Comment une députée a pu garder «gratis» son logement de fonction de 130 m2

Nord: Comment une députée En Marche a pu garder «gratuitement» son logement de fonction

«RECHERCHE APPARTEMENT OU MAISON»Le syndicat Sud accuse une députée du Nord d’avoir occupé gratuitement un logement du département pendant sept mois…
Gilles Durand

Gilles Durand

L'essentiel

  • Ancienne gestionnaire d’un collège dans le Nord, Jennifer De Temmerman a continué à occuper un logement de fonction après son élection comme députée en juin 2017.
  • Une convention d’occupation précaire n’a été signée qu’en mars 2018.
  • Elle accuse une fonctionnaire de ne pas lui avoir fourni les documents en temps et en heure.

Ce n’est pas moi, c’est l’autre. La semaine dernière, une députée du Nord, élue en juin 2017 sous l’étiquette La République en marche (LREM), était épinglée par le syndicat Sud. Son tort : occuper un logement de fonction auquel elle n’a logiquement plus droit depuis son élection. Interrogée par 20 Minutes, la députée Jennifer De Temmerman accuse les errances d’une fonctionnaire des services du département du Nord.

Tout commence en juin 2017 lorsque la candidate d’Emmanuel Macron remporte les élections législatives dans la 15e circonscription du Nord. Gestionnaire d’un collège à Cassel, près d’Hazebrouck, elle demande alors au rectorat une mise en disponibilité pendant les cinq ans de son mandat.

Une maison de fonction de 130 m2

Or cette mise en disponibilité ne l’autorisait plus à occuper le logement de fonction du collège, une maison de 130 m2. Interrogée sur le sujet, en février, par La Voix du Nord, la députée expliquait bénéficier « d’une convention d’occupation précaire avec le département jusqu’au 30 juin ».

Ce genre de convention permet de rester provisoirement dans le logement moyennant un loyer. Sauf que de convention d’occupation précaire, il n’y avait pas, en février. En effet, questionnée par 20 Minutes, la députée reconnaît que cette convention n’a été signée qu’en mars, après avoir contacté directement le cabinet du président (DVD) du département, Jean-René Lecerf.

« On était au courant que cette dame était dans l’illégalité depuis le début du mois de janvier, souligne le syndicat Sud. Elle n’avait signé aucune convention et ne versait aucun loyer. » Jennifer De Temmerman se défend : « Depuis le mois de juillet 2017, j’ai prévenu la correspondante territoriale du département qui gère ce service que je devais signer une convention. Mais soit on m’envoyait la mauvaise convention, soit on ne me répondait pas. »

De guerre lasse, la députée assure avoir versé un loyer, dès janvier, sans attendre la régularisation de sa situation. Comment ce tour de passe-passe administratif est-il possible ? Le département reste muet sur le sujet.

« Des faveurs insupportables »

Interpellé sur cette affaire en séance plénière au conseil départemental, le lundi 16 avril, Jean-René Lecerf confirme la version de la députée qui, selon lui, « a désespérément cherché à payer ses loyers, alors que l’administration lui disait, non ce n’est pas possible ».

La convention a donc finalement été signée par Jean-René Lecerf, lui-même (610 euros par mois), sans passer par la case consultation de l’assemblée départementale. « Ce n’est pas obligatoire », répond-il.

« Ces faveurs accordées à un personnel de l’Education nationale, devenue députée, sont insupportables quand on les met en perspective avec le traitement réservé au personnel technique dans les collèges », dénonce Sud.

Règlement de compte politique ?

Jennifer De Temmermann, de son côté, s’estime victime d’un règlement de compte politique. « Mon élection a fait des jaloux. Quelqu’un a fait jouer ses relations pour retarder les choses et me mettre dans une situation embarrassante », avoue-t-elle.

Et de se plaindre, concernant son remplacement temporaire au poste de gestionnaire du collège de Cassel : « Mon mari avait été choisi par le rectorat pour occuper ce poste. Devant la pression, le rectorat n’a pas pu lui renouveler ce contrat, début janvier, alors que cela arrangeait tout le monde ».

La députée doit quitter son logement le 30 juin.