GAUCHEPS: Quel premier secrétaire sera Harlem Désir?

PS: Quel premier secrétaire sera Harlem Désir?

GAUCHELe premier secrétaire, par intérim pour encore quelques jours, doit s'imposer au sein du PS et de la majorité...
Maud Pierron

Maud Pierron

Pas facile d’enfiler le costume de premier secrétaire du Parti socialiste quand tout le monde juge, soi-même compris, que la procédure de désignation n’a pas été transparente. Encore moins quand la première secrétaire qui vous a adoubé bon gré mal gré, Martine Aubry, quitte ses fonctions précipitamment et vous confie l’intérim jusqu’à un congrès déjà verrouillé. Et pour ne rien arranger, la motion majoritaire n’a recueilli qu’un peu plus de 68% des suffrages des militants, un score bien maigre quand les caciques attendaient que le texte à vocation majoritaire, concocté par Aubry et Ayrault, dépasse les 80%.

Et pourtant voilà que l’ancien de SOS-Racisme commence à faire entendre sa petite musique. Mardi, il s’est opposé au Premier ministre qui, sur Europe 1, venait d’expliquer qu’il est opposé à l’introduction de la procréation médicale assistée dans le texte sur le mariage homosexuel. Harlem Désir s’y est dit favorable, faisant la leçon: «C’est parce qu’on écoutera les Français qu’on aidera le gouvernement à ne pas décrocher de la société.» C’était lui qui, parmi les premiers, avait affirmé que l’objectif des 3% des déficits publics n’était pas «un tabou» et qu’il fallait peut-être y réfléchir à deux fois.

«Le coup de pied de l’âne à Martine Aubry»

C’est lui encore qui remet en cause le processus de désignation du premier secrétaire du PS qui l’a pourtant amené à la tête du parti. Dans un entretien au Monde, il dit vouloir «revenir à l'esprit de la réforme conduite par Lionel Jospin en 1995, c'est-à-dire au vote direct» des militants alors que lui a été coopté à l’issue de négociations obscures entre Martine Aubry, Jean-Marc Ayrault, François Hollande et quelques ministres influents. «Rien ne doit donner le sentiment d'un verrouillage ou de combinaisons internes. Nous sommes le parti des primaires qui ont montré une soif de débat démocratique», tonne-t-il encore. Une manière de donner des gages à l’aile gauche du parti, qui n’a cessé de critiquer cette méthode si peu démocratique et déjà de commencer à rassembler?

«Il prend la mesure de son rôle au fur et à mesure. C’est aussi le coup de pied de l’âne à Martine Aubry qui avait mis en place cette nouvelle procédure», observe un député «neutre» vis-à-vis de son nouveau Premier secrétaire. S’émanciperait-il peu à peu de la tutelle pesante de sa prédécesseure, qui lui a d’ailleurs laissé une feuille de route chargée? «Pour s’émanciper, il faudrait qu’il ait été biberonné par les éléphants du PS pendant des années, qu’il soit passé d’éléphanteau à éléphant. Or, Harlem, quand il est arrivé au PS, c’était déjà quelqu’un, il avait déjà sa trajectoire», défend Malek Boutih, un «pote» de l’époque SOS-Racisme. «Il ne veut pas être le ‘Monsieur plus’, celui qui réclame toujours plus mais il doit répondre à la question de savoir à quoi sert un parti politique quand il est au pouvoir», explique le député PS de l’Essonne.

Bientôt des «harlemistes»?

Déjà, lors de sa désignation, le député PS de l’Essonne assurait qu’il ne serait «pas une marionnette» et que ceux qui le pensent – l’espèrent – «seront déçus». Lui ne l’est pas. «Il n’était pas candidat pour avoir un bâton de maréchal de fin de carrière, c’est peut-être le début de sa carrière d’ailleurs», plaide Malek Boutih. A son crédit, ce partisan d’Harlem Désir pointe «son grand lien avec l’opinion publique», son côté « travailleur», «pédagogue»,qui a la «culture du compromis». Enfin, c’est un «très bon orateur», assure-t-il. Etonnant quand on sait qu’Harlem Désir a remporté pour la troisième fois consécutive le prix de la langue de bois, décerné par les journalistes qui suivent le PS. «Il n’était pas en situation. Numéro 2, c’est presque rien, là ça va changer», rassure Malek Boutih.

Reste que pour l’instant, il n’y a pas de «désiristes» ou d’«harlemistes» qui prêchent la bonne parole dans les couloirs de la rue de Solférino. Le député européen est un homme sans réelles troupes. «Il va falloir qu’il trouve des soutiens», concède Malek Boutih même si «le cadenassage» du parti est moins nécessaire à son sens, quand le PS est au pouvoir. Pourtant, le «vivier» potentiel est là, pour constituer un groupe de soutien, parmi la «génération SOS-Racisme, qui a entre 30 et 50 ans», glisse Malek Boutih. Mais ce n’est pas le moment de s’organiser au sein du PS. Il faut attendre le congrès et son intronisation officielle fin octobre pour formaliser un groupe de soutien. «Il n’est pas manchot. Sa voix va peser», jure Malek Boutih, espérant qu’il retrouve le souffle des années 80.