MATIGNONMais pourquoi Edouard Philippe est-il si peu connu du grand public?

Gouvernement: Mais pourquoi Edouard Philippe est-il si peu connu du grand public?

MATIGNONLe Premier ministre Edouard Philippe souffre d'un déficit de notoriété, contrairement à l'omniprésent président de la République...
Laure Cometti

Laure Cometti

Un coup de projecteur sur un homme politique méconnu du grand public. Plus de 3 millions de téléspectateurs ont regardé L’Emission politique (France 2) qui recevait jeudi soir le Premier ministre Edouard Philippe. De quoi doper la faible notoriété du numéro 1 du gouvernement, que plus d’un tiers des Français serait incapable de nommer, selon un sondage*. Tandis que l’ancien juppéiste, nommé par Emmanuel Macron il y a plus de quatre mois, défendait en direct les premières mesures du quinquennat, de très nombreux internautes pianotaient sur leur clavier ou leur smartphone, se demandant « qui est Edouard Philippe ? », selon les données du moteur de recherche Google. 20 Minutes s’est penché sur les raisons de ce déficit de notoriété qui est aussi l’une des clés du couple exécutif.

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Une carrière politique discrète

Edouard Philippe s’est lancé en politique à la trentaine, sous la houlette du maire du Havre, Antoine Rufenacht. Il lui succède à la tête de la ville de Seine-Maritime en 2010. Entre-temps, il s’est rapproché d’Alain Juppé qui lui propose de participer à la fondation de l’Union pour un mouvement populaire (UMP), au poste de directeur général des services, de 2002 à 2004. C’est toujours auprès du maire de Bordeaux qu’Edouard Philippe participera à la primaire de la droite, en 2016, comme porte-parole. Des fonctions politiques locales ou en coulisses qui n’ont pas contribué à bâtir la notoriété de l’actuel chef du gouvernement.

« Dans un Ve République marquée de plus en plus par l’hyper-présidentialisation, assez peu de Premier ministres ont eu une forte notoriété », observe l’historien Jean Garrigues. Edouard Philippe ne coche aucune des cases : il n’a pas été candidat à la présidentielle, ni chef d’un parti, ni ministre. De plus, il est perçu comme un expert, un technicien, un homme de dialogue qui n’a pas une personnalité percutante ».

Une majorité très présidentielle

Ex-Républicain, Edouard Philippe se retrouve à la tête d’une majorité parlementaire dont les élus ont été investis par le parti d’Emmanuel Macron. « Tout le pouvoir procède du président », résume Stéphane Rozès, directeur de CAP (Conseils, analyses et perspectives) et enseignant à Sciences Po et HEC. «Seul Emmanuel Macron a une légitimité et une incarnation forte du pouvoir. Dans ce contexte, le Premier ministre semble être plutôt une sorte d’exécutant qui décline la politique du président », poursuit le politologue.

« Le véritable chef de La République en marche, c’est Emmanuel Macron », abonde Jean Garrigues. « Edouard Philippe ne représente qu’une partie de la majorité présidentielle, sa famille politique est même minoritaire au sein de LREM ».

Un « techno » peu adepte des coups d’éclat

Certains Premiers ministres peu connus à leur arrivée à Matignon se sont par la suite fait connaître des Français par des « moments emblématiques » ou des « coups d’éclats », relève Jean Garrigues. Ainsi, « le méconnu Georges Pompidou ne s’est véritablement imposé comme personnalité de premier plan pour les Français qu’en mai 68, six ans après sa nomination ».

Mais Edouard Philippe n’a pas encore connu de « baptêmes du feu ». « Contrairement à Manuel Valls, Jacques Chirac ou Dominique de Villepin, il a un tempérament plutôt discret, pas adepte des coups d’éclats », analyse Jean Garrigues. C’est difficile d’exister dans un système hyper-présidentialisé, d’autant plus que le chef de l’Etat a pris encore plus de place ».

Un couple présidentiel déséquilibré ?

Pour ses détracteurs, Edouard Philippe est un Premier ministre fantoche, simple exécutant des désirs présidentiels. L’intéressé se dit « complémentaire » d’Emmanuel Macron. Ce binôme exécutif peut-il tenir sur le long terme ? « D’un point de vue politique, le président aurait intérêt à laisser un peu plus de place à Edouard Philippe, car le Premier ministre est traditionnellement perçu comme responsable de la politique menée et peut jouer le rôle de fusible en cas d’impopularité », prévient Jean Garrigues. « Hyperprésident, Nicolas Sarkozy a dû endosser l’entière responsabilité du désamour des Français ».

Pour Stéphane Rozès, le danger est ailleurs. « Emmanuel Macron parle de sa vision d’une France réformable, qui se transforme profondément, tandis qu’Edouard Philippe est chargé de mettre en œuvre une politique qui s’inscrit dans le court terme, avec dans le viseur l’objectif des 3 % de déficit », analyse le politologue. Le couple exécutif s’articule selon lui entre « un président qui porte le souhaitable et un Premier ministre qui porte le possible ». Dans cette optique, la mise en avant du premier au détriment du second est plus flatteuse pour Emmanuel Macron.

* Sondage Odoxa-Dentsu consulting pour Le Figaro et France Info, publié le 28 septembre 2017.