SOCIETEValls répond à Sarkozy et s'oppose à un «Guantanamo à la française»

Sécurité: Valls reconnaît un «échec» concernant la libération d'Adel Kermiche

SOCIETEIl y a « une ligne infranchissable : l’Etat de droit », a martelé le chef du gouvernement...
C. A.

C. A.

Après le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve mercredi et le garde des Sceaux Jean-Jacques Urvoas jeudi, le Premier ministre Manuel Valls a répondu ce vendredi dans Le Monde aux attaques de l’opposition après les attentats de Nice et de Saint-Etienne-du-Rouvray, martelant qu’il y a « une ligne infranchissable : l’Etat de droit ».

L’assignation à résidence sous bracelet électronique de Kermiche, un « échec »

Revenant sur l’attentat qui a coûté la vie au prêtre Jacques Hamel, le Premier ministre a estimé que la décision de la justice antiterroriste de libérer Adel Kermiche, un des deux auteurs de l’attentat djihadiste de Saint-Etienne-du-Rouvray, en l’assignant à résidence sous bracelet électronique, est un « échec, il faut le reconnaître ».

« Cela doit conduire les magistrats à avoir une approche différente, dossier par dossier, compte tenu des pratiques de dissimulation très poussées des jihadistes », déclare le Premier ministre, tout en affirmant qu’il ne sera pas « celui qui, au mépris de tout équilibre des pouvoirs, tomberait dans la facilité de rendre ces juges responsables de cet acte de terrorisme ».

La réponse de Valls à Sarkozy qui « perd ses nerfs »

« Mon gouvernement ne sera pas celui qui créera des Guantanamo à la française », a toutefois réaffirmé le Premier ministre dans les colonnes du Monde.

« Cette guerre, qui ne concerne pas que la France, va être longue et nous allons connaître d’autres attentats. Mais nous allons la remporter. Car la France a une stratégie pour gagner cette guerre », affirme le Premier ministre. Et d’expliquer : « Nous devons, d’abord, écraser cet ennemi à l’extérieur ».

Mercredi, le président du parti Les Républicains (LR), Nicolas Sarkozy, a proposé dans un entretien au Monde plusieurs mesures visant à sortir du « cadre » juridique actuel. Il a également estimé que face à la « barbarie », « la gauche est tétanisée ». Le lendemain, son numéro deux chez Les Républicains, Laurent Wauquiez, réclamait dans Le Figaro la démission du Premier ministre et du ministre de l’Intérieur.

« Nicolas Sarkozy perd ses nerfs », selon le premier ministre. Pour lui, la stratégie de Nicolas Sarkozy de « discréditer la gauche en alimentait les peurs pour se constituer un capital politique » ne peut se « justifier » par « la primaire de la droite » ou « l’élection présidentielle ».

« Etre lucide face à la menace »

De son côté, Manuel Valls tempère et estime qu'« être lucide face à la menace, ce n’est pas basculer dans le populisme » et que « sur la sécurité, la gauche n’a pas de leçons à recevoir ». Face aux propositions des Républicains, il appelle les Français à « rejeter les solutions démagogiques qui font croire que nous pouvons en terminer [avec la menace terroriste] en quelques mois ».

En rappelant que « tout ce qui renforce notre efficacité mérite d’être retenu, mais il y a une ligne infranchissable : l’Etat de droit. A ce titre, l’enfermement d’individus dans des centres sur la base du seul soupçon est moralement et juridiquement inacceptable. »

« Cependant, nous avons changé d’époque. Nous devons changer nos comportements. C’est une véritable révolution dans notre culture de sécurité qu’il faut engager », ajoute le chef du gouvernement. Par ailleurs, Manuel Valls estime que « la lutte contre la radicalisation sera l’affaire d’une génération », et qu’elle doit mêler « prévention » et « programmes de déradicalisation ». « Nous devons enfin bâtir un puissant contre-discours qui ne doit pas être que le travail de l’Etat, mais de toute la société civile », ajoute-il.

Enfin, le Premier ministre estime qu’il « faut une remise à plat et inventer une nouvelle relation avec l’islam de France ». Manuel Valls envisage d’interdire le financement des mosquées par l’étranger « pour une période à déterminer ».