On aurait bien aimé être en face de ces monstres d’acier de 200 m de haut plantés en pleine mer. Mais les conditions météo, avec une forte houle et des creux de près de deux mètres, ont rendu la visite du parc éolien implanté en baie de Saint-Brieuc (Côtes-d’Armor) impossible. « Sur les chantiers offshore, il y a énormément de contraintes liées à la météo, aux vagues, au vent. Et il y a beaucoup de vent ici, c’est d’ailleurs ce qu’on est venu chercher », indique Stéphane Alain-Riou, directeur offshore d’Iberdrola France.

Après un appel d’offres lancé par l’État, c’est ce géant espagnol de l’énergie qui avait remporté la mise un an plus tard pour construire ce parc de 62 éoliennes situé à seize kilomètres des côtes bretonnes. Plus d’une décennie plus tard, marquée par de nombreuses protestations et recours juridiques, les turbines du parc, officiellement inauguré ce jeudi, ont enfin commencé à tourner et à produire de l’électricité. « Le parc a été mis en service en 2023 et tourne à plein régime depuis mai », souligne Stéphane Alain-Riou, parlant d’un « exploit technologique » pour construire ce parc qui aura coûté la rondelette somme de 2,4 milliards d’euros au groupe espagnol.

La consommation électrique de 835.000 Bretons

Visibles depuis les côtes bretonnes par beau temps, les 62 éoliennes de la baie de Saint-Brieuc sont les plus puissantes installées en mer en France, plus balèzes encore que celles de Saint-Nazaire et de Fécamp, les deux autres parcs offshore déjà en service. D’une puissance de 8 mégawatts chacune, elles offrent au parc breton une capacité totale de 496 mégawatts. Un chiffre un peu abstrait sur le papier mais qui va clairement changer la donne en Bretagne, puisque cela représente la consommation électrique annuelle de 835.000 habitants (chauffage compris), soit 9 % de la consommation électrique totale de la région.

Longtemps à la traîne et fortement dépendante puisqu’elle ne produisait, il y a peu encore, que 15 % de sa consommation électrique, la Bretagne s’apprête donc, avec le parc éolien de la baie de Saint-Brieuc, à faire un bond pour atteindre les 25 %. « On participe au désenclavement de la région avec une énergie renouvelable produite et consommée localement », se félicite Emmanuel Rollin, directeur général d’Iberdrola France, estimant aussi que « les engagements ont été tenus » en ce qui concerne la pêche.

La pêche a repris dans la zone du parc éolien

Craignant pour la ressource, et donc leur gagne-pain, les pêcheurs bretons ont pendant un temps été les plus vifs opposants au projet, menant même des actions sur la zone de chantier au printemps 2021. Déboutés par la justice, ils ont depuis obtenu des compensations financières de la part d’Iberdrola.

Depuis juillet, ils peuvent de nouveau pêcher dans le parc au milieu des éoliennes, avec interdiction toutefois de s’approcher des éoliennes dans un rayon de 50 mètres. « Dès le départ, on voulait que les usages en mer reprennent, ce parc montre donc que la cohabitation est possible », estime Marie Thabard, directrice du développement offshore d’Iberdrola France.