révélationsDes centaines de personnes « gênantes pour l’industrie agrochimique » fichées

Des centaines de personnes « gênantes pour l’industrie agrochimique » ont été fichées, révèlent des médias

révélationsDes données parfois sensibles figuraient dans cette base, selon les informations de plusieurs médias
Quelque 500 scientifiques et militants critiques de l'industrie agrochimique ont été fichés dans une base de données, révèlent plusieurs médias.
Quelque 500 scientifiques et militants critiques de l'industrie agrochimique ont été fichés dans une base de données, révèlent plusieurs médias. - Utrecht Robin/action pres/SIPA
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

Adresses personnelles, « rumeurs malveillantes », vie privée : quelque 500 scientifiques et militants critiques de l’industrie agrochimique ont été fichés dans une base de données pour « contrer l’opposition aux pesticides », révèlent vendredi plusieurs médias, rappelant le scandale des fichiers Monsanto.

Des documents internes d’une plateforme privée baptisée Bonus Eventus ont été obtenus par le média d’investigation Lighthouse Reports et partagés avec plusieurs médias internationaux, dont Le Monde en France.

A travers cette plateforme mise en place par la société de communication et d’affaires publiques v-Fluence, « des cadres des principaux fabricants de pesticides et des biotechnologies ont accès, depuis plusieurs années, à un vaste fichier de personnalités considérées comme " critiques " de l’agriculture intensive, qui a massivement recours aux intrants chimiques et aux organismes génétiquement modifiés » (OGM), explique le quotidien français.

Le président de v-Fluence dénonce « des mensonges fabriqués de toutes pièces »

Si « on ignore l’étendue des usages, privés ou publics, qui peuvent être faits de ces informations », « la nature des informations collectées laisse peu de doute sur la volonté de discréditer les cibles ou de les déstabiliser en mettant à disposition des membres de Bonus Eventus un arsenal d’arguments ou d’informations parfois sensibles », ajoute Le Monde.

Contacté, le président de v-Fluence, l’ex-directeur de la communication de Monsanto Jay Byrne, a déclaré à l’AFP que « les affirmations de l’ONG Lighthouse et d’autres groupes avec lesquels elle collabore sont basées sur des représentations grossièrement trompeuses, des erreurs factuelles concernant notre travail et nos clients, et des mensonges fabriqués de toutes pièces ».

Dans sa réponse à Lighthouse, partagée avec l’AFP, Jay Byrne indique que les informations que partage v-Fluence avec ses clients sont « disponibles publiquement » et représentent « tous les points de vue ».

Selon Lighthouse Reports, v-Fluence a obtenu entre 2013 et 2019 « plus de 400.000 dollars » du gouvernement américain (à travers notamment l’agence pour le développement USAID) « dans le cadre de son programme de promotion des OGM en Afrique et Asie ».

Jay Byrne a affirmé à Lighthouse que v-Fluence « ne travaill (ait) pas pour USAID » et « n’a et n’avait pas de contrat » avec l’organisation.

La pratique de collecte d’informations sur des opposants à l’industrie agrochimique rappelle le scandale du fichage de personnalités publiques, journalistes et militants par Monsanto dans le but d’influencer le débat public sur l’interdiction de l’herbicide glyphosate.

L’agrochimiste, racheté par le groupe allemand Bayer, a écopé en juillet 2021 d’une amende de 400.000 euros prononcée par la Cnil, gendarme français des données personnelles. Selon ce dernier, le fichier incriminé contenait pour chacune des plus de 200 personnalités référencées une « note allant de 1 à 5 » permettant « d’évaluer son influence, sa crédibilité et son soutien à la société Monsanto sur divers sujets tels que les pesticides ou les organismes génétiquement modifiés ».

L’affaire, révélée par Le Monde et la chaîne de télévision France 2, s’était rapidement étendue à l’Europe. Des listes de personnalités (politiques, scientifiques, journalistes) existaient dans au moins six autres pays (Allemagne, Italie, Pays-Bas, Pologne, Espagne, Royaume-Uni) et pour les institutions européennes, avait indiqué Bayer, soit près de 1.500 personnes au total.