Ecosse : A Scapa Flow, plongée « mythique » dans les épaves de bateaux de guerre sabordés par les Allemands
20 Minutes sous les mers•Au nord de l’Ecosse, ce spot de plongée réputé difficile offre une visite improbable d’un cimetière de bateaux datant de la Première Guerre mondialeCamille Allain
L'essentiel
- Tout au nord de l’Ecosse, le site de Scapa Flow est devenu un paradis pour les plongeurs confirmés, qui trouvent plusieurs épaves immenses dans des eaux peu profondes.
- C’est dans cette baie qu’un gradé allemand avait sabordé 74 navires de sa flotte en 1919, dans le but de ne pas les remettre à l’ennemi.
- Les Britanniques ont renfloué bon nombre de navires, mais il en reste sept en très bon état, conservés par les eaux froides.
Ce samedi 8 juin, c’est la journée des océans. A cette occasion, 20 Minutes vous propose une série d’articles, de vidéos, de reportages, etc. intitulée « 20 Minutes sous la mer ». Aujourd’hui, nous vous proposons une plongée dans les eaux froides du nord de l’Ecosse pour découvrir un cimetière marin hors du commun. Let’s go to Scapa Flow.
C’est d’abord un énorme problème de communication. Un truc qui ne se serait jamais produit à l’heure du smartphone et de l’hyper-connexion que nous connaissons. Pour bien comprendre l’histoire du sanctuaire de Scapa Flow, il faut d’abord se remettre dans le contexte historique. Nous sommes en 1919 et la Première Guerre mondiale est terminée. A ce moment de l’histoire, les pays engagés dans ce conflit sanglant qui a fait 10 millions de morts n’ont toujours pas signé le traité de Versailles définissant les conditions de paix entre l’Allemagne et les Alliés. Tout en haut de l’Écosse, le contre-amiral allemand von Reuter est encerclé par les troupes britanniques, qui le privent d’informations.
Ignorant s’il doit remettre ses bateaux aux Alliés ou non, le gradé allemand décide de saborder sa flotte et demande à ses hommes de couler l’ensemble des 74 navires de la flotte le 21 juin, date limite qui lui avait été fixée. Son seul objectif : éviter que les bateaux ne soient légués à l’ennemi. Problème : la date butoir avait été reculée, mais personne n’avait jugé bon de l’en informer. Sans le savoir, von Reuter venait d’écrire la légende de Scapa Flow en devenant le plus grand naufrage délibéré de l’histoire. Et de créer l’un des spots de plongée les plus reconnus en Europe.
Quand elle a enfilé sa combinaison étanche, obligatoire dans des eaux aussi froides, Florine ne savait pas à quoi à s’attendre. Derrière son masque, la jeune Française a pourtant été saisie lorsqu’elle s’est glissée sous la surface de l’archipel des Orcades, à 500 kilomètres au nord d’Édimbourg. « Plonger au milieu de ces épaves, ce n’est pas comme visiter un musée. Quand on voit ces bateaux qui sont là depuis cent ans, on prend la réalité de la guerre en pleine face », explique la plongeuse française. Cette dernière a d’ailleurs retenu Scapa Flow dans son guide Plongée autour du monde publié l’an dernier par Lonely Planet. « Ce sont les épaves anciennes les mieux conservées car ici, les bateaux sont entiers. Pour moi, Scapa Flow, c’est mythique », explique celle qui tient le blog World Adventure Divers.
Florine, comme tous les adeptes de plongée, a pu découvrir les sept imposantes épaves qui restent au fond de la baie fermée. Car si le vice-amiral allemand a bien demandé à couler ses 74 bateaux, les Anglais ne sont pas restés à le regarder. Vingt-deux navires avaient pu être sauvés par les gardes britanniques et plusieurs épaves avaient par la suite été renflouées pour en récupérer la ferraille. « Ça reste une destination de plongée incroyable. Pour moi, c’est l’un des meilleurs sites de plongée du Royaume-Uni. L’atmosphère et l’histoire qui vous entourent sous l’eau et les magnifiques paysages au-dessus de l’eau sont fantastiques », témoigne Hazel, capitaine du MV Valhalla, qui organise des excursions à Scapa Flow.
La femme qui tient ce discours est Écossaise et donc habituée à plonger dans les eaux froides du nord de son pays. Mais pour les autres ? « Franchement, il faudrait me payer pour que j’y aille », rigole Sylvie, qui œuvre au sein de l’agence spécialisée C6Bo, à Toulouse. « Les gens qui nous demandent d’aller à Scapa Flow, ils savent déjà tout de la destination. Ce ne sont que des connaisseurs. Et franchement, ça ne se bouscule pas au portillon. » Hazel assure pourtant qu’avec une combinaison étanche, la plongée se fait très bien. « Ce n’est pas si compliqué. Il y a des épaves à moins de 20 mètres de fond. Ça n’a rien d’effrayant », assure la guide.
Nager à l’intérieur des épaves
Une zone reste cependant interdite aux plongeurs. Il s’agit d’un sanctuaire militaire où se trouve un navire britannique coulé par U Boat allemand, pendant la Seconde Guerre mondiale. Le sous-marin avait réussi la prouesse de s’introduire dans cet archipel et d’en ressortir après avoir torpillé le HMS Royal Oak et ses 833 membres d’équipage.
Notre dossier 20 Minutes sous la merLe site est de toute façon réservé à un public averti. « C’est sûr que ce n’est pas comme une plongée à Bali », glisse Florine, qui séjourne actuellement sur l’île indonésienne. « L’eau est un peu laiteuse et la visibilité ne dépasse pas 10 mètres. Donc il vaut mieux ne pas perdre son guide. » L’avantage d’une eau froide, c’est aussi qu’elle conserve mieux les épaves, qui s’abîment beaucoup moins vite que dans les eaux chaudes. La récompense est en plus à la hauteur du sacrifice. A Scapa Flow, les plus téméraires peuvent pénétrer à l’intérieur même des épaves des cuirassés de plus de 150 m de long. Précieux.
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