TotalEnergies visé par une plainte au pénal pour des projets pétroliers en Tanzanie et en Ouganda
JUSTICE•Une première plainte au civil avait été déboutée en février dernier20 Minutes avec agences
TotalEnergies est de nouveau accusé de « climaticide ». Quatre associations de défense de l’environnement ont déposé plainte contre le groupe en Tanzanie et en Ouganda pour dénoncer son projet pétrolier EACOP, a-t-on appris ce lundi.
La plainte a été déposée le 22 septembre par Darwin Climax Coalitions, Sea Shepherd France, Wild Legal et Stop EACOP-Stop Total, révélait Le Monde ce lundi. Sollicité par l’AFP, le parquet de Nanterre a indiqué que cette plainte faisait « l’objet d’un examen attentif ».
Une plainte « inédite » au pénal
En plein « effondrement climatique », TotalEnergies « ne doit plus continuer à alimenter sciemment, librement et impunément le dérèglement climatique », ont déclaré les avocats des associations, qualifiant la plainte d'« inédite » car convoquant le groupe devant un juge pénal. « Il est temps que l’entreprise soit tenue responsable de ses activités. »
La plainte vise plusieurs infractions : abstention de combattre un sinistre, atteintes involontaires à l’intégrité de la personne, destruction, dégradation ou détérioration d’un bien appartenant à autrui de nature à créer un danger pour les personnes, et homicide involontaire. TotalEnergies « n’a pas connaissance de cette plainte et ne sait pas ce qu’elle vise », a réagi l’entreprise.
Un écosystème fragile menacé
En 2022, TotalEnergies avait annoncé un accord d’investissement de 10 milliards de dollars avec l’Ouganda, la Tanzanie et la compagnie chinoise CNOOC. Le projet comprenait notamment la construction d’un oléoduc chauffé (EACOP) de 1.443 km reliant les gisements du lac Albert (Ouganda) à la côte tanzanienne sur l’océan Indien.
Le groupe prévoit le forage de près de 400 puits de pétrole dans le parc naturel des Murchison Falls, les chutes du Nil blanc, remarquable réserve de biodiversité et plus grand parc national d’Ouganda. Le projet est dénoncé par des militants et groupes de défense de l’environnement qui estiment qu’il menace le fragile écosystème de la région et les populations qui y vivent.
Des projets incompatibles avec l’accord de Paris
Début juillet, Human Rights Watch a demandé l’arrêt du projet, estimant qu’il avait déjà « dévasté les moyens de subsistance de milliers de personnes ». Pour les associations ayant porté plainte, le projet entraînerait « d’importants déplacements de populations », « un appauvrissement majeur des populations locales » et aurait un impact majeur sur « de nombreuses zones naturelles ».
TotalEnergies avait déjà été assigné en justice en octobre 2019 par Les Amis de la Terre, Survie et quatre ONG ougandaises, qui reprochaient au groupe de mener le projet EACOP/Tilenga au mépris des droits humains et de l’environnement. Les associations ont été déboutées en février 2023 par le tribunal de Paris, qui leur reprochait en creux de ne pas avoir suffisamment exploré la voie du dialogue avec le géant pétrolier avant de saisir la justice.
Les avocats des associations ont rappelé que selon l’Agence internationale de l’énergie, pour respecter l’accord de Paris sur le climat, il fallait « renoncer immédiatement à tout nouveau projet pétrolier ». Or TotalEnergies est l’entreprise pétrolière privée « qui a approuvé le plus de nouveaux projets pétroliers » pour la période 2022 à 2025.