Toussaint : A Lyon, la vie reprend dans les cimetières et ce sont les animaux qui repeuplent les allées
TOUSSAINT•La ville de Lyon a banni les produits phytosanitaires de ses cimetières pour recréer de la biodiversitéCaroline Girardon
L'essentiel
- Le cimetière de Loyasse à Lyon a été le premier à devenir un refuge pour la faune.
- Depuis 2016, la ville a banni l’usage de produits phytosanitaires dans ses cimetières, installé des nichoirs et recrée des mares pour favoriser la biodiversité.
- Résultat : en deux ans, les espèces animales se sont multipliées et la végétation ne s’en jamais aussi bien portée.
Dans les allées verdoyantes du cimetière de Loyasse, le plus ancien cimetière en activité de Lyon, la vie a repris son cours. Dès que la lune scintille, le chant de la chouette hulotte rompt le silence sans parvenir à troubler le sommeil des défunts, plongés dans un repos éternel. Pas plus que les coassements des grenouilles vertes s’ébrouant dans la mare.
Depuis deux ans, la faune a repris ses droits et la biodiversité prospère derrière les murs du « Père-Lachaise lyonnais ». Le site a été labellisé Refuge LPO (Ligue de protection des oiseaux) et cela a tout changé. Suivant les recommandations de l’association, la ville de Lyon a été l’une des premières à bannir les produits phytosanitaires de son cimetière. Elle a installé des nichoirs et des hôtels à insectes, a recréé des petites mares. « Il n’y a pas de gîte sans couvert. Les prédateurs ne sont jamais loin de leur nourriture », glisse Fabien Dubois, chargé de mission à la LPO. Ce sont eux qui « nettoient » désormais les allées et protègent les arbres.
« Revenir à l’équilibre naturel relève du bon sens »
« Ce n’est pas en gazant à tout va que l’on va éradiquer des espèces nuisibles », appuie Alain Giordano, adjoint en charge de l’écologie urbaine, intimement persuadé que les « problèmes naturels ne peuvent se régler que par une réponse naturelle ». « Les mésanges charbonnières mangent 1.500 insectes par jour. Leur dessert favori reste les chenilles processionnaires. Résultat : les pins du cimetière se portent bien mieux car ils n’ont quasiment plus de chenille sur leurs écorces », constate-t-il. « Il n’y a de fait plus besoin d’avoir recours aux entreprises pour sous-traiter le problème. C’est un gain d’argent et revenir à l’équilibre naturel relève du bon sens », abonde Fabien Dubois.
Depuis deux ans, les herbes poussent de façon plus anarchique, les prairies sont un peu folles, les tondeuses ont été rangées au garage. Les voix se sont parfois élevées pour dénoncer ce retour à la nature sauvage. Pas de quoi perturber le travail de la LPO : « On a pu entendre que cela était un manque de respect pour les défunts. Mais l’usage des pesticides est-il davantage respectueux ? », s’interroge Fabien Dubois, constant que le temps des « cimetières minéraux » est peut-être révolu à Lyon. Celui de la Guillotière a embrayé le pas. Ceux de la Croix-Rousse et de Saint-Rambert vont également suivre. Les résultats observés à Loyasse ont rapidement convaincu la ville d’adopter la même démarche dans ses autres cimetières.
Les hérissons, terreurs des limaces
« Chez les oiseaux, le nombre de couples a considérablement augmenté en 2018. Vingt-cinq se sont reproduits sur le site et on a assisté à une sorte de baby-boom », note Fabien Dubois. Ils ne sont pas les seuls. « La population des hérissons a été multipliée par huit en deux ans », ajoute Alain Giordano… Et celle des limaces a été décimée en un rien de temps.
28 espèces avaient été répertoriées dans le cimetière en 2016 au lancement de l’expérimentation. En 2018, elles étaient 54 espèces. Les libellules sont revenues coloniser l’espace. Le lérot, petit loir inscrit sur la liste rouge des espèces menacées, a également élu domicile près des tombes du cimetière. Tout comme les écureuils roux, les mulots sylvestres, les fouines, les chauves-souris. Sans oublier toutes sortes d’oiseaux comme les roitelets triples, le milan royal ou la grive musicienne.
La vie animale a donc repris son cours à moindre coût. « Pour Loyasse, ce sont 17.000 euros débloqués sur trois ans », conclut Alain Giordano qui espère pouvoir étendre le concept de label LPO aux résidences voisines des cimetières.