Dans l’Ain, les pisciculteurs face à la sécheresse et aux étangs « sacrifiés »

Sécheresse dans l’Ain : Les pisciculteurs évoquent « du jamais vu » et des étangs « sacrifiés »

À SECLa filière de la Dombes sort 1.000 tonnes de poissons d’étang par an mais la production pourrait diminuer de moitié cette année
20 Minutes avec AFP

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Dans la zone humide de la Dombes (Ain), de l’herbe de prairie pousse au beau milieu de l’étang asséché. La sécheresse a contraint les pisciculteurs à faire des choix afin de préserver leur production, qui pourrait diminuer de moitié cette année. La filière de la Dombes produit 1.000 tonnes de poissons d’étang par an (carpes, brochets, tanches, gardons, sandres…), soit un tiers de la production française. Lors des précédentes sécheresses en 2019 et en 2020, la production avoisinait les 600 tonnes, mais cette année, la production peine à atteindre les 500 tonnes.

« A Joyeux on a eu 460 mm (de pluie) étalés en quatre mois »

Si la région a déjà connu le manque d’eau, la sécheresse qui dure depuis l’automne précédent, affecte particulièrement l’élevage des poissons. « C’est du jamais vu dans les Dombes. On a dû sacrifier certains étangs », explique Jules Blanc, conseiller au sein de l’Apped, l’Association de promotion du poisson des étangs de la Dombes qui regroupe l’interprofession, de l’exploitant aux sociétés de transformation.

Si la production de 2022 avait été bonne malgré un été chaud et sec, la situation est cette fois-ci plus compliquée. Il a fallu choisir de remplir un certain nombre d’étangs et d’en laisser d’autres à sec. « A Joyeux on a eu 460 mm (de pluie) étalés en quatre mois. Avec même zéro en octobre, et 5 mm en février », récapitule Gillian Noël, technicien piscicole polyvalent chez l’un des principaux propriétaires-exploitants de la Dombes.

Aujourd’hui six étangs sont exploitables sur les 23 disponibles

En conséquence, sur les 23 étangs du propriétaire, il a lancé la saison avec 15 étangs exploités, au lieu des 18 prévus. Mais, désormais, « il ne m’en reste plus que six » en activité, dit-il, alors que les semaines à venir s’annoncent décisives avant les pêches prévues en octobre.

Devant un deuxième étang où l’eau s’est également bien retirée, les échassiers s’avancent loin dans la vase, guettant le peu de poisson qui reste au plus profond de la mare. « Cet étang fait normalement 17-18 tonnes de poissons. Cette année, il a fait 230 kg, sur trois tonnes d’empoissonage, ne peut que constater Jules Blanc. On avait tiré des leçons. On sait que quand l’étang n’est pas bien plein, on ne passe pas l’été. On s’adapte. »

Des mesures sont prises pour gérer au mieux la sécheresse

Selon l’Apped, plusieurs mesures ont déjà été prises pour mieux gérer l’eau : entretien du réseau des fossés pour capter l’eau au maximum, optimisation de l’eau entre les chaînes d’étangs, aération des étangs pendant les périodes critiques notamment avec des aérateurs solaires, introduction d’espèces plus résistantes dans l’eau chaude, comme le black-bass, un carnassier d’Amérique du Nord, ou encore des expérimentations pour économiser l’eau comme d’organiser la pêche sans vidanger les étangs.

« Sur le court terme, on aura besoin de soutien des pouvoirs publics, sinon la filière pourrait ne pas s’en remettre », plaide Jules Blanc, s’adressant au département et à la région. « Cette année, on demande une aide supplémentaire, on en a besoin. » L’enjeu est aussi important pour la nature environnante, soulignent les pisciculteurs : la Dombes constitue la zone humide la plus importante d’Europe en matière de biodiversité.