Sarkozy: Taubira évoque «une méthode de diversion assez éculée»
REACTION•La Garde des Sceaux n'avait pas encore évoqué publiquement la mise en examen dans la nuit de mardi à mercredi de l'ancien chef de l'Etat...A.D. avec AFP
La ministre de la Justice Christiane Taubira estime que Nicolas Sarkozy a adopté après sa garde à vue et sa mise en examen «une piètre ligne de défense, une méthode de diversion assez éculée», dans un entretien à paraître vendredi dans les quotidiens régionaux du groupe Ebra.
«Des griefs sont énoncés et M. Sarkozy a droit à la présomption d'innocence comme tout justiciable», déclare la garde des Sceaux, qui n'avait pas encore évoqué publiquement la mise en examen dans la nuit de mardi à mercredi de l'ancien chef de l'Etat pour corruption, trafic d'influence et recel de violation du secret professionnel.
«Méthode de diversion assez éculée»
«Autant je m'interdis de commenter une affaire en cours, autant je respecte la présomption d'innocence. Je ne porterai donc pas d'appréciation sur la culpabilité éventuelle de M. Sarkozy», insiste la ministre.
«Je constate simplement que tout justiciable n'a pas le loisir de venir à la télévision pour expliquer comment il a été "maltraité". Je pense, d'un point de vue politique, que c'est une piètre ligne de défense et, en même temps, une méthode de diversion assez éculée», ajoute-t-elle.
Mercredi soir, sur TF1 et Europe1, Nicolas Sarkozy a fustigé les pratiques des deux femmes juges d'instruction qui l'ont mis en examen, estimant qu'elles avaient voulu l'«humilier» en ordonnant son placement en garde à vue plutôt que de le convoquer directement dans leur cabinet. Des méthodes que l'ancien président a voulu lier au fait que l'une des juges appartient au Syndicat de la magistrature (SM), marqué à gauche.
La comparaison avec Cahuzac «injustifiée»
A la question de savoir si la garde à vue était nécessaire, Christiane Taubira répond que «ce sont les juges qui décident» et qu'elle «ne commente pas les décisions de justice, ni les procédures».
Nicolas Sarkozy fait remarquer que l'ancien ministre du budget Jérôme Cahuzac, poursuivi dans une affaire de fraude fiscale, n'a pas fait une seconde de garde à vue. «La comparaison ne me paraît pas justifiée pour la simple raison qu'une fois que le parquet a disposé d'éléments concernant M. Cahuzac, celui-ci a été convoqué. Il a reconnu les faits. La garde à vue sert à établir les choses», constate la garde des Sceaux.
Outre Nicolas Sarkozy, son avocat historique, Thierry Herzog, et un haut magistrat à la Cour de cassation, Gilbert Azibert, ont également été mis en examen mardi.
«La seule question est de savoir si les choses ont été faites dans le respect du droit», estime Christiane Taubira dans son entretien au Bien Public et au Journal de Saône et Loire repris par les autres quotidiens du groupe Ebra. ,«Les juges appliquent le code de procédure pénale», dit-elle, tout en s'interrogeant: «Notre droit est-il suffisamment protecteur des libertés en la circonstance?»
«Les avocats font partie des professions protégées, comme les magistrats, journalistes, parlementaires, médecins. Je ne prends vraiment pas à la légère les écoutes qui sont incontestablement intrusives, mais la justice doit disposer de moyens pour construire des procédures», conclut-elle.