Il y a une vie dans les pressings en dehors du perchloroéthylène
Une boutique discrète du centre de Paris, sur des cintres, des ...© 2012 AFP
Une boutique discrète du centre de Paris, sur des cintres, des tailleurs et des sacs à main en cuir qui ont retrouvé leur fraîcheur: au "pressing no 1", le nettoyage à l'eau remplace le nettoyage à sec au perchloroéthylène (PCE), décrié et en voie d'interdiction.
La grande majorité des quelque 5.000 pressings de France utilisent pour leur nettoyage à sec du PCE, un solvant organique chloré ininflammable au pouvoir dégraissant sans pareil. Cependant, très volatil, il est nocif pour l'environnement et classé depuis 1995 par l'Organisation mondiale de la santé comme cancérogène probable.
Le ministère de l'Ecologie doit publier prochainement un arrêté qui interdira à moyen terme son usage dans les pressings et la profession a commencé à prendre les devants.
Les procédés n'utilisant pas le perchlo sont multiples mais les plus utilisés, selon l'Ineris (Institut national de l'environnement industriel et des risques), sont ceux à base de solvants combustibles (hydrocarbures ou siloxanes), moins toxiques et moins volatils que le PCE, et l'aquanettoyage.
Au pressing no 1, cela fait huit ans qu'on se sert exclusivement de l'aquanettoyage - on dit aussi nettoyage "au mouillé" ou "wetcleaning" - qui n'utilise pas de solvant mais de l'eau et des détergents biodégradables. Le procédé convient pour une grande majorité des tissus, à l'exclusion des plus fragiles.
Marie-Antoinette Vegnant, la propriétaire, a travaillé pendant 40 ans dans des entreprises où l'on utilisait le perchlo, et se souvient de "nausées, maux de tête".
"comme à la main"
Ici, une chaleur humide mais pas d'odeur. Son mari Marc montre la grosse machine à laver Electrolux qui peut fonctionner avec plusieurs dizaines de programmes différents, en jouant sur divers paramètres: accélération du tambour, niveau d'eau, quantité de produits, apprêt éventuel pour faciliter le repassage ou favoriser le gonflant... Chaque type de vêtement a son programme.
La machine fait tourner le linge sur lui-même dans une eau à 30 degrés, délicatement, dans un sens puis dans l'autre, "comme à la main", dit M. Vegnant. Après passage en machine, les vêtements finissent de sécher sur des cintres ou des mannequins.
La machine est amortie en 7 à 10 ans et des collectivités locales fournissent des aides. Le système est plus coûteux en temps puisqu'il y a, selon Marc Vegnant, "20% de finitions en plus" avec un pré-détachage dans 10% des cas et un traitement post-lavage. "C'est un processus de qualité, pas pour les discounts", dit-il, affirmant cependant afficher des prix équivalents à ceux des pressings traditionnels.
"On peut imaginer que les vêtements sont mieux traités et que cela allonge la vie du textile", note Jacky Bonnemains, président de l'ONG Robin des Bois, qui se dit "plutôt pour".
Un autre mode de nettoyage sans perchlo, de plus en plus répandu, est le D5 (décaméthylcyclopentasiloxane), un solvant à base de silicone liquide inodore, exclusivité des pressings Sequoia en France. Le D5 est faiblement volatil mais inflammable, comme les autres solvants combustibles. Ces techniques doivent donc "être utilisées dans des conditions assurant la maîtrise des risques incendie et explosion", souligne l'Ineris.
N'utilisant pas de solvants, l'exploitant d'un pressing à aquanettoyage n'a pas besoin d'une déclaration en préfecture. "On est considéré comme des laveries automatiques", dit Marc Vegnant. Certains pressings se targuent d'être "naturels" ou "écologiques"? "100% écologique, c'est impossible, il y a toujours une utilisation de produits chimiques", dit-il. Chez Sequoia, on parle de pressings "éco-responsables".