l’important est de continuer à faire un pas en avant ».
L'opération séduction d'Emmanuel Macron commencera dès dimanche par un entretien à la chaîne «conservatrice» Fox News. On saura très vite si la méthode fonctionne: en mai, Donald Trump doit décider si son pays se désengage de l'accord sur le nucléaire iranien et s'il applique de nouvelles taxes douanières à l'UE.