biodiversitéUne liste rouge des espèces menacées « avant qu’il ne soit trop tard »

Grand-Est : Une liste rouge des espèces menacées « avant qu’il ne soit trop tard »

biodiversitéDans le Grand-Est, une liste rouge des espèces menacées est dressée par l’Office des données naturalistes (Odonat) et les résultats ne sont pas encourageants pour la biodiversité
Gilles Varela

Gilles Varela

L'essentiel

  • Dans le Grand-Est, une liste rouge des espèces menacées est dressée par l’Office des données naturalistes (Odonat) et les résultats ne sont pas encourageants pour la biodiversité.
  • A cette date, l’Odonat Grand-Est a listé quatre premiers groupes. Il s’agit des mollusques continentaux, des libellules, des amphibiens et enfin des reptiles. D’autres listes rouges vont être publiées prochainement.
  • « Sur les 320 espèces décrites et évaluées, plus de 15 % d’entre elles sont classées en listes rouges », déplore l’Odonat.

On n’y pense pas toujours, mais au détour d’un sentier, aux abords d’une mare, à la lisière d’une forêt, la faune rencontrée est bien souvent en danger, voire pour certaines espèces carrément menacées de disparition quand ce n’est déjà le cas. Si dans le Grand-Est, le Linx boréal, Grand Hamster, la loutre d’Europe viennent tout de suite à l’esprit, de très nombreuses autres espèces, bien plus discrètes sont également menacées comme les Rainettes, des libellules, certains papillons, reptiles ou bien encore des mollusques… la liste rouge des espèces menacées est malheureusement longue.

Dans le Grand-Est, cette liste est dressée par l’Office des données naturalistes (Odonat). Lancée avec le soutien de la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal Grand-Est), elle est établie selon les critères internationaux très précis de l’UICN et validée également par le Conseil Scientifique Régional du Patrimoine Naturel (CSRPN). Ces deux derniers étant garants de la méthodologie scientifique utilisée, précise Raynald Moratin, responsable scientifique à l’Odonat Grand-Est.

Une liste, surtout un inventaire réalisé avec un vaste réseau d’experts. Pour l’heure, l’Odonat a listé quatre premiers groupes. Il s’agit des mollusques continentaux (escargots, limaces, moules), des libellules, des amphibiens (grenouilles, crapauds, tritons) et enfin des reptiles. Pour cela, plus de 40 experts naturalistes ont été mobilisés ainsi que des dizaines de structures (associations de protection de la nature, collectivités territoriales, experts indépendants, services de l’Etat et établissements publics, bureaux d’étude privés) et ont mis à disposition leurs connaissances de la biodiversité locale.

Menacées mais pas forcément protégées

Résultat ? Un triste constat. « Un cri d’alarme » en faveur de la biodiversité avec la nécessité de classifier pour mieux « définir les priorités d’action et appuyer les politiques et les stratégies de conservation de la nature », explique l’Odonat. Des résultats qui, s’ils s’adressent à tous et sont consultables sur le site de l’Odonat Grand-Est, sont surtout et en priorité destinés aux élus et gestionnaires, aux acteurs environnementaux, en leur « proposant un outil d’aide à la décision pour guider les politiques régionales de protection de la biodiversité », souligne l’Odonat. Avec le secret espoir aussi que « les mesures de protection, qui aujourd’hui sont très orientées sur les espèces protégées », prennent un peu plus en compte les espèces "seulement" menacées. « Parfois, on fait beaucoup d’efforts pour une espèce protégée mais qui n’est finalement n’est pas menacée, relève Raynald Moratin, alors même que pour un papillon qui n’est pas protégé mais qui est lui est au bord de l’extinction, on n’en à rien à faire, confie le scientifique. On espère bien que systématiquement, la prise en compte des espèces les plus menacées de ces listes soient intégrées à toute réflexion et actions avant qu’il ne soit trop tard. »

D’autres listes rouges attendues

Mais à ce stade, la tâche est grande. Seuls quatre premiers grands groupes ont été listés. « Sur les 320 espèces décrites et évaluées, plus de 15 % d’entre elles sont classées en listes rouges », déplore l’Odonat. Une « situation préoccupante » qui s’explique en partie à la destruction des habitats naturels, en particulier des espèces qui ne peuvent se développer que dans certains milieux précis. Mais aussi le comblement de mares, la simplification des berges des cours d’eau, la disparition de prairies humides, etc., liste l’Odonat. Ou bien encore l’augmentation des espèces exotiques envahissantes et bien sûr le changement climatique (assèchement de cours d’eau temporaires, prélèvements excessifs dans les nappes, etc.) et enfin la pollution et dégradation de la qualité de l’eau.

Un triste constat mais des solutions. « Pour assurer la préservation des espèces, relève les spécialistes, de nombreux leviers existent : des outils de protection des habitats ou bien encore des programmes de conservation dédiés aux espèces les plus patrimoniales qui méritent d’être renforcés et étendus », assure l’Odonat.

NOTRE DOSSIER BIODIVERSITE

Le projet des listes rouges s’échelonne sur plusieurs années (2020‐2026), avec des diffusions progressives des résultats. Sont d’ailleurs prochainement prévues celles des orthoptères d’Alsace (sauterelles grillons, criquets), deux listes rouges concernant les oiseaux nicheurs et hivernants, les poissons. Puis l’année prochaine les mammifères. Il y a de quoi faire.