POLITIQUEHollande garde le cap malgré la fronde de Montebourg, Duflot et Hamon

Hollande garde le cap malgré la fronde de Montebourg, Duflot et Hamon

POLITIQUEIls se sont longuement exprimés pour tancer les politiques d’austérité et demandé en creux un changement de cap au chef de l'Etat...
M.P.

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Il y a diverses manières de réagir politiquement à l’affaire Cahuzac. Sous la contrainte du scandale, François Hollande lance une grande opération transparence dans le monde politique, comme il l’a annoncé lui-même à l’Elysée ce mercredi. D’autres, notamment au gouvernement, y voient une opportunité pour réclamer un changement de cap politique, arguant pêle-mêle qu’avec le mensonge et la fraude de Jérôme Cahuzac, symbole au gouvernement des coupes budgétaires, la même politique ne pouvait plus être menée et que la situation économique est si mauvaise que l’austérité peut tuer toute reprise économique. Trois ministres, Arnaud Montebourg, Cécile Duflot et Benoît Hamon, y sont allés de leur interview pour demander un adoucissement de l'austérité.

Montebourg lance la fronde, Hamon sort du bois

C’est Arnaud Montebourg qui a sonné la charge mardi dans un entretien au Monde. «Le sérieux budgétaire, s'il tue la croissance, n'est plus sérieux. Il est absurde et dangereux. Il est donc plus que temps d'ouvrir le débat sur cette politique qui conduit l'Union à la débâcle», a lâché le ministre du Redressement productif. Cécile Duflot a également rejoint la grogne dans un entretien à Mediapart, où elle confirme avoir demandé en conseil des ministres un changement de cap à François Hollande la semaine dernière. «La crise politique que nous vivons a un déclencheur conjoncturel: la découverte du mensonge et des actions de Jérôme Cahuzac. Mais les racines de la crise sont plus profondes: une crise économique et sociale forte et une poussée réactionnaire importante», dit-elle. Une réponse «uniquement centrée sur la baisse des dépenses publiques ne peut pas être une réponse politique durable», ajoute-t-elle.

Les deux ministres ont été rejoints mercredi matin par leur collègue de l’Economie sociale et solidaire, Benoît Hamon qui clame dans Le Parisien que «l’austérité peut conduire à une France low-cost». «La consolidation budgétaire est un marathon. Et un marathon, on ne le finit pas sur le rythme d’un coureur de 400m», tance-t-il en allusion à l’objectif des 3%, pointant «les exigences allemandes» qui «demandent de sprinter alors que la France a besoin de reprendre son souffle». Et le leader de l’aile gauche, assez discret depuis sa prise de fonction, d’enfoncer le clou: «aujourd’hui, l’austérité en Europe n’est plus soutenable avec ses millions de chômeurs».

Initiative concertée?

Pour certains, ces interventions similaires ne pouvaient relever que de l’offensive concertée de ces trois ministres, voire encouragée en sous main par l’Elysée. D’autant que François Hollande «était parfaitement informé de [l’]initiative [de Montebourg, ndlr] et, la veille de l'entretien, lui-même avait eu une longue discussion avec le chef de l'Etat», relève Le Monde. Il pourrait de préparer le terrain à un nouveau cap, plaidait-on dans son édition parue mardi. Dans celle de mercredi, Le Monde assure que Matignon est «préoccupé» après les déclarations de Montebourg et que Jean-Marc Ayrault était furieux après la parution de l’entretien.

Sauf que François Hollande est venu rappeler fortement ce mercredi qu’il ne changerait pas de politique. «Le sérieux, c'est le cap, la croissance, c'est l'objectif, l'emploi, c'est l'exigence, cette politique a été fixée, je n'en changerai pas», a-t-il souligné, récusant mener une politique d’austérité. «La politique que je conduis est celle qui permet d'éviter l'austérité», a-t-il insisté, déclinant sa définition du «sérieux budgétaire»: «c'est la condition de la crédibilité, c'est la condition aussi de la souveraineté, de l'indépendance, c'est la condition aussi de notre capacité à changer l'orientation de l'Europe». Interrogé sur les propos de ses ministres qui remettent en cause le cap choisi, Hollande a jugé qu’ils ciblaient la politique de l’Europe car «aucun ministre ne peut remettre en cause la politique qui est conduite, qui n'est pas l'austérité». En revanche, il y a bien une volonté d’assouplir les règles au niveau européen, et donc d’entrer, comme l’a dit François Hollande lors de son intervention sur TF1 le 28 mars, dans une «tension amicale» avec Berlin, tenant de l’orthodoxie budgétaire européenne.