Hérault : La marque Eio fabrique des lunettes de soleil avec du plastique récupéré dans les rivières
ECOLO•La jeune entreprise récupère les déchets charriés par les cours d’eau, dans l’HéraultNicolas Bonzom
L'essentiel
- Les montures des lunettes de soleil fabriquées par l’entreprise Eio sont réalisées à partir de déchets en plastique récupérés dans les rivières.
- La start-up trie, nettoie puis broie cette matière première, une entreprise de Lyon la transforme en granulés, puis un lunetier fabrique les montures, dans l’Ain.
- Les premières paires viennent d’être envoyées aux clients.
Les lunettes de soleil fabriquées par Eio sont un peu spéciales : les montures sont réalisées à partir de déchets en plastique récupérés dans les rivières. Quentin Passet, le fondateur de cette jeune entreprise de Lunel (Hérault), a créé un étonnant parcours vertueux pour concevoir ses binocles. Et tout en France.
« L’idée, au départ, était de trouver un moyen de lutter contre la pollution liée au plastique, de le récupérer avant qu’il n’arrive dans les océans », confie ce chimiste de formation. L’Héraultais a ainsi d’abord placé lui-même des filets, dans les rivières du coin, pour tenter de récupérer les nombreux déchets qu’elles charrient. « Je me suis rendu compte que ce n’était pas très évident », note Quentin Passet.
« Des quantités énormes de déchets »
Il s’est alors rapproché d’organismes qui veillent sur les cours d’eau. Et d’abord, celui de l’Orb, près de Béziers, l’Etablissement public territorial du bassin (EPTB) de l’Orb et du Libron. « On m’a expliqué que lorsqu’ils faisaient des travaux de sécurisation des berges, notamment de l’élagage, pour éviter les embâcles, ils ramassaient des quantités énormes de déchets, notamment du plastique », reprend l’entrepreneur.
« Lorsqu’on descend les rivières à pied, et notamment l’hiver, quand il n’y a plus de feuilles, on se rend compte que l’on vit dans un milieu dégueulasse, déplore Vincent Darles, technicien spécialiste des rivières à l’EPTB de l’Orb et du Libron. Les déchets qui sont collectés lors des travaux sont d’ordinaire envoyés à des centres de tri. La démarche de Quentin Passet est donc très intéressante, j’ai accepté tout de suite. »
aBouteilles, tables, chaises et morceaux de kayak
Il y a un an, une remorque vissée à sa voiture, le fondateur d’Eio a ainsi commencé à récupérer, gratuitement, les nombreuses bouteilles, les tables et les chaises de jardin, les morceaux de kayak ou les cagettes abandonnées transportées par les eaux, leur évitant d’être incinérés ou enfouis. C’est cette matière première, une fois minutieusement triée, nettoyée et broyée, qui permet à Eio de concevoir ses lunettes. Seule une petite partie du plastique recyclé, qui présente des particularités essentielles à leur fabrication, est achetée par la start-up en Côte d’Or, car « le temps de séjour du plastique récupéré dans la rivière peut dégrader ses propriétaires mécaniques », note Quentin Passet.
Le plastique est ensuite transformé en granulés à Lyon, puis un lunetier de l’Ain conçoit les montures. Et pour compléter l’arsenal écolo, les verres sont conçus en polymère bio sourcé, issu d’huile de ricin. Pour la jeune entreprise, cette démarche n’est toutefois pertinente que si les lunettes ne finissent pas au fond d’un placard après quelques mois d’utilisation : Quentin Passet les a donc voulues « intemporelles, solides et élégantes », pour qu’elles puissent être portées encore « dans plusieurs dizaines années ». Les premières paires ont été envoyées aux clients. Elles sont vendues 110 euros.