VIDEO. PenelopeGate: Un an après le début de l'affaire, où en est l'enquête?
JUSTICE•Un an après les révélations du « Canard enchaîné » sur les soupçons d’emploi fictif de Penelope Fillon, l’enquête tourne au ralenti tandis qu’aucun des recours envisagés par le camp de l’ex-Premier ministre n’a été déposé…L.C. avec AFP
L'essentiel
- Le mercredi 25 janvier 2017, Le Canard enchaîné publiait ses premières révélations sur les soupçons d’emploi fictif de Penelope Fillon.
- Un an après, l’enquête se poursuit et quatre personnes ont été mises en examen.
- François Fillon n’a pas contre-attaqué, contrairement à ce qu’il avait promis en avril 2017.
«Les 600.000 euros gagnés par Penelope qui empoisonnent Fillon ». Le 25 janvier 2017, ce titre en Une du Canard enchaîné a l’effet d’une bombe sur une campagne présidentielle qui n’a pas fini d’être secouée par les déflagrations de ce qui deviendra le « PenelopeGate ». Un an après les premières révélations sur les soupçons d’emploi fictif de Penelope Fillon, où en est l’enquête ?
Petit rappel des faits
Pour rappel, il y a un an l’hebdomadaire satirique révélait que Penelope Fillon, épouse du candidat Les Républicains et grand favori de l’élection, avait été employée pendant de nombreuses années comme assistante parlementaire de son mari ou du suppléant de ce dernier, Marc Joulaud. De 1986 à 2013, la Galloise a perçu 680.380 euros net, des salaires qui ne seraient pas justifiés par le travail accompli.
Le Canard enchaîné faisait aussi état de soupçons d’abus de biens sociaux : Penelope Fillon a été embauchée de mai 2012 à décembre 2013, pour un salaire de 3.500 euros net par mois, à La Revue des deux mondes, propriété de l’homme d’affaires Marc Ladreit de Lacharrière, proche de l’ex-Premier ministre. Or, elle n’a produit que deux notes de lecture pour le magazine.
Dans la foulée, les révélations s’accumulent sur de possibles emplois fictifs des enfants du couple Fillon, puis sur des soupçons de trafic d’influence car l’ex-Premier ministre s’est fait offrir deux costumes d’une valeur de 13.000 euros par Robert Bourgi, figure des réseaux de la « Françafrique ».
Le parquet national financier (PNF) a ouvert une enquête, confiée en mars 2017 à trois juges d’instruction. Les premières investigations aboutissent à la mise en examen de François et Penelope Fillon, de Marc Joulaud et de Marc Ladreit de Lacharrière.
« Une dizaine de personnes ont été entendues »
Depuis cet été, « une dizaine de personnes ont été entendues sans que cela donne lieu à de nouvelles poursuites », d’après une source proche du dossier qui espère que les investigations seront bouclées « courant 2018 ». « Les enquêteurs ont tout effectué en quelques semaines, aujourd’hui il ne se passe plus rien », assure de son côté à l’AFP Antonin Levy, avocat de l’ex-candidat de droite.
Les dernières investigations se sont concentrées sur la société 2F Conseil créée en 2012 par François Fillon (et dissoute par lui fin décembre 2017), les enquêteurs s’interrogeant sur d’éventuels conflits d’intérêts. Des perquisitions se sont déroulées chez plusieurs de ses clients, notamment l’assureur Axa, dont l’ex-PDG Henri de Castries est un ami de François Fillon.
« Sur les costumes, d’éventuels faux ou 2F Conseil, mon client n’est pas poursuivi, les enquêteurs n’ayant rien trouvé à redire », assure Antonin Levy. Quant à l’emploi de ses enfants Charles et Marie Fillon, l’ex-Premier ministre « est mis en examen mais pas ses enfants, ce qui est une absurdité », ajoute l’avocat.
Quid de la contre-attaque de Fillon ?
Dénonçant une enquête tellement entachée d’irrégularités qu’elle en devient « nulle », le camp Fillon avait promis une contre-attaque, annonçant envisager une série de recours. Il remettait en question la compétence du PNF et faisait valoir que le délit de détournement de fonds publics, pour lequel l’ex-candidat est mis en examen, n’était pas applicable à un député. Mais à ce jour, « aucun recours n’a été déposé. Son avocat préfère sans doute réserver ses arguments lors d’un éventuel procès », souligne une source proche du dossier.
Sa défense attend aussi que la Cour de cassation prenne position : saisie par cinq sénateurs de l’ex-UMP après que la cour d’appel de Paris a jugé qu’un parlementaire pouvait bien être poursuivi pour détournements de fonds publics, la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire est appelée à trancher cette question délicate.
Et de ses révélations sur le « cabinet noir » ?
François Fillon lui-même avait à plusieurs reprises dit qu’il poursuivrait ceux qui étaient à l’origine des révélations sur son épouse et ses enfants. Sur le plateau de L’Emission Politique (France 2), le 23 mars, il avait évoqué «un cabinet noir» au sein de l'Elysée.
« Ça fait deux mois et demi qu’on m’empêche de faire campagne. Et j’ai toutes les indications qui me permettront, le moment venu, de poursuivre ceux qui ont fait ça », déclarait-il le 7 avril 2017 sur France Inter, précisant avoir « les dates, les jours, les personnes qui ont communiqué les documents » et accusant l’ancien président François Hollande (à partir de 1'29" dans la vidéo ci-dessous). A ce jour, il n’en a rien fait.
L’origine des révélations sur le couple Fillon continue d’interroger Florence Portelli, l’ex-porte-parole du candidat : « sans préjuger de sa culpabilité ou de son innocence, il est évident que cette histoire a été instrumentalisée à des fins politiques. L’emploi de sa femme au Parlement était connu. Qui a tout orchestré, tout feuilletonné à ce moment-là ? ».
En avril 2017, François Fillon a déposé plainte contre Le Canard enchaîné pour propagation de « fausses nouvelles » ayant eu pour effet de « détourner » des suffrages pour un article sur les emplois de son épouse daté du 12 avril. Cette plainte a été classée sans suite fin novembre dernier selon une source judiciaire.
A 63 ans, le candidat éliminé dès le premier tour de la présidentielle en 2017 a mis fin à ses activités politiques officielles et a rejoint en septembre dernier la société de gestion d’actifs et d’investissement Tikehau Capital, en tant qu’associé.