Bretagne : Après la pollution, l’agriculture défend son goût pour la méthanisation
AGRICULTURE•Mi août, un cours d’eau du Finistère a été sérieusement touché par un incident dans une centrale biogaz à ChâteaulinCamille Allain
L'essentiel
- Un incident dans une usine de biogaz a généré une pollution de l’Aulne, une rivière du Finistère.
- Le procédé de méthanisation est largement encouragé par les collectivités et plébiscité par les agriculteurs.
- Ces derniers veulent rassurer sur la sécurité de leurs installations.
L’incident avait privé 180.000 personnes d’eau potable au cœur du mois d’août. A Châteaulin (Finistère), le débordement de la cuve de la centrale de biogaz de Kastellin a sérieusement pollué l’Aulne, tranquille rivière qui traverse le parc régional d’Armorique. La pollution a également écorné l’image de la méthanisation, un procédé qui transforme le fumier, le lisier et les déchets de l’industrie agroalimentaire en gaz. Très largement subventionnée par les collectivités, la méthanisation est populaire en Bretagne, où les agriculteurs sont de plus en plus nombreux à y avoir recours. Un moyen de valoriser leurs effluents mais aussi un complément de revenu qui peut s’avérer considérable tant le prix de rachat est élevé.
Après l’incident, des voix se sont élevées pour dénoncer « les risques » de la méthanisation pour l’environnement. L’association de défense des consommateurs CLCV avait porté plainte contre X après la pollution. « La méthanisation a son utilité et sa raison d’être. Cet incident est malheureux mais il ne doit pas remettre le procédé en cause », assure Loïc Guines. Pour rassurer, le président de la chambre d’agriculture de Bretagne s’appuie sur « les contrôles réguliers » opérés par les autorités. Et rappelle que dans les fermes « il y a toujours du monde à travailler. S’il y a un dysfonctionnement, l’exploitant le verra rapidement ».
« Il en faut en retenir les leçons »
A Châteaulin, la gestion de la centrale biogaz par l’industriel Engie était entièrement automatisée. Depuis l’incident, la station est toujours arrêtée. « Cela nous rappelle qu’on est jamais à l’abri d’un accident. Il faut en retenir les leçons », estime Jean-Marc Onno. Cet éleveur de porcs du Morbihan exploite un méthaniseur depuis plus de dix ans. Lui qui a longtemps vécu en Allemagne était alors un pionnier en France.
« Ma démarche était avant tout écologique. Je voulais valoriser les effluents. Aujourd’hui, je peux chauffer mes bâtiments avec le biogaz et je n’utilise plus aucun engrais ». Celui qui est devenu président de l’association des Agriculteurs méthaniseurs bretons ne cache pas l’intérêt économique du procédé. « C’est une sécurité financière. Si je ne l’avais pas, je ne suis pas sûr que je serais encore éleveur ».
Une charte pour garantir la sécurité
Très subventionné, le biogaz provoque aussi des effets d’aubaine que son association tente de réguler. Une charte dictant la bonne conduite à tenir a été validée et une centaine d’exploitants français y ont déjà adhéré. « Notre objectif, c’est de dépasser les 200 sites audités en 2021 », explique Jean-Marc Onno. Le président de la chambre d’agriculture applaudit et met en garde. « La France veut rattraper l’Allemagne et met des moyens conséquents sur les investissements et le prix du rachat du gaz. Ce qui me pose question, c’est de voir que pour certains paysans, c’est devenu leur principale source de revenus ». L’effet d’aubaine devrait retomber. Comme pour le photovoltaïque, le prix de rachat devrait bientôt baisser. Souhaitons que la filière biogaz s’en remette mieux que son homologue du solaire.