élevageEt si le Gers troquait ses canards pour la gambas tropicale ?

Changement climatique : Et si le Gers troquait ses canards pour la gambas tropicale ?

élevageAu pays du foie gras, on trouve dorénavant un élevage inattendu, celui de la gambas tropicale. Son installation dans le Gers est due au réchauffement climatique et à la recherche d’une nouvelle aventure d’un vétérinaire
20 Minutes avec AFP

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Bientôt du foie gras de gambas tropicales ? La question peut ressembler à un kamoulox mais elle se pose. Dans le Gers, département connu pour ses élevages de canards et son foie gras, Géraud Laval a créé « Gambas d’ici » pour faire de la crevetticulture. « On importe 100.000 tonnes de crevettes par an en France, soit à peu près deux kilos par habitant », souligne cet ancien vétérinaire qui a décidé de se lancer dans cette aventure agricole étonnante sous nos latitudes.

Sur la base de ce « marché phénoménal », Géraud Laval a eu l’idée de lancer en 2017 le premier élevage de crevettes français, 100 % « made in » Gers, là où il s’est installé avec femme et enfants après avoir longtemps voyagé. « Produire autrement », c’était prendre le contrepied des fermes-usines du bout du monde qui déciment les écosystèmes côtiers et pratiquent un élevage intensif à plusieurs centaines de crevettes par mètre carré et à coups de gros volumes de farine de poisson pour les nourrir.

Crevette l’été, truite l’hiver

A Idrac-Respaillès, village gascon d’à peine plus de 200 âmes où Géraud Laval a creusé ses trois bassins (1,5 hectare au total), il y a trois-quatre crevettes au mètre carré et pour la nourriture, le crevetticulteur préfère fertiliser l’eau (avec du tourteau de tournesol), les petits vers d’eau et insectes faisant le reste. L’autre idée forte du projet, c’était aussi son adaptabilité à l’environnement. « Les climatologues convergent sur ce constat, c’est que les températures augmentent », souligne Géraud Laval.

« Cet été, on a eu un record ici à 42 degrés », dit-il, et la saison 2023 a été celle de ses meilleurs rendements justement parce que la crevette qu’il a choisie se développe particulièrement bien dans une eau dont la température dépasse en moyenne les 25 degrés.

Cette spécificité liée aux températures élimine par ailleurs le risque invasif, la crevette tropicale ne pouvant survivre dans une eau à moins de 14 degrés, comme celle d’un cours d’eau gersois en plein hiver, fait remarquer Géraud Laval qui, à partir de fin novembre, délaisse les gambas pour élever des truites. Et pour encore plus de sécurité environnementale, ses bassins sont en circuit fermé, sans aucun contact avec les cours d’eau voisins. De quoi, espère l’éleveur, vaincre les réticences de pouvoirs publics parfois inquiets à l’idée de délivrer des autorisations d’exploitation pour de la crevetticulture tropicale.

L’Ain intéressé par la crevetticulture

Géraud Laval se rêve en initiateur d’un mouvement et il espère diffuser son concept d’élevage : il préside l’association interprofessionnelle de la crevette d’eau douce (AICED) et forme volontiers les éleveurs désireux de se lancer. C’est notamment le cas de certains pisciculteurs des étangs de la Dombes (Ain), première région française pour la production de poissons d’étang.

Mais sur ce territoire, l’Etat bloque les autorisations. Interrogé en mars à ce sujet par le député du cru, Jérome Buisson (RN), le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau a promis d’harmoniser le regard de l’Etat sur ces initiatives et de faciliter les autorisations.