BIODIVERSITELa situation est grave, mais pas (encore) désespérée pour le desman

Pyrénées : La situation est grave, mais pas (encore) désespérée pour le desman, avant un nouveau plan de protection

BIODIVERSITEUn nouveau plan d’action national, jusqu’en 2030, va être lancé pour sauver le toujours mystérieux desman des Pyrénées
Nicolas Stival

Nicolas Stival

L'essentiel

  • Le desman des Pyrénées a vu son aire de répartition diminuer drastiquement depuis une vingtaine d’années.
  • Après un plan européen, c’est un plan d’action national qui va être lancé en 2021 pour sauver le rat-trompette, dont il reste encore beaucoup à apprendre.

Lancé en 2014, le programme européen Life+ Desman s’est achevé au mois de juin. Mais le Conservatoire d’espaces naturels (CEN) Occitanie planche déjà sur la suite afin d’assurer la survie du très discret Galemys pyrenaicus, appelé aussi rat-trompette. Car les nouvelles ne sont pas très bonnes pour le petit animal d’une longueur de 23 à 27 cm, dont la moitié pour la queue.

Espèce endémique des Pyrénées et du nord-ouest de la péninsule ibérique, seulement découverte en 1811, cet insectivore semi-aquatique se fait de plus en plus rare. Et pas seulement parce que ce poids mouche (entre 50 et 80 grammes), essentiellement nocturne, est très difficile à observer.

Surtout présent dans l’est des Pyrénées

« On travaille sur son aire de répartition, explique Mélanie Némoz, du CEN Occitanie. Or, celle-ci a diminué de 50 à 60 % en l’espace d’une vingtaine d’années. » Un constat valable au Portugal, en Espagne, en Andorre comme en France, où la population se morcelle. « Il existe trois noyaux, dans l’ouest des Pyrénées [Pyrénées-Atlantiques], au centre de la chaîne [Hautes-Pyrénées, Haute-Garonne] et dans l’est [Ariège, Aude, Pyrénées-Orientales] où l’on trouve les plus belles populations. »

Mélanie Némoz coordonne un Plan national d’action desman (PNAD) – le second après celui établi de 2010 à 2015 – auquel le CEN met la dernière main, avant un lancement prévu début 2021 sous l’égide du ministère de l’Ecologie. « Au cours des dix années du PNAD, nous voulons travailler sur des secteurs clé, avec des mesures comme l’acquisition de sites », explique cette spécialiste, parmi la vingtaine en France qui planchent sur ce curieux cousin de la taupe.

La protection des berges et la connectivité des cours d'eau sont essentielles pour la survie de l'espèce.
La protection des berges et la connectivité des cours d'eau sont essentielles pour la survie de l'espèce. - Gérard Monge

Si ces noyaux sont pérennisés, il sera temps ensuite d’étudier le moyen de les reconnecter, grâce aux enseignements tirés du programme Life + Desman. Les différents acteurs du secteur hydraulique, d’ERDF au CEN en passant par la Dreal, ont appris à travailler ensemble pour tenter de préserver des berges naturelles, où le desman s’abrite, et la connectivité des cours d’eau, pour que l’animal ne se retrouve pas piégé.

« C’est d’autant plus important que l’on a découvert il y a peu de temps que les desmans pouvaient faire des déplacements de quelques kilomètres en un ou deux jours, et non pas entre 500 m et un kilomètre comme on le pensait auparavant », reprend Mélanie Némoz.

Un animal à ultrasons

Autre enseignement récent : « sur trois individus que l’on a capturés, deux émettaient des ultrasons. On peut donc imaginer des ultrasons pour les repousser des zones dangereuses ou, à l’inverse, pour les capturer. » L’animal est ensuite équipé d’une puce afin de le suivre dans ses mystérieuses pérégrinations. Le radiopistage reste la principale source d’informations, avec les traces génétiques (poils, excréments…).

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Life + Desman a aussi permis de médiatiser ce petit mammifère, jusque-là très méconnu même dans sa région, grâce à diverses initiatives comme la Caravane du Desman ou la publication d’ouvrages. Son apparence si particulière, avec cette étrange trompe amovible, joue aussi dans sa récente popularité que le rat-trompette met au service d’autres animaux moins charismatiques, mais également en danger, qui partagent son milieu de vie (musaraignes aquatiques, euproctes des Pyrénées…).

Le desman, « espèce parapluie »

« Le desman est une espèce parapluie, synthétise Mélanie Némoz. Quand on travaille sur sa préservation, on travaille aussi sur celle d’autres espèces. » Ceci dit, le combat est loin d’être gagné pour assurer la survie de ce héraut très discret de la faune pyrénéenne. Outre les aménagements humains et la pollution, il est également menacé par la gourmandise des chats et des visons d’Amérique, espèce extrêmement invasive.

Or, à la différence de l’ours brun, il n’y aura pas de congénères slovènes pour venir épauler les autochtones. S’il existe bien un desman de Moscovie, ce cousin oriental est bien plus massif (jusqu’à 500 grammes) et, en outre, lui aussi en grand danger d’extinction.