Man vs wildPros et anti-loi « restauration de la nature » manifestent à Strasbourg

Changement climatique : Trois questions autour de la loi européenne sur la restauration de la nature

Man vs wildDes agriculteurs opposés au texte et des militants écologistes se sont fait face à la veille du vote
Xavier Regnier

X.R.

Greta Thunberg d’un côté de la rue, Christiane Lambert de l’autre. La militante écologiste et l’ex-patronne de la FNSEA se sont affrontées à distance mardi, devant le Parlement européen à Strasbourg. Toutes deux défilaient à la veille du vote sur la loi sur la restauration de la nature, que la première veut voir adopter, la seconde surtout pas. 20 Minutes vous explique les tensions sur ce texte.

C’est quoi la loi sur la restauration de la nature ?

Le texte, proposé par la Commission européenne mi-2022, vise à enrayer le déclin de la biodiversité et à mieux contrer le changement climatique en imposant de réparer les écosystèmes abîmés. Pour chaque milieu naturel, tous les Etats membres de l’UE seraient tenus d’adopter des mesures pour ramener d’ici 2030 au moins 30 % des habitats abîmés à leur état d’origine, puis 60 % d’ici 2040, si le texte était approuvé par les eurodéputés.

Cette loi est donc un élément clé du Pacte vert européen, alors que le continent est particulièrement sensible au réchauffement climatique. La température y a déjà grimpé de plus de 1 °C par rapport à l’ère préindustrielle, et l’agriculture intensive, le développement urbain, le tourisme de masse et la fonte des glaces ont eu des effets destructeurs sur les écosystèmes. A titre d’exemple, le continent a perdu 25 % de sa population d’oiseaux en quarante ans.

Pourquoi les agriculteurs sont contre cette loi ?

L’une des deux manifestations de mardi, organisée par le Committee of professional agriculture organisations (COPA), a rassemblé au moins 200 agriculteurs opposés à ce texte qui leur ferait, selon eux, perdre des surfaces agricoles. « Oui, à la restauration de la nature, non à la loi sur la restauration de la nature », clament les agriculteurs, menés par Christiane Lambert, ex-dirigeante du syndicat agricole majoritaire français, la FNSEA. Derrière eux, plusieurs dizaines de tracteurs ont été stationnés face au Parlement européen.

Les agriculteurs dénoncent un texte qui leur ferait perdre « 10 % de la surface agricole utile ». Il y a « déjà des surfaces qui sont restituées à la nature » et les agriculteurs ont déjà enregistré « beaucoup de pertes » avec la nouvelle Politique agricole commune (PAC), confie Florian Lossel, exploitant près de Strasbourg. « Au bout d’un moment ça fait trop, c’est plus possible. » L’eurodéputée LR Anne Sander a pour sa part jugé que « la Commission ne tient compte ni de la sécurité alimentaire, ni de la sécurité énergétique pourtant essentielles ».

Une mobilisation essentielle chez les écologistes ?

De l’autre côté du pont, une centaine de militants pour le climat sont venus pour « mettre la pression » sur les eurodéputés, dans l’espoir que ce texte « historique » soit voté, témoigne Amine Messal, étudiant à l’ENS Paris-Saclay. « On a rarement des opportunités législatives comme celle-ci » à l’échelle européenne « et avec des objectifs un minimum ambitieux » pour préserver et restaurer ces espaces, ajoute-t-il.

Parmi les activistes climatiques venus « d’au moins sept pays » de l’UE, la Suédoise Greta Thunberg avait fait le déplacement jusqu’à Strasbourg pour exhorter les eurodéputés à « voter la loi de restauration de la nature la plus forte possible », une « nécessité ». Car l’issue du vote demeure incertaine. Le texte a déjà été rejeté par trois commissions au sein du Parlement, dont celle de l’Environnement, malgré des concessions faites aux conservateurs du PPE. En cas d’échec en séance plénière ce mercredi, c’est tout le Pacte vert qui pourrait partir en lambeau jusqu’aux prochaines élections européennes.