Inceste, adoption, placements... Quatre choses à savoir sur la nouvelle loi de protection de l’enfance
SOCIETE•L'Assemblée nationale vient d’adopter largement une proposition de loi sénatoriale sur la protection de l'enfance…Coline Clavaud-Mégevand
C’est sans difficulté que l’Assemblée nationale a adopté dans la nuit de mardi à mercredi une nouvelle loi sur la protection de l’enfance, respectant l’appel au consensus de la secrétaire d'État à la Famille Laurence Rossignol. Que va changer ce texte, qui a pour ambition d’améliorer la législation remontant à 2007? Revue des principales nouveautés.
Des parcours plus adaptés pour les jeunes placés
Principal reproche adressé au dispositif préexistant: le statut de parents biologiques primait le plus souvent dans la prise de décision de l’aide sociale à l’enfance (ASE). Un mineur pouvait ainsi être arraché à une famille d’accueil pourtant adaptée à son épanouissement, par exemple à cause d'un déménagement du parent biologique, ou d’un lien «trop fort» entre l’accueillant et l’enfant qui nuirait à sa relation avec le parent biologique. La nouvelle loi place au contraire l’intérêt de l’enfant avant toute autre considération.
Elle prend également en compte la notion de parcours du mineur, afin de limiter les placements répétés et les trajectoires chaotiques. Aujourd’hui, 300.000 jeunes sont pris en charge par l’ASE, la moitié étant placée en familles d'accueil ou en foyers, les autres faisant l'objet de mesures dites d' «assistance éducative» à domicile.
Faciliter l’adoption simple
Il existe deux types d’adoption: l’adoption plénière, qui rompt tout lien avec le parent biologique de façon définitive, et l’adoption simple. Celle-ci maintient la filiation originelle, tout en permettant quand même l’adoption par une autre famille. L’enfant peut ainsi maintenir des liens avec ses géniteurs, tout en évoluant dans un environnement propice à son bon développement. Cette adoption simple était jusqu’à présent révocable, par exemple si le mineur se trouvait dans une situation problématique avec sa «seconde famille».
La nouvelle loi rend désormais l’adoption simple irrévocable jusqu’à la majorité de l’enfant, afin d’inciter plus de gens à adopter de cette manière. De plus, l’enfant «capable de discernement» sera systématiquement auditionné lors d’une procédure d’adoption.
L’inceste inscrit dans le code pénal
Actuellement, les viols et les agressions sexuelles sur mineurs de moins de 15 ans sont qualifiés et punis par la loi, mais l'inceste, lui, n’était pas défini en tant que tel. S'il aggravait les peines prononcées, les associations réclamaient qu'il soit inscrit en toutes lettres dans le code pénal, afin notamment d’inciter les victimes à parler. C’est maintenant chose faite avec cette nouvelle loi, qui précise que sont considérés comme incestueux les viols et agressions sexuelles commis sur un mineur par «son ascendant ; son oncle ou sa tante ; son frère ou sa sœur ; sa nièce ou son neveu ; son grand-oncle ou sa grand-tante ; son cousin germain ou sa cousine germaine» mais aussi «le conjoint ou le concubin ou le partenaire lié par un pacte civil». Selon les derniers chiffres qui datent de 2009, deux millions de personnes sont victimes d’inceste en France.
Le cas des jeunes mineurs étrangers isolés
Malgré la pression de députés PS, EELV et du Front de gauche, l’abandon des tests osseux réalisés sur les mineurs étrangers n’a finalement pas été prononcé. Ceux-ci seront toutefois « limités au maximum», les socialistes ayant par ailleurs fait proscrire le recours à des tests génitaux.
Les tests osseux, pratiqués sur les jeunes étrangers pour déterminer leur âge s'ils n'ont pas de papiers, ne connaissent pas leur date de naissance ou si un doute existe sur ce sujet, sont considérés comme peu fiables. Leur but: définir si le jeune est bien mineur, ce qui grâce aux accords internationaux sur la protection de l’enfance lui donne droit à une aide. De nombreuses associations demandent aujourd’hui leur interdiction pure et simple.