VIDEO. Sénatoriales: Pourquoi vous devriez vous intéresser à cette élection (même si elle a l'air ennuyeuse)
ELECTION•La moitié du Sénat est en jeu lors des élections de dimanche, un scrutin qui ne vous passionne pas, et pourtant…Laure Cometti
L'essentiel
- Dimanche, les grands électeurs doivent choisir 171 sénateurs, la moitié de la deuxième chambre française.
- Ce scrutin n'intéresse guère les citoyens mais «20 Minutes» a trouvé quelques bonnes raisons de le suivre avec intérêt.
Si vous avez ouvert cet article, c’est que vous faites partie de nos rares lecteurs qui suivent les élections sénatoriales. La moitié des sénateurs doit être renouvelée dimanche mais le sujet ne passionne pas les foules. Suffrage indirect, overdose d’élections en 2017, faible popularité des sénateurs… Les motifs de ce désintérêt ne manquent pas. Mais il y a pourtant quelques très bonnes raisons de s’intéresser à ce scrutin.
Le résultat de l’élection peut enterrer le projet de Macron de réforme constitutionnelle
Certes, « le Sénat est une chambre dont on peut se passer pour gouverner, puisqu’il existe un mécanisme qui permet à l’Assemblée nationale de statuer sur les textes », explique Michel Lascombe, professeur de droit constitutionnel à Sciences-Po Lille. Oui mais voilà, parmi les projets d’Emmanuel Macron figure une révision de la Constitution, nécessaire pour tenir certaines de ses promesses de campagne, comme l’interdiction du cumul des mandats dans le temps et la suppression de la Cour de justice de la République.
Pour faire adopter cette révision, le président a besoin du soutien de 555 parlementaires [l’équivalent des 3/5es du Parlement]. Avec 309 députés La République en marche (LREM), 43 MoDem et des , il lui faudrait s’assurer du soutien d’environ 170 sénateurs. Or le groupe LREM du Palais du Luxembourg ne compte actuellement que .
C’est un test pour Macron et son parti
Le scrutin de dimanche ne devrait pas avoir la même saveur pour les macronistes que les législatives de juin dernier. Les sénatoriales « s’annoncent difficiles pour Emmanuel Macron », observe l’historien Jean Garrigues. « La plupart de ses mesures lui sont défavorables dans l’optique de cette élection ». Les élus locaux qui composent l’essentiel des grands électeurs appelés à voter aux sénatoriales sont très remontés contre l’exécutif après l’annonce du gel de dotations, de la baisse des emplois aidés et de la suppression de la taxe d’habitation.
LREM a revu ses objectifs à la baisse pour les sénatoriales et projette désormais de rallier des sénateurs d’autres familles politiques pour obtenir une majorité de coalition. Le chef de l’Etat pourrait aussi se passer du Parlement et soumettre la révision constitutionnelle à un référendum. Reste qu’un échec dimanche « serait comme une confirmation du coup d’arrêt d’Emmanuel Macron, dont la popularité est en baisse dans les sondages », estime Jean Garrigues. « Et le Sénat deviendrait une tribune supplémentaire pour l’opposition ».
Et les autres partis sont aussi sur des charbons ardents
Pour Les Républicains, les sénatoriales ont des airs de revanche après leur recul à l’Assemblée, d’autant que le Sénat penche historiquement à droite selon les deux politologues. LR dispose actuellement de 142 sièges et « le renforcement de leur majorité serait un signe de leur capacité de survie », observe Jean Garrigues. Le Républicain Gérard Larcher, actuel président du Sénat, se veut d’ailleurs confiant, estimant ce vendredi dans Le Parisien que la majorité de droite devrait être « confortée », voire « progresser légèrement ». Mais le parti est fragmenté : un groupe de sénateurs dissidents a été créé selon des informations du .
Pour les socialistes, les précédentes sénatoriales (en 2014) ont laissé de mauvais souvenir puisqu’ils ont perdu leur majorité. Ils remettent plus de la moitié de leur siège en jeu et espèrent limiter la casse après la claque des législatives.
Le Sénat joue un rôle important dans la création des lois (si, si !)
Même si les sénatoriales sont le cadet de vos soucis, sachez que la chambre a « deux avantages considérables » pour Michel Lascombe. « C’est un améliorateur de textes : les lois sortent du Sénat un peu mieux ficelées que de l’Assemblée ». D’ailleurs l’institution se targue de voir repris par les députés. « C’est aussi une chambre qui essaie toujours de trouver une solution médiane, un compromis », poursuit le professeur de droit.
Le Sénat n’est pas (si) ringard
Le mot « sénateur » évoque souvent l’image d’un homme grisonnant, et cela repose sur une réalité : le Sénat a une moyenne d’âge de 61 ans et compte à peine 28 % de femmes. « Mais ce n’est pas une assemblée inerte, elle a évolué, rajeuni, s’est féminisée », affirme Jean Garrigues. « Sur les grands débats éthiques, les questions sociétales, le Sénat est souvent pionnier ».