Décentralisation: le Sénat vote un projet de loi entièrement remanié
Le Sénat devait se prononcer jeudi soir sur le premier projet de loi de décentralisation du gouvernement Ayrault, centré sur la création de métropoles, qu'il a entièrement remanié.© 2013 AFP
Le Sénat devait se prononcer jeudi soir sur le premier projet de loi de décentralisation du gouvernement Ayrault, centré sur la création de métropoles, qu'il a entièrement remanié.
Le vote était prévu en fin d'après-midi, mais de nombreux sénateurs ont demandé une suspension de séance pour se rendre à la manifestation à la mémoire de Clément Méric, le jeune militant d'extrême gauche décédé après une rixe avec des skinheads.
Après cette première lecture du texte au Sénat, le projet de loi de «modernisation de l'action publique territoriale et affirmation des métropoles» rétablit la clause de compétence générale pour toutes les collectivités, supprimée sous Nicolas Sarkozy, et instaure les métropoles de Lyon et d'Aix-Marseille-Provence. Il désigne aussi des collectivités comme chefs de file pour certaines compétences.
En revanche, les sénateurs ont supprimé tout le volet consacré à la création d'une métropole parisienne et réduit à sa plus simple expression le mécanisme permettant aux collectivités d'organiser les compétences entre elles à la carte.
Ils ont validé la création d'ici au 1er janvier 2015 de la métropole de Lyon, mais aussi, ce qui s'annonçait difficile, celle de la métropole d'Aix-Marseille-Provence au 1er janvier 2016.
Ils ont convenu d'attribuer le statut de métropole (hors Paris, Lyon, Marseille) aux villes ou intercommunalités de 400.000 habitants situées dans une aire urbaine de plus de 650.000 habitants, alors que le gouvernement prévoyait une aire urbaine de 500.000 habitants. Ce statut, qui renforce leur rôle, pourra concerner Bordeaux, Rouen, Toulouse, Lille, Strasbourg, Nantes, Grenoble et Rennes. Montpellier, qui dans un premier temps avait été inclus dans cette liste, n'en fait pas partie.
Les sénateurs ont travaillé pendant une semaine à trouver un consensus, afin que l'Assemblée nationale étudie un texte issu du Sénat. Si le texte était rejeté, ce serait le projet de loi d'origine du gouvernement qui serait discuté par les députés.
«Très beau résultat»
«C'est un très beau résultat d'une première lecture», a déclaré à l'AFP, en marge du débat, la ministre de la Décentralisation Marylise Lebranchu. «Les sénateurs ont été précis, attentifs et courageux», a-t-elle jugé.
«Alors que l'on disait que le texte du gouvernement, mal ficelé, allait être rejeté, le Sénat a beaucoup travaillé et l'a simplifié en rendant de la liberté aux élus», a estimé le président de la commission des Lois, Jean-Pierre Sueur (PS).
«Cela a bien marché», a sobrement commenté Jean-Claude Gaudin, président des sénateurs UMP et sénateur-maire de Marseille.
Les sénateurs ont en effet voté la création de la future métropole Aix-Marseille-Provence qu'il défend, malgré la vive opposition de 109 maires sur 119 toutes tendances politiques confondues. La controverse a été désamorcée par l'adoption d'un amendement de M. Gaudin prévoyant une représentation de tous les maires dans le futur conseil métropolitain.
Les écologistes traditionnellement régionalistes ont annoncé qu'ils s'abstiendraient, alors qu'avant le débat, ils reprochaient au texte entre autres d'être «totalement décousu». «Notre priorité était le renforcement du couple Régions-intercommunalité», a relevé Ronan Dantec. «On va dans le bon sens, mais on est encore au milieu du gué», a-t-il regretté.
Pour Jean-Jacques Hyest (UMP), le projet de métropole d'Ile-de-France que le gouvernement avait proposé «était certainement la plus mauvaise solution». Son groupe dans sa grande majorité s'abstiendra, mais, à titre personnel, il votera pour, considérant que «les métropoles de Lyon et Marseille sont des exemples».
Michel Mercier (UDI-UC), également président du conseil général du Rhône, qui a porté le projet de métropole lyonnaise avec le sénateur-maire de la ville, Gérard Collomb (PS), votera aussi le texte: «On sera assez nombreux à le faire dans notre groupe.»
Le groupe Communiste, républicain et citoyen votera contre. «Nous nous félicitons des modifications apportées par le rapporteur René Vandierendonck (PS), en particulier sur la conférence territoriale», a dit sa présidente Eliane Assassi. Mais elle a regretté que «l'on n'ait pas pris en compte l'avis des 109 maires des Bouches-du-Rhône» opposés à la métropole dans leur département.
Le groupe RDSE (à majorité PRG) votera «globalement» le texte, a annoncé son président Jacques Mézard.
Le texte sera examiné par les députés à partir du 20 juillet, selon la ministre déléguée à la Décentralisation, Anne-Marie Escoffier.