ASSURANCEPourquoi le coût des catastrophes naturelles explosera d’ici 2050 en France

Changement climatique : Pourquoi le coût des catastrophes naturelles va exploser d’ici à 2050 en France

ASSURANCEDans une étude publiée ce mardi, la Caisse centrale de réassurance (CCR), en partenariat avec Météo-France, a cherché à mesurer l’impact du changement climatique sur le coût des catastrophes naturelles à l’horizon 2050 en France. Et ça pique
Fabrice Pouliquen

Fabrice Pouliquen

L'essentiel

  • Des inondations aux sécheresses, en passant par les séismes, les submersions marines, les cyclones… En France, le régime « Cat Nat » permet à chaque citoyen d’être indemnisé en cas de sinistre causé par un phénomène naturel.
  • Mais le changement climatique fait exploser le coût des indemnisations et pourrait le faire bien plus à l’avenir, pointe dans une étude, ce mardi, la Caisse centrale de réassurance, le réassureur public, en partenariat avec Météo-France.
  • Le péril le plus préoccupant est celui de la sécheresse. La CCR craint que les épisodes pluriannuels, comme la séquence 2016-2020 – avec un milliard d’euros de dommages par an en moyenne sur ces quatre années – vont voir leur fréquence augmenter significativement.

Edit: Après les inondations dans le sud de la France, notamment à Annonay en Ardèche, liées à la tempête Leslie, nous vous proposons à la relecture cet article publié le 17 octobre 2023.

La Crue de la Seine en 2016, l’ouragan Irma, qui avait déferlé sur les Antilles la même année, ou encore cette succession de sécheresses exceptionnelles entre 2016 et 2020… Ces dernières années, la France n’a pas été épargnée par des événements météorologiques de grandes ampleurs. Et cela ne devrait être qu’un début, alors que le changement climatique devrait augmenter encore l’exposition et la vulnérabilité de la France aux catastrophes naturelles.

De quoi faire grimper en flèche le coût du régime d’indemnisation des catastrophes naturelles, instauré en 1982 ? Des inondations aux sécheresses, en passant par les séismes, les submersions marines, les cyclones, le régime « Cat Nat » permet à chaque citoyen d’être indemnisé en cas de sinistre causé par un phénomène naturel. Il a permis de pallier une carence de couverture de ces risques, jusque-là très peu assurés.

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Une dérive déjà constatée depuis le début des années 2000

Dans une étude publiée ce mardi en partenariat avec Météo-France, la Caisse centrale de réassurance (CCR), organisme public de réassurance*, a cherché à évaluer l’impact du changement climatique sur le coût des catastrophes naturelles à l’horizon 2050. Cette étude, dont c’est la troisième édition, commence déjà par rappeler le constat d’« une dérive de la sinistralité avec une augmentation du niveau des dommages moyens annuels depuis l’année 2000 ».

La sécheresse exceptionnelle de 2022 est le dernier exemple marquant en date. Son coût a été réévalué par la CCR, dans cette étude, à 3,5 milliards d’euros sur cette seule année. La facture est essentiellement liée au phénomène de retrait-gonflement (RGA) des argiles, à cause de mouvements de terrain occasionnés par l’alternance de périodes de pluie et de sécheresse. De quoi mettre à rudes épreuves les maisons individuelles, sur les murs desquelles peuvent apparaître des fissures.

Juste un début ?

Pour comparaison, en moyenne depuis 1989, la sinistralité sécheresse est de 611 millions d’euros par an. Même si 2023 a été bien moins sèche que 2002, l’année devrait figurer largement au-dessus de la moyenne, la CCR estimant à 900 millions d’euros le coût probable. « Si la sinistralité due à l’inondation reste stable, les dommages annuels moyens dus à la sécheresse ont augmenté de 23 % depuis 2000, du fait du climat », constatent les auteurs.

Mais dans leur étude, la CCR et Météo-France ont surtout cherché à lire l’avenir… Pour faire leurs projections, les experts du CCR se sont appuyés sur les données de Météo-France, qui simulent la météo en France métropolitaine à horizon 2050 en se basant sur deux scénarii du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec).

Fois deux tous périls confondus ?

Quel que soit le scénario, « les montants des dommages vont augmenter à l’horizon 2050 en raison d’une hausse de l’intensité des événements climatiques », prévient le CCR. Même en prenant le RCP 4.5, l’un des scénarii les plus optimistes du Giec – avec une hausse des températures contenue à + 2 °C à l’horizon 2100 par rapport à l’ère préindustrielle, la hausse de la sinistralité reste significative. Tous périls confondus, dans le climat actuel, le coût moyen est estimé à un peu plus 2 milliards d’euros par an. En 2050, la hausse pourrait être de 27 % et dépasser ainsi les 2,5 milliards d’euros. Mais ce premier pourcentage ne prend en compte que le seul effet du changement climatique. L’étude ajoute les enjeux sinistrés, soit l’augmentation de la population et de la densité urbaine, deux facteurs de nature à accroître le montant des sinistres. La hausse attendue en 2050 est alors de 47 %, ce qui nous amènerait à un coût annuel moyen de 3 milliards d’euros.

Dans le détail, pour le péril inondation, le coût moyen annuel devrait augmenter de 43 %, passant de 979 millions d’euros dans le climat actuel à 1,4 milliard en 2050 (changement climatique + enjeux assurés). La hausse est plus marquée encore pour les submersions marines, avec une augmentation attendue de la sinistralité de 113 %. On passerait de 68 millions d’euros en moyenne dans le climat actuel à 145 millions en 2050.

Comparaison du montant des dommages assurés moyens annuels tous périls entre le climat 2000,  le climat actuel et le climat 2050.
Comparaison du montant des dommages assurés moyens annuels tous périls entre le climat 2000, le climat actuel et le climat 2050. - Infographie Caisse centrale de réassurance

Les sécheresses, péril le plus préoccupant

Mais le péril le plus préoccupant reste bien celui de la sécheresse, compte tenu du montant des dommages et de leur forte évolution attendue, pointe l’étude. Ainsi, toujours dans ce scénario 4.5, et toujours en prenant en compte le changement climatique et les enjeux sinistrés, le coût moyen annuel devrait augmenter de 59 %, passant ainsi de 726 millions d’euros dans le climat actuel à 1,156 milliard d’euros dans le climat 2050. Par ailleurs, l’étude précise que les sécheresses pluriannuelles comparables à la séquence 2016-2020 – avec un milliard d’euros de dommages en moyenne sur ces quatre années – vont voir leur fréquence augmenter significativement. De quoi justifier, pour la CCR, la mise en place d’une politique de prévention collective de grande ampleur face à ce risque.

D’autant plus qu’encore une fois, ces premières estimations s’appuient sur le scénario 4.5. Le CCR et Météo France ont aussi pris des scénarii plus pessimistes du Giec, dont le pire, le RCP 8.5, qui nous emmènerait à un monde à + 4°C d’ici 2100. Pas impossible, ce scénario partant du principe que nos émissions de gaz à effet de serre se poursuivraient sur le rythme actuel. A nos risques et périls. Le coût des catastrophes naturelles serait en tout cas bien plus lourd pour la France. Au point de grimper à une moyenne annuelle de 2,108 milliards d’euros en 2050 rien que pour les sécheresses, et à 3,845 milliards d’euros tous périls confondus.

* Autrement dit, l’assureur des assureurs