Justice et sécurité: Les propos de Sarkozy passés eu détecteur de mensonges
FACT CHECKING•L’ancien chef de l’Etat assure, ce mardi, « qu’il n’y a plus d’autorité de l’Etat » dans une interview au « Parisien »…Vincent Vanthighem
«La République doit cesser de reculer partout. » C’est sur le domaine de la sécurité que Nicolas Sarkozy s’est longuement exprimé, ce mardi, dans les colonnes du Parisien. Avec un constat : rien ne va plus depuis que François Hollande lui a succédé à l’Elysée. 20 Minutes a passé les propos de l’ancien chef de l’Etat au détecteur de mensonges.
- Air Cocaïne : Nicolas Sarkozy a-t-il été écouté ?
A PRIORI FAUX
La déclaration : « Je veux savoir si un autre client de la compagnie aérienne a été géolocalisé et écouté : y en a-t-il d’autres, ou est-ce un traitement qui m’a été réservé ? »
Les faits : Chargée de l’enquête en France sur Air Cocaïne, la juge marseillaise Christine Saunier-Ruellan a demandé la géolocalisation des deux téléphones portables de Nicolas Sarkozy entre mars et avril 2013 ainsi que ses « fadettes » (liste des appels entrants et sortants) entre mars 2013 et mars 2014, selon Le Journal du dimanche. Contrairement à l’affaire « Azibert », rien n’indique, en revanche, que l’ancien chef de l’Etat a, cette fois-ci, été placé sur écoute.
L’éclairage : « Qu’imagine-t-on ? Que j’étais à Punta Cana sur 700 kg de cocaïne ? », s’étrangle le président des Républicains. Pas vraiment. Si la juge enquête sur le trafic de drogue, elle s’intéresse également aux voyages effectués par Nicolas Sarkozy sur ce même avion pour se rendre à des conférences privées. L’enquête a en effet démontré que ces vols avaient été payés par Stéphane Courbit, le président de la société Lov Group et ami de l’ancien Président. Cela pourrait être constitutif d’un « abus de bien social ».
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Nicolas Sarkozy assure qu’il n’est pas lié au trafic d’Air Cocaïne. - Erika Santelices AFP
- Prison : Le nombre de détenus est-il en baisse depuis 2012 ?
NI VRAI NI FAUX
La déclaration : « Le nombre de détenus en France a diminué depuis trois ans. Les délits augmentent et le nombre de détenus diminue, qui peut l’accepter ? »
Les faits : Selon les chiffres de l’administration pénitentiaire, la France comptait, au 1er septembre 2015, 65.544 détenus écroués contre 66.126, trois ans plus tôt. Soit une baisse de 0,88 % du nombre de détenus français écroués pour un peu plus de 57.000 places disponibles. La solution du problème dépend de la date exacte où l'on place le curseur, Nicolas Sarkozy ayant comparé l'année 2012 à l'année 2015. Ainsi, si l'on prend les statistiques de janvier 2012 et les mêmes statistiques trois ans après, elles donnent une analyse différente: 64.787 détenus écroués en 2012 contre 66.270 en 2015, soit, cette fois-ci, une hausse de 2,3%...
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L’éclairage : Si l’ancien chef de l’Etat a donc en partie raison dans les faits, il faut prendre un peu plus de recul et préciser que le nombre de détenus en France est en augmentation depuis 2001, date à laquelle il a franchi le seuil des 50.000 détenus écroués. A noter également que le « record » du nombre de prisonniers a été obtenu sous le mandat de François Hollande en avril 2014 où le pays comptait 68.859 détenus derrière les barreaux. Le nombre de détenus est donc surtout en baisse depuis un peu plus d’un an.
Christiane Taubira, la Garde des sceaux, en visite à la prison de Lure - SEBASTIEN BOZON AFP
- Forces de l’ordre : Le nombre de policiers et gendarmes blessés explose
FAUX
La déclaration : « Chaque jour, il y a en moyenne une vingtaine de policiers et gendarmes blessés en service. Les atteintes aux forces de l’ordre sont en train d’exploser. »
Les faits : Fin août, le Figaro révélait que 7.603 policiers et gendarmes avaient été blessés lors d’intervention en 2014, soit une vingtaine par jour. En fait, sans doute plus si l’on s’en réfère aux statistiques de l’Office national de la délinquance et de la réponse pénale. Selon cet organisme indépendant, rien que pour la police, 13.111 personnes ont été victimes « d’atteintes physiques » en 2013. Ce qui porterait le nombre à 35 par jour. Mais ce nombre n’explose pas vraiment. En 2008, sous le mandat de Nicolas Sarkozy, ils étaient déjà 12.742, soit 34 chaque jour.
- Justice : 100.000 peines par an ne sont pas appliquées ?
VRAI MAIS…
La déclaration : « Le signal donné de la non-application des peines est désastreux pour la République et l’autorité de l’Etat. Je rappelle que 100.000 peines par an ne sont pas appliquées. »
Les faits : Nicolas Sarkozy a raison. Près de 100.000 peines ne sont pas appliquées chaque année. Il oublie juste de préciser que ce chiffre est stable depuis une dizaine d’années. Sous son mandat, ce problème avait été évoqué par Michel Mercier, alors Garde des sceaux, qui estimait « impossible » de réduire ce chiffre à moins de 30.000.
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L’éclairage : Depuis l’élection de François Hollande, la droite ne cesse de critiquer Christiane Taubira, la ministre de la Justice, pour son « laxisme » supposé. Aujourd’hui, une personne condamnée à une peine d’un an ou moins de prison peut bénéficier d’un aménagement de peine. Sous Nicolas Sarkozy, cela concernait les peines allant jusqu’à deux ans de prison. « J’admets que notre mesure n’était pas bonne », précise-t-il dans l’interview au Parisien.
Christiane Taubira a rendu les aménagements de peine plus stricts que Rachida Dati - Jean-Pierre Clatot afp.com
- Délinquance : Les chiffres ont explosé
FAUX
La déclaration : « Ajoutez à cela l’explosion des chiffres de la délinquance entre 2012 et 2015 : infractions et délits sexuels +31 %, cambriolages +8 %, atteintes à l’intégrité physique +11 %. »
Les faits : Difficile de savoir d’où sortent les chiffres. Contacté par 20 Minutes ce mardi, l’Office national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) rappelle que « l’outil permettant de collecter les statistiques de la délinquance a changé depuis 2012 » et que toute comparaison des chiffres est donc hasardeuse.
Délinquance : Un nouvel outil pour mesurer les violences
L’éclairage : Si l’outil a changé, l’ONDRP dispose tout de même de tendances grâce à ses enquêtes de victimisation. « On note que les cambriolages ont surtout augmenté début 2010 et qu’ils sont stables depuis, assure l’un de ses chercheurs. Pour les viols, ils ont, eux, baissé en 2010 et se maintiennent également depuis. »