Avec mille hectares de panneaux solaires pour 2030, la SNCF se lance dans l’énergie renouvelable
transition énergétique•Premier consommateur d’électricité en France, la SNCF est aussi le deuxième propriétaire foncier. Autant en profiter. Le groupe a identifié 1.000 hectares sur lesquels installer des centrales solaires au sol. Juste un débutFabrice Pouliquen
L'essentiel
- La SNCF annonce ce jeudi la création de SNCF renouvelables, une nouvelle filiale qui l’amène à un nouveau métier : la production d’énergie solaire.
- Le groupe a identifié dans son patrimoine foncier 1.000 hectares sur lesquels il compte installer des panneaux photovoltaïques d’ici à 2030. Ces centrales au sol pourraient représenter l’équivalent de 15 à 20 % de ses besoins actuels en électricité.
- 9.000 hectares pourraient suivre d’ici à 2050, suivant les progrès technologiques réalisés sur les panneaux solaires.
«Notre cœur de métier reste le ferroviaire », rassure Jean-Pierre Farrandou, président de la SNCF. Il n’empêche, ce jeudi, le groupe ferroviaire lance une nouvelle filiale, SNCF renouvelables, qui fera de lui un producteur d’énergie solaire.
L’annonce a été faite au siège dionysien du groupe, en présence des ministres des Transports, Clément Beaune, et de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher. Il faut dire que la création de cette filiale n’est pas anodine.
« Notre consommation d’électricité devient un sujet »
Avec ses 15.000 trains, dont plus de 80 % fonctionnent actuellement à l’électricité, et 3.000 gares, la SNFC est le premier consommateur d’électricité de France. « Neuf térawatts/heures par an, dont huit pour la traction électrique de nos trains », détaille Jean-Pierre Farrandou. Longtemps, cette consommation n’était pas un sujet. « Nous étions comme tout le monde, avec un accès à une énergie abondante et pas chère, reprend le président de la SNCF. La guerre en Ukraine est passée par là, provoquant un changement de paradigme complet. Les coûts [de consommation d’énergie] ont plus que doublé, rien qu’en 2022 et 2023. Cela représente plus 700 millions d’euros entre ces deux années rien que pour l’énergie utilisée pour la traction des trains. »
Ce n’est pas seulement un enjeu de coûts, mais aussi de souveraineté et d’approvisionnement pour la SNCF qui doit s’assurer à l’avenir de disposer de l’électricité dont elle aura besoin pour faire rouler ses trains. D’autant plus que ces besoins vont augmenter. En contrepartie du plan de 100 milliards d’euros dans le ferroviaire d’ici 2040, annoncé par Elisabeth Borne, fin février, « nous nous sommes engagés à transporter deux fois plus de personnes et de marchandises à ce même horizon », rappelle Jean-Pierre Farrandou.
Deuxième propriétaire foncier…
Ça tombe bien, si elle est le premier consommateur d’électricité en France, la SNCF est aussi le deuxième propriétaire foncier du pays… Juste derrière l’État. Son patrimoine foncier comprend notamment 12 millions de mètres carrés de bâti. Des toits de bâtiments, des parkings, des gares que la SNCF, via sa filiale Gare & Connexions, a commencé à solariser. Mais le groupe se pencher surtout ses 100.000 hectares de foncier. Là où il y a le plus de potentiel. 1.000 hectares ont déjà été identifiés qui pourraient accueillir, tout de suite, des fermes solaires. La SNCF veut les équiper d’ici 2030 pour un coût global qui avoisinerait le milliard d’euros. Les opérations doivent démarrer dès cette année sur une trentaine de sites de tailles diverses et dans toutes les régions françaises, avec le Grand-Est identifié comme « un grand pourvoyeur de parcelles ».
Avec ces 1.000 premiers hectares, la SNCF vise une capacité de puissance installée de 1.000 mégawatts-crête (Mwc) et une production qui pourrait représenter 15 à 20 % de ses besoins actuels en électricité. « C’est l’équivalent d’un gros réacteur nucléaire, compare Jean-Pierre Farrandou. On deviendrait un acteur significatif de la production d’énergie en France. »
Les clients gagnants également ?
Cette énergie produite par la SNCF ne sera pas intégralement auto-consommée. « Nous avons des consommations atypiques, avec des besoins très importants de courants le matin notamment, lorsqu’on met en route nos trains, explique Jean-Pierre Farrandou. Nos panneaux solaires ne suffiront pas à combler ses besoins. Il nous faudra donc continuer à acheter de l’énergie. » Mais le groupe ferroviaire espère aussi le cas inverse : produire, à certains moments de la journée ou de l’année, plus d’électricité qu’il en a besoin. La SNCF sera alors en position de vendre, ce qu’elle pourra pas stocker… « Les gains financiers générés permettront de soutenir les programmes de travaux nécessaires à l’entretien et à la modernisation des infrastructures ferroviaires », précise la SNCF dans un communiqué.
Faut-il espérer aussi des retombées positives sur les billets ? « Ce qui est certain est que ces 15 à 20 % d’énergie que nous allons produire nous permettront de mieux maîtriser nos coûts d’énergie et, de facto, les coûts des billets », répond Jean-Pierre Farrandou.
En attendant des fermes solaires le long des voies
Quoi qu’il en soit, ces 1.000 hectares ne sont qu’une première étape pour le président de la SNCF, qui mise sur les innovations à venir dans l’industrie solaire pour agrandir le parc. « Pour l’instant, la technologie ne permet de faire que des fermes solaires carrées, compacts, poursuit-il. Nous attendons alors la mise au point de panneaux linéaires, tout au long, que les industriels du secteur nous disent être capables de sortir d’ici à 2030. On pourrait alors voir plus grand encore et installer des panneaux photovoltaïques le long des voies notamment. »
Au final, la SNCF a identifié un gisement total de 10.000 hectares qui pourraient accueillir, d’ici 2050, des fermes solaires. « Cela nous permettrait alors de viser l’autosuffisance », assure Jean-Pierre Farrandou.
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