Monaco lance un appel à la mobilisation pour sauver la grande nacre
ESPECE MENACEE•Des campagnes d’observation vont être menées pour essayer de retrouver ces coquillages décimés par un parasiteFabien Binacchi
L'essentiel
- En 2016, une épizootie s’est déclarée sur les côtes espagnoles et s’est rapidement propagée sur le pourtour méditerranéen, décimant progressivement toutes les populations de grandes nacres.
- La Principauté n’a pas été épargnée, l’épizootie frappant cette espèce dans les eaux monégasques à la fin de l’année 2018.
- Policiers, pompiers, carabiniers et clubs de plongée vont être mis à contribution pour faire des observations de spécimens juvéniles.
Il y a quelques années, l’Office des timbres de la Principauté de Monaco avait choisi « une Pinna nobilis, espèce vulnérable et protégée, largement présente » dans la réserve sous-marine du Larvotto, pour l’une de ses créations. Le timbre est toujours disponible mais la grande nacre de Méditerranée, elle, est désormais aux abonnés absents. La disparition de ce coquillage, le deuxième plus grand au monde, décimé par un parasite, ne s’est pas arrêtée aux frontières des eaux françaises et monégasques. Touchée depuis 2016 en Espagne, l’espèce se raréfie désormais partout.
« On a pu en compter jusqu’à 600 en même temps dans l’espace naturel du Larvotto. Aujourd’hui, il n’y en a plus aucune », soupire Olivier Brunel, le chef du service aquariums à l’Institut océanographique de Monaco. Alors, son Centre monégasque de soins des espèces marines a décidé de passer à l’action pour sauver le bivalve.
Policiers, pompiers, carabiniers et clubs de plongée mis à contribution
Avec le gouvernement princier et l’Association monégasque pour la protection de la nature, il lance ce mercredi un « plan de mobilisation pour un retour des grandes nacres ». « On appelle tous ceux qui vont sous l’eau à participer. La police, les pompiers, les carabiniers, les clubs de plongée vont être mis à contribution », présente Olivier Brunel.
Jusqu’à début avril, « période durant laquelle les feuilles de posidonie sont courtes, plusieurs campagnes d’observation cibleront les jeunes nacres qui sont d’ordinaire difficiles à repérer », expliquent les acteurs de ce projet. Car des spécimens juvéniles, qui résisteraient mieux au parasite tueur de la Pinna nobilis, pourraient être encore retrouvés.
« C’est en tout cas ce que l’on espère, explique le responsable de l’Institut océanographique de Monaco. Depuis l’été dernier, on a, comme cela, vu des jeunes nacres repousser dans quelques zones en Espagne, mais aussi en France et notamment en Corse. » Ces explorations s’annoncent en tout cas délicates. Aussi délicates que de retrouver une aiguille dans une botte de foin… A l’automne 2019, Monaco avait déjà lancé un projet expérimental visant à capturer des juvéniles à l’aide de pièges placés dans le courant. L’opération, renouvelée en 2020, n’avait donné aucun résultat.
« Reproduction en bassin » et « réintroduction en milieu naturel »
Une ou des observations permettrai (en) t pourtant d’avancer. « Si on en localise, on notera tous les détails sur l’habitat, la profondeur, et on fera un suivi pour essayer d’en savoir davantage sur le parasite. Comment agit-il et où est-il le plus virulent ? On sait déjà que la grande nacre n’est pas touchée quand elle est présente dans des lagunes », mais de nombreuses inconnues demeurent, précise encore Olivier Brunel.
Avec ces campagnes d’observation, également lancées sur l’île des Embiez, dans le Var, ou encore près des côtes de Leucate, le Centre monégasque de soins des espèces marines participe, aux côtés de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), « à l’animation d’un réseau d’experts méditerranéens sur les grandes nacres ».
Son but sera de « développer des partenariats techniques pour participer à l’effort de recherche sur le cycle de vie des grandes nacres, lever les obstacles restants à leur reproduction en bassin et envisager les conditions d’une réintroduction en milieu naturel ».