La France se désengage trop tard du soutien financier aux énergies fossiles, selon les ONG
PETROLE•Un soutien financier est prévu jusqu’en 2025 pour le pétrole et jusqu’en 2035 pour le gaz20 Minutes avec AFP
Dans un rapport présenté au parlement lundi, le gouvernement français a promis d’arrêter de soutenir financièrement les projets liés aux énergies fossiles d’ici cinq à quinze ans. Il estime que l’arrêt du soutien public aux projets d’exploration et d’ exploitation pétrolière à partir de 2025 pourrait coûter « jusqu’à 1.800 emplois compte tenu de la demande croissante de plusieurs compagnies pétrolières du Golfe d’établir des lignes de crédit de plusieurs milliards d’euros avec des agences de crédit export européennes ».
Pour le gaz, la situation sera réévaluée régulièrement d’ici à 2035 « pour fixer l’échéance la plus adaptée aux enjeux climatiques et industriels », et les entreprises concernées seront prévenues au moins quatre ans à l’avance s’il devait y avoir un changement d’ici là. L’impact social serait plus important que pour le pétrole « avec environ 3.000 emplois perdus », avance le rapport.
C’est « beaucoup trop tard »
C’est « beaucoup trop tard pour respecter l’accord de Paris » qui vise à contenir le réchauffement à 1,5 degré, a tweeté Greenpeace. Les projets liés à l’exploration et à l’exploitation du pétrole et du gaz ne représentent qu’une petite partie du total des garanties à l’exportation des autorités françaises, avec 2,7 milliards d’euros d’encours sous garantie, soit 4 % du total, à la fin mai.
Lors d’une conférence de presse à l’Assemblée nationale, le ministre de l’Economie Bruno Le Maire a rappelé l’ambition du plan de relance : que la France devienne « la première grande économie décarbonée européenne ». Il a souligné que l’objectif était « d’arriver à concilier lutte contre le réchauffement climatique et accélération de la transformation de l’économie française ».
Mesures « anecdotiques »
Le gouvernement propose également d’interdire dès le 1er janvier 2021 les garanties pour les crédits à l’exportation finançant des projets liés aux « pétroles extra-lourds, schistes et sables bitumineux », ainsi qu’aux « centrales thermiques dégradant le mix électrique du pays récipiendaire ».
Les ONG Les Amis de la Terre et Oxfam n’ont pas été convaincues et dénoncent dans un communiqué des mesures « anecdotiques » qui « ne forcent pas les industriels français actifs dans le secteur des hydrocarbures à changer de modèle économique ». Selon elles, Bruno Le Maire et les députés de la majorité « n’ont rien compris à l’urgence climatique. Repousser la frontière des énergies fossiles » jusqu’à 2035, « c’est préparer un monde à +4 degrés, voire +5 degrés de réchauffement climatique », assure Cécile Marchand, chargée de campagne climat aux Amis de la Terre France.
Bonus climatique
Concernant l’ensemble du dispositif de soutien à l’export, le rapport défend un « bonus climatique » pour les projets durables portés par les entreprises françaises. La classification effectuée par les autorités européennes « sera le mètre-étalon pour juger de l’éligibilité des projets à bonus, à l’exception du secteur naval » pour lequel « une méthodologie ad hoc transitoire est proposée », indique le rapport.
Le gouvernement dit souhaiter financer « au maximum permis par le cadre international les projets atteignant un seuil minimum de contenu français » et qui sont labellisés durables. A Bercy on explique que cela conduira à abaisser la part de contenu français exigée, notamment « parce qu’il n’y a pas encore une filière suffisamment robuste de solaire ou d’éolien intégralement sourcée en France ». L’idée est de « financer une part plus importante » d’entreprises basées en France « même si la part française sera 20-25 % et non pas de 40 % ou 50 % », précise-t-on de même source.