Pyrénées : Comment une nouvelle eau minérale puisée en Ariège veut faire un carton avec ses briques
RETOUR AUX SOURCES•A l’heure où près de la moitié des bouteilles en plastique ne sont pas recyclées, la Compagnie des Pyrénées, dans son usine écolo et perchée de Haute-Ariège, fait le pari de l’eau minérale en briqueHélène Ménal
L'essentiel
- Une nouvelle eau minérale fait son entrée sur le marché français. Celle de la Compagnie des Pyrénées qui a ouvert son usine « verte » dans le petit village de Mérens-les-Vals en Haute-Ariège.
- Le défi est de ramener de l’emploi industriel dans la montagne sans la dénaturer.
- Pour cela, l’entreprise fait le pari inédit de l’eau en brique, dans des emballages en carton, 100 % recyclables.
«Vingt-cinq emplois, dont six villageois, pour une commune de 172 habitants, c’est déjà beaucoup. » Plus durable en tout cas que les emplois saisonniers du camping situé au carrefour de bucoliques chemins de randonnée. Jean-Pierre Sicre, le maire de Mérens-les-Vals, en Haute-Ariège, ne cache pas son « bonheur » de voir les sempiternelles granges abandonnées remplacées par une usine d’embouteillage de 6.000 m2. Ou d’encartonnage devrait-on dire.
C’est là que la Compagnie des Pyrénées a sorti le 6 avril dernier, avec un an de retard sur les plans pour cause de crise sanitaire, sa première gourde d’eau minérale en brique. Avec son bouchon en dérivé de canne à sucre et son emballage en carton 100 % recyclable propre à décomplexer les buveurs d’eau pris de vertige quand ils tombent sur un reportage pointant les continents de plastique
L’Eau Neuve (ou Ô9, allusion au département de l’Ariège) est conditionnée dans un bâtiment qui a tout de l’usine idéale, dont c’est assez rare, même les défenseurs de l’environnement se félicitent : elle puise son énergie dans le barrage hydroélectrique tout proche, recycle ses déchets dans un cercle vertueux, choisit ses sous-traitants « dans un rayon de 30 kilomètres » autour de Mérens, et emploie, zone de montagne oblige, déjà deux couples, « bientôt trois ».
Ne pas tarir la source
« Nous avons dessiné ce projet comme un projet de société et pas juste comme une affaire », assure Damien Chalret du Rieu, cofondateur de la Compagnie des Pyrénées et originaire la vallée d’Aure, dans les Hautes-Pyrénées. Après la finance, le business de l’Internet à Paris, l’homme qui a « toujours voulu vivre et travailler au pays » s’attaque à d’autres sommets. A un El Dorado plus naturel, persuadé qu’il est avec son complice en affaires Sébastien Crussol, que « l’eau est le premier trésor des Pyrénées ». Et qu’ils ont obtenu avec cette concession de 60 ans, d’une eau au PH parfaitement neutre, « un grand cru ». Les entrepreneurs le promettent, jamais ils ne puiseront plus de 15 % de l’eau que donne leur source perchée à plus de 2000 mètres.
La Compagnie des Pyrénées prévoit de sortir 30 millions de bouteilles cette année, des gourdes de 33 et 50 cl en carton, mais aussi des petites bouteilles « moches » en plastique recyclé ou encore sa plus prestigieuse bouteille d’eau pétillante en verre pour les restaurants de la région. Damien Chalret du Rieu reconnaît que l’usine travaille « à flux tendu » à mettre en rayon ces gourdes, qui rappellent du lait ou du jus de fruit, dans les Franprix de Paris et Lyon, les Carrefour Market de Saint-Michel ou Compans dans la Ville rose et les Intermarché de la région.
L’objectif est de créer une quarantaine d’emplois à terme et d’amener de l’eau au moulin du localisme. « Le bois, la pierre, les Pyrénées ont bien d’autres trésors, naturels et non-délocalisables », glisse le patron montagnard. Pas sûr qu’il ne tourne qu’à l’eau dans l’avenir.