Bouches-du-Rhône : A quoi ressemble la nouvelle unité de traitement d’Alteo, qui assure des rejets en mer 100% aux normes ?
ENVIRONNEMENT•En redressement judiciaire, l’usine de Gardanne a inauguré sa nouvelle station de traitement biologique des eaux résiduelles rejetées dans les CalanquesCaroline Delabroy
L'essentiel
- La bataille sur le front judiciaire concernant la qualité des rejets liquides en mer d’Alteo a pris fin avec l’inauguration, ce vendredi, de sa nouvelle unité de traitement biologique.
- L’usine de production d’alumines de spécialité de Gardanne est à présent aux normes sur tous les paramètres environnementaux.
- L’avenir reste cependant incertain pour l’usine, confrontée à une procédure de redressement judiciaire et au renouvellement de l’autorisation d’exploitation du site de stockage de Mange-Garri.
Elle est là, objet de toutes les attentes depuis quelques années. De l’extérieur, la nouvelle unité de traitement biologique des rejets liquides de l’usine Alteo de Gardanne dans le parc national des Calanques pourrait ressembler à n’importe quelle station d’épuration urbaine. Une première impression que corrige vite Olivier Campos, responsable pour les Bouches-du-Rhône de Veolia Eau : « C’est la première fois que nous traitons ce type d’effluent dans le monde, et avec des contraintes d’espace sur un site industriel. » L’ouvrage, très compact, occupe ainsi une très faible surface au sol malgré deux grandes cuves noires.
Avec cette unité, inaugurée ce vendredi, l’usine d’alumines de spécialité est enfin 100 % aux normes environnementales concernant ses rejets en mer. L’an passé, une première unité de traitement, au CO2 cette fois, lui avait permis d’épurer ses eaux résiduelles de tous les métaux. Il restait à traiter la matière organique, soit les fameux paramètres DCO et DBO5 pour lesquels Alteo a essayé d’obtenir en justice un délai de l’Etat pour se conformer à la réglementation.
14 mois de travaux
La technique ? « Le cœur du processus est biologique, poursuit Anne-Laure Galmel, cheffe de projet chez Veolia Eau. On a reproduit la dégradation qui a lieu dans le milieu naturel avec de la biomasse, qui va consommer la matière organique. » L’eau traitée subit une étape ultime de filtration qui vient éliminer les dernières matières en suspension ce qui, à en croire Veolia, « est une barrière finale contre tout type de pollution ». Le tout a nécessité deux ans d’expérimentation et 14 mois de travaux, pour un investissement de 7 millions d’euros, dont 30 % sont subventionnés par l’Agence de l’eau.
« C’est notre vitrine, cela prouve notre savoir-faire à nos futurs repreneurs, sourit Bruno Arnoux, secrétaire du comité social et économique de l’entreprise. C’est toujours un procès à charge quand on parle d’Alteo, il faut qu’on arrive à changer cette image. » Cette inauguration intervient en effet en plein redressement judiciaire pour l’entreprise, qui cherche un repreneur pour le site. « Alteo a besoin d’avoir autant de soutien pour sauver son activité et maintenir l’emploi qu’on a eu de pression pour réduire notre empreinte environnementale », tacle Frédéric Ramé, président d’Alteo.
Le défi Mange-Garri
Reste que sur le plan environnemental, les regards se tournent à présent sur le site de stockage de « boues rouges » de Mange-Garri, vaste espace dans la pinède à Bouc-Bel-Air, près de Gardanne. L’autorisation préfectorale d’exploitation arrive à terme en juin prochain. « Le défi aujourd’hui est de sortir de cette vague de redressement judiciaire par le haut et d’obtenir l’autorisation d’exploitation de Mange-Garri, il y va de l’avenir de l’usine », relève Eric Duchenne, directeur de l’usine Alteo de Gardanne.
Sur ce point, l’usine a reçu publiquement le soutien de l’Etat par la voix du sous-préfet de l’arrondissement d’Aix-en-Provence, Serge Gouteyron : « Alors oui, rien ne sera simple, mais nous ferons en sorte, notamment dans le cadre des demandes déposées pour poursuivre Mange-Garri sur 30 ans, d’accompagner la démarche. »
A écouter également François Bland, le directeur du parc national des Calanques, le dossier des rejets en mer d’Alteo « est devenu un marqueur », une « méthodologie » à dupliquer. « Il y a eu beaucoup de débats ces dernières années autour de ce dossier, les résultats aujourd’hui sont là avec des rejets conformes aux normes, poursuit-il. Alteo a démontré cette possibilité de concilier économie et environnement. » Et le parc d’inviter Alteo à aller plus loin pour, peut-être à terme, « recycler les eaux traitées ».