Océan Indien : Les manchots royaux de Crozet sont menacés par le réchauffement climatique
ANIMAUX•La reproduction, l’incubation et le nourrissage des bébés manchots sont basés sur un équilibre fragile20 Minutes avec agences
Chaque année, des milliers de manchots royaux se pressent sur la Baie des marins, sur l’île de la Possession à Crozet. Les animaux se retrouvent pour la saison de la reproduction sur ce territoire des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF), dans l’océan Indien. L’espèce est reconnaissable à ses plumes blanches et noires relevées d’une pointe de jaune.
Entre la fin du XIXe siècle et la première moitié du XXe, l’espèce a été massacrée par les chasseurs de phoques qui se servaient de leur graisse comme carburant. Si sa population a depuis augmenté à nouveau, elle est désormais menacée par le réchauffement climatique.
Une reproduction liée au « front polaire »
« L’espèce n’est pas passée très loin de l’extinction » et fait face à un nouveau danger, témoigne Robin Cristofari, manchologue finlandais. Le manchot royal passe sa vie en mer et ne revient sur terre que pour pondre. Il lui faut un endroit sec mais à distance raisonnable du front polaire, où il va se nourrir de plancton et de poisson.
Le front polaire, où se rencontrent les eaux chaudes et froides de l’océan Indien, se trouve en janvier à 350 km au sud de Crozet. Les années les plus chaudes, il peut se trouver jusqu’à 750 km, trop loin pour aller se nourrir et revenir à temps pour relayer le partenaire et nourrir l’oisillon. « Le succès de la reproduction est indexé sur la distance du front polaire », résume Robin Cristofari.
Un cycle de reproduction perturbé par la chaleur
Avec le changement climatique, le front polaire dérive vers le sud. A terme, Crozet pourrait devenir inhabitable pour les manchots royaux qui devront se déplacer vers d’autres îles plus au sud. Sur plus d’un million de couples dans le monde, 500.000 s’accouplent aux îles Crozet et 300.000 aux îles Kerguelen, à 1.400 km plus à l’est. Les spécialistes ne sont pas inquiets pour l’espèce à court terme mais pour son mode de vie.
Un manchot, qui vit environ 25 ans, n’a son premier poussin que vers 6 ou 7 ans. Les mâles et les femelles se partagent le travail à 50-50 et se passent l’œuf à couver. Dans un cycle classique, ils arrivent début novembre à Crozet, se rencontrent et s’accouplent. La femelle va pondre et donner son œuf au mâle et partir en mer pour se nourrir. Pendant les 50 jours d’incubation, ils font de la « garde alternée » puis, après l’éclosion, ils laissent le petit seul pour aller se nourrir.
Les poussins sont bien nourris jusqu’en mai puis jeûnent pendant l’hiver austral. Les parents viennent les nourrir de temps en temps mais ne recommenceront à leur donner à manger que le printemps revenu. « Le cycle est calé pour que ce soit le plus facile pour le poussin de commencer à se nourrir seul, idéalement pendant le pic de l’été », explique le manchologue. C’est tout ce processus qui pourrait ainsi être perturbé par le réchauffement climatique.
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