DISCORDEPourquoi le contournement routier de Beynac va droit dans le mur

Dordogne : Le projet du contournement routier de Beynac définitivement enterré

DISCORDESelon la décison du Conseil d'Etat, les parties déjà construites de ce projet routier vieux de plus de trente ans, mais stoppé depuis fin 2018, devront être démolies
Marion Pignot

M.P. avec AFP

Le Conseil d’Etat a mis fin, lundi, à la saga judiciaire du contournement routier de Beynac-et-Cazenac, en Dordogne. La plus haute juridiction administrative a jugé « irrecevable » le pourvoi du département, promoteur de ce projet vieux de plus de trente ans et partiellement construit.

Ce projet de rocade de contournement de 3,2 km, pour un coût de 32 millions d’euros, devait permettre, selon ses promoteurs, de réduire la circulation routière dans un village touristique de 550 âmes, très fréquenté l’été et situé au pied d’une forteresse classée du XIIe, le long de la vallée de la Dordogne et sur l’axe Bergerac-Sarlat.

Pas de « raison impérative d’intérêt public majeur »

Le Conseil d’Etat a jugé que les arguments avancés par le département et son président PS, Germinal Peiro, n’étaient pas admissibles, scellant la victoire de leurs opposants, des défenseurs de l’environnement et du patrimoine qui s’étaient mobilisés contre ce projet accusé de dénaturer un village classé parmi les plus beaux de France et des sites protégés.

Dans le détail, les détracteurs estimaient que ce contournement porterait notamment atteinte, dans un site classé Natura 2000 et « réserve de biosphère », à l’habitat de plus de 120 espèces – chiroptères, mammifères semi-aquatiques, reptiles ou amphibiens –, dont quelques protégées. Ils déploraient également son impact visuel à une vallée parsemée de châteaux, qui a valu aux opposants le soutien remarqué de Stéphane Bern.

Dans un communiqué, la présidence du Conseil départemental évoque un « scandale d’état ». « Sans même avoir pris la peine d’étudier le dossier sur le fond et sans qu’aucun magistrat n’ait pris la peine de se déplacer sur le site, les juges du Conseil d’État ont condamné les Périgourdins à jeter à la poubelle plus de 40 millions d’euros. Cette décision est incompréhensible sur la forme : elle vient contredire trente-six ans de procédures et dix décisions du Tribunal administratif. »

« Le Face à un tel scandale démocratique, le Département entre aujourd’hui en résistance afin de faire triompher le bon sens et de dénoncer les accointances entre le lobby des châtelains fortunés et certaines personnalités du monde politique. Il en appelle aujourd’hui solennellement au Président de la République, premier garant du bon fonctionnement des institutions de notre pays », poursuit le Conseil départemental

15 millions d’euros de surcoût à un projet achevé à 60 %

La cour administrative d’appel avait estimé en décembre que le projet ne répondait pas à une « raison impérative d’intérêt public majeur » et ne pouvait pas déroger à l’interdiction de porter atteinte à des espèces protégées et à leur habitat, jugeant aussi que des travaux de voirie effectués en 2017 à Beynac rendaient la déviation « moins utile ».

Comme l’avait décidé l’an dernier la justice administrative, qui avait annulé un arrêté de 2018 autorisant les travaux, les parties déjà construites - mais stoppés depuis fin 2018 – devront donc être démolies. En décembre, Germinal Peiro estimait que la démolition ajouterait 15 millions d’euros de surcoût à un projet achevé à 60 %, et porterait atteinte à l’environnement.