Réforme de l'ISF: Comment la majorité LREM a essayé d'arrondir les angles en trois actes
FISCALITE•Pour riposter aux critiques d'un «cadeau pour les riches», le gouvernement a finalement concédé quelques modifications à sa réforme de l'impôt sur la fortune...L.C.
L'essentiel
- Le gouvernement a présenté un budget 2018 supprimant l'impôt sur la fortune, une promsse de campagne d'Emmanuel Macron.
- D'abord inflexible face aux critiques dans sa majorité, l'exécutif a finalement concédé quelques ajustements.
Le premier budget du quinquennat Macron amorce ce mardi son parcours législatif à la commission des Finances de l’Assemblée. Le projet de loi devrait être amendé par les députés de La République en marche (LREM). Objectif : raboter quelques points pour éviter les accusations d’un budget de « cadeaux aux riches » selon la gauche. La réforme de l’impôt sur la fortune (ISF) reflète ces ajustements.
Acte 1 : La gauche fustige un « cadeau pour les riches »
Le 27 septembre dernier, lorsque le gouvernement dégaine son premier budget, il annonce la création de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) pour remplacer l’ISF. Il s’agit de taxer uniquement le patrimoine immobilier et plus le capital financier. Un manque à gagner pour l’Etat chiffré par Bercy à un peu plus de 4 milliards d’euros, mais assumé : il s’agit d'« encourager l’investissement productif plutôt que la rente », indique l’exécutif.
La décision fait très vite monter la gauche au créneau. Boris Vallaud, porte-parole du groupe Nouvelle gauche, a annoncé que les socialistes déposeront plusieurs dizaines d’amendements, dont un visant à maintenir l’ISF.
Les communistes et les Insoumis sont également vent debout contre cette suppression. Quant à François Bayrou, il qualifie le budget macroniste de « déséquilibré ».
Acte 2 : Des critiques au sein de la majorité présidentielle
Plus étonnant, des critiques émanant des députés de la majorité présidentielle se font peu à peu entendre. Le rapporteur LREM du budget Joël Giraud s’exprime dans les médias pour proposer de taxer certains produits de luxes, comme les yachts, les jets privés, les bijoux ou les œuvres d’art. Alors qu’Emmanuel Macron avait demandé à ses troupes de mettre l’accent sur le social, le gouvernement décide finalement de montrer des signes d’ouverture, non sans une certaine cacophonie.
Le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin affirme le 1er octobre qu’il est « favorable » à une taxation des « produits ostentatoires », Quelques heures plus tôt, Bruno Le Maire s’était pourtant opposé à toute modification de l’IFI.
Acte 3 : Un amendement sur les produits de luxe
Signe que le gouvernement a finalement décidé de déjouer les critiques de la gauche, une réunion du groupe LREM à l’Assemblée a été organisée le 4 octobre sous la houlette de Richard Ferrand. « C’est vrai qu’on joue gros, une partie de la gauche qui a voté Macron ne s’y retrouve pas », confiait alors un marcheur au Parisien.
En lien étroit avec Bercy et Matignon, les députés LREM de la commission des Finances vont donc déposer des amendements pour taxer, à raison de 30.000 à 200.000 euros par an, les résidents français propriétaires de bateaux dépassant 30 mètres. La taxe sur la cession des métaux précieux va être alourdie, une taxe sur les voitures de grand luxe créée. Les parlementaires souhaitent aussi créer une mission de suivi de la réforme de l’ISF.
Ces ajustements ne convainquent par le député du MoDem (allié de LREM) Jean-Louis Bourlanges, qui juge auprès de l’AFP que ces mesures « n’auront pas beaucoup de rendement » et « brouillent un peu l’image ».
Après son passage en commission des Finances, le budget 2018 sera examiné par les députés dès le 17 octobre prochain.