Grand Est: Qui est Jean Rottner, président de la région après la démission de Philippe Richert?
POLITIQUE•Le Mulhousien Jean Rottner a, comme prévu, été élu président du conseil régional du Grand Est vendredi. Il succèdera à un autre Alsacien, Philippe Richert, démissionnaire...Alexia Ighirri
L'essentiel
- Vendredi à Metz, en séance plénière du conseil régional du Grand Est, s'est déroulé l'élection du président de la région, suite à la démission de Philippe Richert.
- Virginie Joron (Front national), Florian Philippot (Les Patriotes) et Jean Rottner (Les Républicains) étaient candidats.
- Candidat de la majorité régionale (LR-UDI-Modem), Jean Rottner a comme prévu élu président du Grand Est.
Les habitants du Grand Est ont un nouveau président. Vendredi, le successeur de l’Alsacien Philippe Richert (Les Républicains), démissionnaire fin septembre, a été élu par les conseillers régionaux lors de la séance plénière à Metz.
Le cataclysme n'a pas eu lieu: le Mulhousien Jean Rottner (LR), candidat de la majorité régionale (LR-UDI-Modem), a bien été élu devant Virginie Joron (Front national), Florian Philippot (Les Patriotes). Le groupe socialiste ayant décidé de ne pas présenter de candidat, ne voyant « pas l’utilité politique au-delà de la posture ».
Permettez-nous alors de citer The Who : Who are you ? Who, who, who, who ? Mais oui, qui es-tu Jean Rottner ? On a mis nos meilleurs experts sur le coup (seuls les fans de la série comprendront la référence) pour parler de celui qui a été jusqu’à présent vice-président de la région en charge de la compétitivité des territoires et du numérique.
Portrait de l’élu, médecin urgentiste de profession, avec la sénatrice Fabienne Keller (LR), la conseillère régionale socialiste Pernelle Richardot et le professeur des universités et directeur éditorial de l’Observatoire de la vie politique en Alsace, Philippe Breton.
Mulhouse. Maire de la commune haut-rhinoise depuis 2010, nos interlocuteurs s’accordent à dire que Jean Rottner y fait du bon travail. « C’est un élu de terrain. Il l’a montré à Mulhouse, débute Fabienne Keller. Il aime sa ville, il l’a redynamisée, notamment son centre-ville. Il a aussi ses pépinières de start-up. »
Dans le rang politique adverse, Pernelle Richardot le lui reconnaît aussi : « Je me dis que les socialistes vont devoir cravacher pour regagner la ville. Parce que Jean Rottner a une vision de la ville et une ambition pour elle. Même si nous sommes adversaires politiques, j’ai un profond respect pour ce genre d’élus ».
Une fois élu président de la région, Jean Rottner mettra fin à son mandat de maire. Michèle Lutz doit prendre sa succession.
Droite. Fidèle sarkozyste, aujourd’hui un « audacieux » du nom du mouvement lancé sous la houlette de Christian Estrosi, Jean Rottner est « fidèle à ses convictions de droite. C’est un grand républicain de valeurs. On partage un socle de valeurs communes, sur le principe de laïcité par exemple », salue son adversaire socialiste.
Signataire d’un appel au retrait de François Fillon durant la présidentielle, l’Alsacien est, à l’instar de Fabienne Keller, plutôt proche du courant « constructif » de la droite : « Il est pragmatique, très humaniste et modéré. Je crois qu’il souhaite que la France avance, réussisse. Que les personnes résidantes dans les quartiers fragiles de sa ville, de sa région aient des perspectives en termes d’emploi et de vie personnelle », pense la sénatrice LR. Le politologue Philippe Breton confirme : « Il est dans la mouvance de la droite qui ne cherche pas la rupture avec le gouvernement. Il se dit légitimiste, ce ne sera pas un grand opposant à Emmanuel Macron ».
Région. Avant de prendre la présidence du Grand Est, le Mulhousien en a été l’un des vice-présidents. Quel type d’élu régional est-il ? « C’est peut-être dû à son ancien métier de médecin urgentiste, mais il a une capacité de dialogue. Pas de compromission, un peu de compris, il est à l’écoute. On peut partir d’une réunion commune, sans que personne n’ait changé d’avis et sans que la chose n’ait bougé d’un iota, mais on se sera parlé sereinement », raconte Pernelle Richardot. Elle s’interroge toutefois : « Est-ce qu’il sera prisonnier d’un clan LR ou est-ce qu’il arrivera, comme à Mulhouse, à mettre en place une gouvernance un peu différente pour se préoccuper des urgences territoriales ? Ce sera notre point de vigilance. Parce que comme pour Philippe Richert, Jean Rottner a l’impérieuse nécessité de résultat et de faire différemment. Parce qu’il est Alsacien, parce que les populismes sont là. Je le crois capable d’entendre cette urgence-là. Mais est-ce qu’il arrivera à la mettre en musique ? »
Pour Philippe Breton, Jean Rottner est « apprécié » et « un atout pour la grande région. Il a l’image d’une personnalité assez lisse, il ne l’extériorise pas, on n’a pas de prise ». Et de se projeter : « Ce que l’on ressent de l’ensemble de ses déclarations, c’est qu’il va se mettre très exactement dans les pas de Philippe Richert. Cela peut changer à l’avenir, mais il l’a dit lui-même : “Richert a coulé les dalles de la grande région, à moi de monter les murs”. On ne peut pas être plus dans la continuité. »
Alsace. Sur la question de la place de l’Alsace dans la réforme territoriale, ce qui a été reproché à Philippe Richert hier l’est déjà à Jean Rottner aujourd’hui. Il faut dire qu’en 2014, le Mulhousien avait porté une pétition contre la fusion de l’Alsace avec la Lorraine et la Champagne-Ardenne. Et l’idée de le voir prendre la présidence de cette grande région en agace certains aujourd’hui.
« C’est un homme de coups politiques. Parfois ça fonctionne, parfois pas. On le voit avec cette pétition et le retour de boomerang aujourd’hui », analyse Pernelle Richardot, qui ne s’en « réjouit pas. Je lui avais dit que lorsqu’un élu prend la tête d’un groupe pétitionnaire, on est dans le déni de démocratie. Il était sorti de son rang. » « Jean Rottner n’a pas autant de prises de positions successives que Philippe Richert. Il est moins exposé, tempère Philippe Breton. A ce sujet, il ne fait d’ailleurs aucune concession. »