RECITAbus de biens sociaux, faux, blanchiment: De quoi est exactement suspecté Faouzi Lamdaoui?

Abus de biens sociaux, faux, blanchiment: De quoi est exactement suspecté Faouzi Lamdaoui?

RECIT«20 Minutes» retrace les deux années d’enquête qui ont conduit le parquet de Paris a renvoyé Faouzi Lamdaoui, le conseiller de François Hollande, devant un tribunal correctionnel…
Vincent Vanthighem

Vincent Vanthighem

La conversation remonte à un peu plus de deux ans. Interrogé par 20 Minutes sur le fait que la police s’intéresse à sa société d’import-export, Faouzi Lamdaoui répondait alors: «Mais je n’attends que ça d’être convoqué devant les juges pour pouvoir donner ma version des faits.» Le parquet de Paris a exaucé les vœux du conseiller «Egalité et diversité» de François Hollande à l’Elysée. Il est cité à comparaître devant le tribunal correctionnel pour «abus de biens sociaux», «blanchiment d’abus de biens sociaux» et «faux et usage de faux», a-t-on appris ce mercredi.

>> Flashback: Un conseiller d’Hollande visé par une enquête de Paris

Les faits datent des années 2007-2008. A l’époque, le natif de Constantine (Algérie) accompagne François Hollande dans sa traversée du désert pré-élyséenne. En parallèle, il crée la société Alpha qui a pour objet «l’import-export, la messagerie 2 roues et la gestion d’entreprise», selon les statuts déposés au tribunal de commerce de Paris que 20 Minutes s’est procurés.

Les enquêteurs de police ne découvrent son existence que le 06 juin 2012, quand Naïma Belaïd se présente à eux. Cette dernière n’est autre que la femme de Mohammed, le chauffeur particulier de Faouzi Lamdaoui avec qui il est en froid (lire l’encadré). Elle raconte alors aux policiers que l’homme politique l’a sollicitée pour devenir la gérante de sa société. «Il m’a proposé de me rémunérer à hauteur de 500 euros par mois, même si je n’étais pas tous les jours présente sur les lieux, indique-t-elle lors de son audition, d’après le procès-verbal que 20 Minutes a pu consulter. J’ai trouvé cette proposition suspecte, du coup, j’ai refusé…»

Des bilans comptables suspects

Les enquêteurs aussi trouvent cela suspect. Ils se font alors communiquer l’ensemble des documents d’Alpha conservés dans une boîte de domiciliation d’entreprise du 20e arrondissement de Paris. Ils découvrent qu’en l’espace de trois ans, Alpha a changé plusieurs fois d’associés et une fois de nom pour devenir Cronoservices. Se rendent compte que si Naïma Belaïd a refusé de devenir la gérante, c’est pourtant bien sa signature qui figure sur les papiers officiels. Et surtout s’interrogent sur les premiers bilans comptables de la société.

«A l’origine, pour les enquêteurs, la plainte de Madame Belaïd n’est qu’une porte d’entrée vers cette société, confie une source proche du dossier. Ils cherchent surtout à savoir s’il y a eu des mouvements d’argent frauduleux.» La police se demande alors comment une société qui semble ne disposer d’aucun actif (ni local, ni ordinateur, ni feuille de papier) a pu dégager un chiffre d’affaires de 610.125 euros en 2009, soit la deuxième année de son existence.

Plusieurs dizaines de milliers d’euros sur son compte

Selon Le Monde, «d’importantes sommes auraient en fait été détournées au préjudice de cette société. Et le conseiller du Président aurait reçu plusieurs dizaines de milliers d’euros (…) sur son compte bancaire.» Or, toujours selon les informations du quotidien du soir, «ces sommes ne correspondent pas aux revenus qu’il avait déclarés à l’époque.»

Cité à comparaître en compagnie des associés de son entreprise –dont son frère– Faouzi Lamdaoui, qui reste présumé innocent, devrait avoir l’occasion prochainement de donner sa version des faits. Dix jours après la démission de Kader Arif, c’est quoi qu’il en soit un nouveau coup de canif dans la République irréprochable que promettait François Hollande lors de sa campagne électorale: Faouzi Lamdaoui vient d’annoncer sa démission de l’Elysée.

Mohammed Belaïd

A l’origine de l’affaire, c’est Mohammed Belaïd, l’ancien chauffeur de Faouzi Lamdaoui et François Hollande qui s’est, le premier, rendu chez les policiers. Celui-ci assurait qu’il avait servi de chauffeur pendant des mois sans bénéficier ni d’un salaire, ni d’un contrat de travail. Ouverte sur ces faits, l’enquête préliminaire a été classée sans suite. Se refusant à l’époque à tout commentaire, Ardavan Amir-Aslani, l’avocat de Faouzi Lamdaoui s’était contenté de répondre, par email à 20 Minutes, que son client «fait l’objet d’agissements de la part de Mohammed Belaïd tendant à porter atteinte à son honneur et à sa dignité.» De son côté, Faouzi Lamdaoui faisait remarquer que Mohammed Belaïd avait été condamné pour «dénonciation calomnieuse» dans une autre affaire.