Maine-et-Loire : Pourquoi l’installation retoquée d’une ferme bio suscite la colère
AGRICUltURE•Il y a quelques jours, l’agrandissement de fermes existantes a été préféré à un projet d’installation de jeunes agriculteurs bio, près d’Angers. Une décision qui ne passe pas, alors que le renouvellement des générations est une question centraleJulie Urbach
L'essentiel
- Quatre jeunes agriculteurs s’étaient portés candidats à la reprise d’une ferme de 170 hectares à Denée (Maine-et-Loire), où ils souhaitaient s’installer en bio. Un projet retoqué au profit de l’agrandissement de fermes existantes.
- Une décision qui suscite l’incompréhension et la colère d’une partie du monde agricole et de la population, dans une région où les candidats à la reprise manquent.
La décision ne passe toujours pas. Ce jeudi midi, plusieurs centaines d’agriculteurs, membres d’associations environnementales, ou simples « citoyens pacifistes » sont venus manifester leur mécontentement devant la préfecture du Maine-et-Loire à Angers. Leur objectif : montrer leur désaccord avec la Safer, la société d’aménagement foncier et d’établissement rural des Pays-de-la-Loire, chargée d’arbitrer sur l’attribution des terres agricoles. Une occupation surprise de son siège a d’ailleurs été organisée par les manifestants.
Il y a quelques jours, cette instance a préféré un projet d’agrandissement de fermes conventionnelles d’exploitants des alentours à l’arrivée de quatre jeunes agriculteurs, qui portaient un projet d’installation en agriculture bio. Depuis, une partie du monde agricole, et notamment les partisans d’une agriculture paysanne, s’indigne de cette décision, qui concerne la cession d’une ferme de 170 hectares à Denée.
Le renouvellement des générations, « un sujet majeur »
Il faut dire que le projet retoqué, qui comprenait une activité de maraîchage, de production de céréales afin de fabriquer du pain, et un élevage bovin, avait beaucoup fait parler de lui, après avoir réussi à lever plusieurs centaines de milliers d’euros, grâce à une belle mobilisation locale. « Nous demandons que cette décision scandaleuse soit réexaminée dans les plus brefs délais », indiquent les Soulèvements de la Terre, parmi les soutiens.
Certains élus, eux aussi, sont dans l’incompréhension. « Le renouvellement des générations est un sujet majeur qui est au cœur de nos préoccupations », s’inquiète Céline Véron, conseillère régionale d’opposition du Maine-et-Loire, qui estime que la décision de la Safer « va à l’encontre de toutes les actions menées en ce sens. » Son groupe politique, le Printemps des Pays-de-la-Loire, a d’ailleurs demandé à la présidente de région (DVD) Christelle Morançais d’agir sur le dossier.
L’avenir de l’agriculture, « des fermes de plus de 200 ha » ?
Car cette affaire aurait aussi un volet politique. C’est en tout cas l’avis de la Confédération paysanne, qui y voit « la mainmise, évidente et écrasante, de la FNSEA sur le Conseil d’administration de la Safer des Pays-de-la-Loire ». Un aspect évoqué par les porteurs de projet dans une lettre ouverte, publiée sur les réseaux sociaux mercredi. Ils rejettent aussi l’argument selon lequel leur projet de ne serait « pas assez mûr ».
S’adressant directement aux membres du conseil d’administration de la Safer, ils écrivent : « Vous ne croyez pas à des territoires vivants. […] Assumez que vous pensez que l’avenir de l’agriculture passe par des fermes de plus de 200 ha avec des capitaux de plus d’un million d’euros. Cessez de dire que la transmission en élevage est la première des problématiques du monde agricole quand vous dénigrez des solutions répondant à ce problème. »
En Pays-de-la-Loire, comme dans le reste des régions françaises, environ la moitié des exploitants agricoles seront retraités d’ici à dix ans. Sur les dix dernières années, 36 % d’exploitations agricoles ont disparu.
À lire aussi